CURATED
23 June 2025

NEWSLETTER Du 12 Mai Au 23 Mai 2025 | N° 105

MB
Monfrini Bitton Klein

Contributor

Based in Geneva, but borderless in its reach, Monfrini Bitton Klein is a litigation-only Swiss law firm, internationally recognised for asset recovery, business crime and cross-border litigation. We are representatives for Switzerland of ICC-FraudNet, the leading global network of fraud and asset recovery lawyers.
Le Tribunal fédéral n'a pas suivi ce raisonnement.
Switzerland Criminal Law

I. ProcÉdure pÉnale

TF 6B_1339/2023

Inapplicabilité de la fiction de
retrait en cas de défaut, sans
excuse valable, d'un appelant
représenté [p. 2]

II. Droit pÉnal ECONOMIQUE

III. Droit international privÉ

IV. Droit de la poursuite et de la faillite

TF 5A_440/2024*

Collocation en troisième classe des créances issues de prêts accordés par des personnes proches à une société sans convention de postposition
explicite [p. 3]

TF 4A_622/2023

Développements sur la condition d'exigibilité d'une créance [p. 5]

V. Entraide internationale

-

Quelques propos introductifs

La présente Newsletter de Monfrini Bitton Klein vise à offrir, de manière hebdomadaire, un tour d'horizon de la jurisprudence rendue par le Tribunal fédéral dans les principaux domaines d'activité de l'Etude, soit le droit pénal économique et le recouvrement d'actifs (asset recovery).

Sans prétendre à l'exhaustivité, seront reproduits ci-après les considérants consacrant le raisonnement juridique principal développé par notre Haute juridiction sur les thématiques suivantes: droit de procédure pénale, droit pénal économique, droit international privé, droit de la poursuite et de la faillite, ainsi que le droit de l'entraide internationale.

I. PROCÉDURE PÉNALE

TF 6B_1339/2023 du 4 avril 2025| Inapplicabilité de la fiction de retrait en cas de défaut, sans excuse
valable, d'un appelant représenté (art. 407 al. 1 CPP)

  • Par jugement du 15 décembre 2020, le Kantonale Wirtschaftsgericht bernois («Tribunal cantonal») a acquitté A. («Recourant») des chefs d'accusation de faux dans les titres (art. 251 CP) et d'obtention frauduleuse d'une constatation fausse multiple (art. 253 CP). En revanche, il l'a déclaré coupable d'escroquerie par métier (art. 146 al. 2 CP), de faux dans les titres en plusieurs occasions ainsi que d'abus de confiance (art. 138 CP).
    Le Recourant a fait appel de cette décision.
  • Lors de l'audience d'appel devant l'Obergericht bernois, le défenseur d'office du Recourant a
    (i) produit un certificat médical attestant de l'incapacité de travail du Recourant, (ii) sollicité une dispense de comparution personnelle à l'audience et (iii) requis la poursuite de l'audience en l'absence du Recourant.
  • Le 6 novembre 2023, l'Obergericht a déclaré la procédure d'appel close en raison du retrait implicite de l'appel du Recourant et a constaté l'autorité de chose jugée du jugement de première instance.
  • Devant notre Haute Cour, le Recourant a invoqué une irrégularité dans la procédure en lien avec les conditions de retrait de l'appel (art. 407 CPP)
    (consid. 1.1).
  • Tant l'art. 407 al. 1 let. a CPP que l'art. 205 al. 4 CPP régissent les conséquences du défaut des parties. En particulier, si le prévenu a formé un appel et qu'il ne se présente pas à l'audience, sans excuse valable, et ne se fait pas représenter, l'appel est réputé retiré. En principe, toute personne citée à comparaître par une autorité pénale est tenue de se conformer à la citation. Toutefois, si elle est empêchée de s'y conformer, elle doit en informer l'autorité précitée et doit motiver son empêchement
    (consid. 1.2.2).
  • In casu, le Tribunal fédéral a constaté que la citation à comparaître à l'audience d'appel avait été valablement notifiée au Recourant qui vivait à l'étranger. Le précité ne s'était pas présenté à ladite audience en se prévalant d'un certificat médical et s'était fait représenter par son défenseur d'office. Ce dernier avait par ailleurs demandé que le Recourant soit dispensé de comparaître en personne et que l'audience d'appel ait tout de même lieu
    (consid. 1.5).
  • Sur cette base, l'Obergerich avait considéré que le Recourant ne s'était pas présenté à l'audience d'appel et n'avait pas d'excuse valable; elle en avait déduit un désintérêt pour le déroulement de la
    procédure ainsi qu'un retrait implicite de l'appel (consid. 1.5).
  • Notre Haute Cour n'a pas suivi l'approche de l'Obergericht, jugée trop réductrice: il a évoqué que le Code de procédure pénale ne prévoit pas de fiction de retrait lorsqu'un appelant représenté fait défaut sans excuse valable. Ainsi, le Tribunal fédéral a considéré que l'absence du Recourant – soit son refus de comparaître personnellement et de collaborer à l'audience d'appel – ne saurait justifier un retrait implicite de l'appel (consid. 1.5).
  • Par ailleurs, le Tribunal fédéral a rappelé que les conséquences d'un refus de coopérer à l'audience d'appel et d'un défaut étaient réglées de manière exhaustive par la loi. De ce fait, une déchéance du droit de former appel ne pouvait découler que d'une absence non excusée tant du prévenu que de son défenseur, soit en cas de «Totalversäumnis»
    (consid. 1.6).
  • Partant, le recours a été admis.

