L'arrêt rendu par la chambre sociale de la Cour de cassation le 19 mars 2025*(n°22-17.315) précise la prescription applicable en matière de prise en charge par l'employeur de l'indemnité d'occupation en cas de télétravail, mais sème le doute sur son octroi.
En l'espèce, dans le cadre d'une demande en résiliation judiciaire de son contrat de travail, un salarié exerçant son activité majoritairement itinérante à partir de son domicile sollicite le paiement d'une indemnité d'occupation de ce dernier. Il fait valoir qu'il ne dispose pas d'un local professionnel au sein de l'entreprise pour réaliser les tâches administratives inhérentes à ses fonctions, et qu'il travaille en partie à son domicile (Cass. soc. 12 décembre 2012, n°110-20.502).
La Cour de cassation précise que l'indemnité d'occupation du domicile relève de l'exécution du contrat de travail et non d'une atteinte autonome à la vie privée, et qu'elle est soumise, par conséquent, à la prescription biennale de l'article L. 1471-1 du Code du travail et non à la prescription quinquennale de droit commun.
L'employeur bénéficie ainsi d'une clarification jurisprudentielle qui limite dans le temps les actions des salariés pour obtenir cette indemnisation. Passé ce délai de deux ans, aucune action ne peut prospérer, ce qui réduit le risque de contentieux anciens ou tardifs.
Par ailleurs, la Cour de cassation réaffirme que lorsqu'un salarié est amené, par nécessité ou sur injonction de l'employeur, à travailler à son domicile sans qu'un local professionnel ne lui soit mis à disposition, il subit une sujétion particulière qui doit être compensée par une indemnité d'occupation et la prise en charge des frais liés à l'utilisation de son domicile personnel à des fins professionnelles. Ainsi, l'absence de local professionnel mis à disposition suffit à ouvrir droit à l'indemnité.
A contrario, jusqu'à présent, en cas de mise à disposition d'un local professionnel, cette indemnité n'était pas due. Toutefois, la Cour de cassation semble élargir le bénéfice de cette indemnité même si le télétravail n'est pas explicitement "imposé" par l'employeur puisqu'elle laisse également entendre qu'un salarié peut prétendre à une indemnité d'occupation du domicile dès lors«qu'il a été convenu que le travail s'effectue sous la forme du télétravail».Or, sauf circonstances exceptionnelles (force majeure, épidémie, etc.), le télétravail est par essence même convenu entre l'employeur et le salarié.
Afin d'interpréter cette formulation ambiguë, il nous semble sage d'attendre d'autres décisions de la Cour de cassation.
Notre avis: L'arrêt du 19 mars 2025 (n°22-17.315) présente un intérêt majeur pour les employeurs, en particulier dans le contexte du télétravail et de l'occupation du domicile à des fins professionnelles. Il clarifie la prescription applicable et limite les risques de contentieux tardifs. Il convient tout de même de rester vigilant, la Cour de cassation ayant semé le doute sur l'octroi des conditions d'ouverture du droit à l'indemnité d'occupation du domicile.
*Cass soc., 19 mars 2025 n°22-17.315
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