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20 March 2025

Imputation en France des déficits d'une succursale étrangère

MB
Mayer Brown

Contributor

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La Cour administrative d'appel de Paris se prononce sur l'imputation en France des pertes réalisées par une succursale établie dans un autre Etat membre (CAA Paris, 7 février 2025, n° 23PA02765).
France Tax

La Cour administrative d'appel de Paris se prononce sur l'imputation en France des pertes réalisées par une succursale établie dans un autre Etat membre (CAA Paris, 7 février 2025, n° 23PA02765).

Rappel des principes applicables :

L'article 209-I du CGI pose le principe de territorialité de l'impôt sur les sociétés (« IS ») où seuls les bénéfices réalisés en France, ou ceux dont l'imposition revient à la France en vertu d'une convention internationale, sont pris en compte pour déterminer l'assiette de l'IS.

Dans le cadre d'un groupe d'intégration fiscale, les articles 223 A et 223 B du CGI établissent les limites de la déduction des pertes des filiales ou établissements stables par la société mère, unique redevable de l'IS du groupe intégré.

Faits et procédure :

Une société anonyme membre d'un groupe d'intégration fiscale a déduit de ses résultats imposables en France, les pertes de ses succursales installées en Grèce et au Portugal (ces succursales ayant cessé leur activité compte tenu de la perte de leur licence bancaire).

Lors d'une vérification de comptabilité de la société anonyme au titre de ces deux exercices, l'administration fiscale a réintégré ces pertes aux résultats imposables de la société et a mis à la charge de cette dernière des cotisations supplémentaires au titre de l'IS, ainsi que des contributions sociale et exceptionnelle y afférentes.

Le tribunal administratif de Montreuil a débouté la société de sa demande de décharge d'impositions supplémentaires qui a alors interjeté appel ce premier jugement (TA Montreuil, 27 avril 2023, n° 2010516).

La société soutenait, d'une part, que la décision W AG de la Cour de justice de l'Union européenne ("CJUE") C-538/20 n'est pas applicable au litige dès lors que la France a renoncé, sur le fondement de son droit interne, à imposer les résultats des établissements stables non-résidents ; en conséquence de ce renoncement, les situations nationales et transnationales sont comparables et l'exigence de proportionnalité s'applique.

D'autre part, elle soutient que, selon l'interprétation du droit de l'Union européenne donnée par la CJUE dans l'arrêt C-650/16 A/S Bevola, l'interdiction de déduction des pertes définitives subies par un établissement situé dans un autre Etat membre viole la liberté d'établissement et contraint la France à autoriser l'imputation des déficits de ses filiales et établissements stables européens lorsque ceux-ci ont épuisé, dans leur Etat de résidence, toutes les possibilités de prise en compte de ces pertes.

Contrairement à la société requérante, qui considérait que la situation d'une société ayant une succursale à l'étranger était comparable à celle d'une société ayant une succursale en France, l'administration fiscale soutenait que les moyens invoqués n'étaient pas fondés dès lors que l'imputation des pertes étrangères était également exclue par les dispositions des conventions nationales.

Arrêt de la CAA de Paris :

Pour rejeter l'appel de la société, la Cour administrative d'appel de Paris rappelle la portée de la décision A/S BEVOLA selon laquelle "une disposition permettant la prise en compte des pertes d'une succursale aux fins de la détermination du bénéfice imposable de la société à laquelle appartient cette succursale constitue un avantage fiscal. Le fait d'accorder un tel avantage lorsque les pertes sont encourues au titre de l'activité d'une succursale établie dans l'Etat membre de la société résidente, mais non lorsque ces pertes proviennent d'un établissement stable situé dans un autre Etat membre que celui de cette société résidente, a pour conséquence que la situation fiscale d'une société résidente qui possède un établissement stable dans un autre Etat membre est moins favorable que celle qui serait la sienne si cette même activité était exercée au travers d'une succursale établie dans le même Etat membre qu'elle."

Toutefois, une différence de traitement induite par la législation fiscale d'un État membre au détriment des sociétés exerçant leur liberté d'établissement ne constitue pas une entrave à cette liberté si elle repose sur des situations objectivement non comparables ou si elle est justifiée par un impératif d'intérêt général, à condition d'être proportionnée à cet objectif.

La Cour relève en l'espèce que la convention fiscale entre la France et la Grèce, ainsi que le principe de territorialité de l'impôt, s'opposent à ce que la société puisse déduire en France les pertes d'exploitation de sa succursale grecque. Une telle déduction aurait cependant été possible si cette dernière avait été implantée sur le territoire français.

Se référant à l'arrêt W AG rendu par la CJUE, la Cour met en avant le fait que la France n'a pas assimilé, à des fins fiscales, les succursales françaises et les établissements stables situés en Grèce. En effet, la convention fiscale entre la France et la Grèce interdit à la France d'imposer les bénéfices réalisés par une succursale grecque appartenant à une société française, conformément au cadre législatif en vigueur. Dès lors, une société française ayant une succursale en Grèce ne se trouve pas dans une situation équivalente à celle d'une entreprise détenant une succursale en France.

Par conséquent, la Cour conclut qu'aucune restriction à la liberté d'établissement ne peut être retenue.

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