II. DROIT PÉNAL ÉCONOMIQUE

-

  • Droit international privÉ

III. DROIT DE LA POURSUITE ET DE LA FAILLITE

TF 5A_440/20241 du 31 mars 2025 | Les créances issues de prêts accordés par des personnes proches à une société sans convention de postposition explicite sont traitées comme des créances ordinaires de troisième classe en cas de faillite
(art. 219 al. 4 LP et art. 725b al. 4 ch. 1 CO)

  • Les sociétés F.SA et A.SA étaient détenues par B., C., D. et E. Au cours des années 2016, 2017 et 2018, A. SA et ses actionnaires ont accordé des prêts à F.SA qui était confrontée à des difficultés financières.
  • Par décision du 30 avril 2018, l'Einzelrichter Regionalgerichts de Maloja («Tribunal régional») a ouvert la faillite de F. SA.
  • Dans le cadre de la procédure de faillite, A.SA, B., C., D., et E. («Recourants») ont produit des créances relatives aux prêts susmentionnés.
    Ces créances n'ont pas été admises à l'état de collocation.
  • Par action du 10 septembre 2019, les Recourants se sont adressés au Tribunal régional et ont demandé que les créances produites soient admises en troisième classe.
  • Par décision du 22 mars 2022, le Tribunal régional a notamment décidé de les colloquer en troisième classe en tant que créances postposées. Les Recourants ont interjeté recours au Tribunal fédéral.
  • Devant notre Haute Cour, les Recourants ont contesté la décision de la cour cantonale d'une part, sous l'angle de l'arbitraire, en ce que la décision attaquée serait en contradiction manifeste avec la situation de fait et d'autre part, sous l'angle de l'état de collocation des créances (consid. 4 cum 5).
  • Quant au premier grief, le Tribunal fédéral a tout d'abord rappelé la teneur de l'aArt. 725 al. 2 CO (art. 725b al. 4 ch. 1 CO) qui prévoit que s'il existe des raisons sérieuses d'admettre que la société est surendettée, un bilan intermédiaire est dressé et soumis à la vérification d'un réviseur agréé. S'il résulte de ce bilan que les dettes sociales ne sont couvertes ni lorsque les biens sont estimés à leur valeur d'exploitation, ni lorsqu'ils le sont à leur valeur de liquidation, le conseil d'administration en avise le tribunal, à moins que des créanciers de la société n'acceptent que leur créance soit placée à un rang inférieur.
  • In casu, notre Haute Cour a retenu qu'il ressortait des constatations de l'instance précédente que ni le surendettement de la société, ni son éventuelle date n'avaient été clarifiés ou prouvés. Malgré les affirmations de la masse en faillite de F. SA, selon lesquelles les faits établis faisaient apparaître un surendettement comme étant hautement probable, les conditions effectives de cette circonstance n'avaient pas été prouvées en première instance. De ce fait, le Tribunal fédéral a considéré que la cour cantonale aurait dû partir de cette circonstance juridique et procéder à l'application du droit en prenant en compte l'absence de surendettement, ce qui impliquait pour les créances litigieuses d'être colloquées en troisième classe, sans postposition
    (consid. 4.3.2).
  • Ainsi, le Tribunal fédéral a soutenu que le grief d'arbitraire soulevé par les Recourants était fondé. Dès lors, la cour cantonale devait fonder l'application du droit sur le fait qu'un surendettement de la société n'était pas établi au moment de l'octroi du prêt (consid. 4.3.2).
  • Quant au second grief soulevé, il s'agissait d'établir à quelles conditions les prêts consentis par des personnes proches à la société pouvaient devenir des créances postposée dans la faillite, indépendamment de la volonté du créancier (consid. 5.4).
  • La cour cantonale avait justifié la collocation des créances litigieuses en se fondant sur le principe de l'interdiction de l'abus de droit (consid. 5.7).
  • En application de l'art. 2 al. 2 CC, il y a abus de droit lorsque le créancier proche de la société en faillite, en accordant le prêt, créé chez les autres créanciers une confiance digne de protection et qu'il les déçoit par la suite en déclarant sa créance à la collocation (consid. 5.7.3).
  • En vertu de l'aArt. 725 al. 2 CO (art. 725b al. 4 ch. 1 CO), hormis la condition du surendettement, il n'existe pas de base légale propre à fonder une confiance digne de protection pour les créanciers lorsque la société se trouve en difficulté financière. De ce fait, tant qu'une société n'est pas surendettée au moment de l'octroi du prêt, ce dernier et la revendication ultérieure de la créance dans la faillite ne semblent pas constituer un abus de droit manifeste (consid. 5.7.3).
  • In casu, notre Haute Cour s'est basée sur les constatations de fait déterminantes selon lesquelles les prêts en question avaient été versées à la société F.SA au cours des années 2016, 2017 et 2018. A partir de 2016, les problèmes de liquidités de la société étaient notoires et la faillite avait été déclarée à la fin de la même année. La société F.SA se trouvait dans une situation financière précaire au moment de l'octroi des prêts par les Recourants, situation dont ils étaient conscients. Toutefois, un surendettement n'avait pas été établi. La situation financière difficile de la société ne suffisait donc pas à considérer l'octroi des prêts par une personne proche et la revendication ultérieure des créances dans le cadre de la faillite comme abusifs (consid. 5.7.4).
  • En conclusion, le Tribunal fédéral a retenu qu'il n'y avait pas de surendettement au moment où les Recourants avaient accordé les prêts, de sorte que l'octroi de ces derniers et la revendication des créances dans la faillite de la société ne constituaient pas un abus de droit manifeste. Les créances litigieuses de troisième classe ne devaient donc pas être soumises à une postposition (consid. 5.10).
  • Partant, le recours a été admis.

TF 4A_622/2023 du 28 avril 2025| Développements sur la condition d'exigibilité d'une créance
(art. 82 al. 1 LP)

  • Le 11 avril 2006, la Banque S.A. («Banque») a accordé au couple formé de C. et A. («Recourant») un prêt hypothécaire de CHF 370'000.- à un taux d'intérêt de 2,875% pour le financement (partiel) de l'achat de la parcelle W. Le lendemain, C. a signé un «contrat deprêt hypothécaire au porteur» pour le montant susmentionné.
  • Le 26 juin 2007, la Banque a certifié le transfert de propriété à titre de garantie de l'instrument hypothécaire.
  • Le 14 novembre 2017, la Banque a résilié avec
    effet immédiat le prêt hypothécaire et le crédit
    incorporé dans le titre hypothécaire.
  • Le 30 novembre 2018, C. est décédée laissant pour seul héritier le Recourant.
  • La Banque a par la suite fait valoir, en exécution du gage immobilier grevant la parcelle W., deux commandements de payer à l'encontre (i) de la communauté héréditaire de C. et (ii) à A. pour un montant de CHF 289'000.- majoré d'intérêts à un taux de 5% à compter du 15 décembre 2017 sur la base du contrat conclu le 11 avril 2006.
  • Les deux parties ont formé opposition.
  • La Banque a requis la mainlevée provisoire sur les deux commandements laquelle a été partiellement admise par la Camera di esecuziuoni e fallimenti de la Cour d'appel tessinoise, à concurrence de
    CHF 306'036,10. Le Recourant a interjeté recours au Tribunal fédéral.
  • Devant notre Haute Cour, le Recourant a notamment fait valoir la violation de l'art. 82 LP en ce que la condition d'exigibilité à laquelle le titre valant reconnaissance de dette était soumis n'était pas établie. Ainsi le Recourant a demandé que le rejet de la mainlevée provisoire établi par le juge de première instance soit confirmé.
  • Au sens de l'art. 82 al. 1 LP, le créancier dont la poursuite se fonde sur une reconnaissance de dette constatée par acte authentique ou sous seing privé peut requérir la mainlevée provisoire.
  • Selon la jurisprudence, constitue une reconnaissance de dette l'acte sous seing privé signé par le débiteur poursuivi, dont il ressort clairement que celui-ci a l'intention de payer au créancier poursuivant, sans réserve ni condition, une somme déterminée – ou facilement déterminable – et exigible (consid. 2.1).
  • La cour cantonale s'était penchée sur la condition de l'exigibilité de la créance. Elle avait observé que la Banque n'avait pas valablement prouvé la résiliation du prêt avec effet immédiat et n'avait pas non plus indiqué sur la base de quelle disposition contractuelle elle était en droit de procéder de la sorte. Malgré cela, la cour cantonale s'était fondée sur la théorie développée en première instance par la Banque pour admettre la résiliation du prêt ordinaire intervenue en décembre 2018. De ce fait, selon la cour cantonale, le délai de résiliation expiré, l'obligation de rembourser rendait le prêt exigible (consid. 2.2).
  • Le Tribunal fédéral n'a pas suivi ce raisonnement. Notre Haute Cour a en effet souligné qu'il ressortait de l'arrêt attaqué que la Banque avait invoqué le grief de la résiliation ordinaire du prêt en première instance, mais qu'elle ne l'avait plus fait valoir en instance de recours. De ce fait, la cour cantonale ne pouvait pas prendre en considération ce grief en instance de recours. Étant donné que la preuve de la validité de la résiliation immédiate de la créance faisant l'objet de la poursuite faisait défaut, la créance n'était pas exigible et partant la mainlevée provisoire ne pouvait pas être prononcée (consid. 2.5).
  • Partant, le recours a été admis.

V. ENTRAIDE INTERNATIONALE

Footnote

1. Arrêt destiné à publication.

The content of this article is intended to provide a general guide to the subject matter. Specialist advice should be sought about your specific circumstances.

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