Quelques propos introductifs

La présente Newsletter de Monfrini Bitton Klein vise à offrir, de manière hebdomadaire, un tour d'horizon de la jurisprudence rendue par le Tribunal fédéral dans les principaux domaines d'activité de l'Etude, soit le droit pénal économique et le recouvrement d'actifs (asset recovery).

Sans prétendre à l'exhaustivité, seront reproduits ci-après les considérants consacrant le raisonnement juridique principal développé par notre Haute juridiction sur les thématiques suivantes : droit de procédure pénale, droit pénal économique, droit international privé, droit de la poursuite et de la faillite, ainsi que le droit de l'entraide internationale.

I. PROCÉDURE PÉNALE

TF 6B_16/20221 du 26 janvier 2023 | Restitution du délai d'opposition : limitation au cas de défense obligatoire (art. 94 et 130 CPP)

  • Par ordonnance pénale du 20 mai 2021 le Recourant a été condamné pour homicide par négligence à 90 jours-amende à CHF 200.- le jour, avec sursis pendant deux ans. Le 1e juin 2021, le Recourant, via son avocat, a informé le Ministère public avoir rédigé une opposition à l'ordonnance, mais que cette dernière n'est pas parvenue à l'autorité dans les temps en raison d'une erreur de l'étude d'avocat qui avait omis de poster le courrier. Pour cette raison, le Recourant a demandé une restitution du délai d'opposition au sens de l'art. 94 CPP. Cette requête lui a été refusée.
  • L'art. 94 al. 1 CPP exige que la partie démontre que le défaut n'est imputable à aucune faute de sa part. Selon la jurisprudence, le comportement fautif de l'avocat est imputable à son mandant, à l'exception des cas de grossière erreur de la part du défenseur en particulier lors d'une défense obligatoire (consid. 1.1).
  • L'ATF 143 I 284 avait exposé les conditions nécessaires permettant de déroger à ce principe de l'imputation de la faute de l'avocat au mandant : (i) il doit s'agir d'un cas de défense obligatoire, (ii) le comportement de l'avocat relève de la négligence grave, est complètement faux ou encore totalement contraire aux règles de l'art, (iii) le préjudice subi ne peut pas être réparé par une action en dommages-intérêts et (iv) le mandant a rendu vraisemblable qu'il n'avait commis aucune faute propre sans laquelle le défaut ne serait pas survenu (consid. 1.2).
  • Le Recourant a en l'occurrence remis en question la première condition (cas de défense obligatoire). Il a avancé que la locution « en particulier lors d'une défense obligatoire » utilisé dans l'ATF 143 I 284 impliquait qu'il était également possible de bénéficier d'une restitution de délai dans d'autres cas graves (consid. 1.4).
  • Le Tribunal fédéral a examiné l'arrêt précité ainsi que la jurisprudence postérieure et a constaté que la restitution de délai a toujours été analysée à l'aune de la réalisation ou non d'un cas de défense obligatoire. De surcroit, la doctrine est également d'avis que les exceptions au principe d'imputation de la faute de l'avocat au mandant doivent être admises restrictivement et limitées aux cas de défense obligatoire (consid. 1.5.1).
  • Pour ces motifs, notre Haute Cour a conclu qu'il y avait lieu de s'en tenir au fait que la défense obligatoire était une condition sine qua non pour faire exception à l'imputation de la faute grave de l'avocat à son client (consid. 1.5.2).
  • En outre, le Recourant a également fait valoir que dans le cadre de l'art. 130 let. b CPP (« Le prévenu doit avoir un défenseur dans les cas suivants : [...] il encourt une peine privative de liberté de plus d'un an, une mesure entraînant une privation de liberté ou une expulsion »), il était nécessaire de se référer à la peine menace abstraite et non à la peine concrètement encourue (consid. 1.4).
  • Le Tribunal fédéral a rappelé que l'art. 130 CPP tient compte des circonstances du cas d'espèce, raison pour laquelle il y a bien lieu de se baser sur la peine concrètement encourue, in casu 90 jours-amende, et non à la peine menace. Dès lors, le Recourant ne se trouvait pas dans un cas de défense d'obligatoire (consid. 1.4).
  • En conclusion, en l'absence d'un cas de défense obligatoire, la faute commise par l'avocat doit être imputée au Recourant, l'empêchant ainsi de se prévaloir de la restitution de délai de l'art. 94 CPP.

TF 6B_919/2021 du 30 janvier 2023 | Violation du principe de célérité (art. 5 § 4 CEDH)

  • Le Recourant demandait une indemnité adéquate au sens de l'art. 5 § 5 CEDH en invoquant que le principe de célérité aurait été violé lors de la procédure relative à une demande de levée de mesure thérapeutique le concernant (consid. 2.5).
  • Le Tribunal fédéral a retenu que la durée de la procédure de plus de 13 mois n'était pas compatible, selon la jurisprudence, avec le « bref délai » de l'art. 5 § 4 CEDH. Contrairement aux considérations de l'instance précédente, ni la complexité de l'affaire ni la pandémie de COVID-19 ne justifiaient une durée de procédure aussi longue pour une demande de levée de mesure thérapeutique (consid. 2.1).
  • En tête de son raisonnement, notre Haute Cour a concédé qu'il était notoire que la pandémie de COVID-19 avait souvent entraîné des retards supplémentaires. Néanmoins in casu, seule une procédure écrite avait été menée et aucune (nouvelle) expertise n'avait été requise. En outre, contrairement à l'avis de l'instance inférieure, le fait que les autorités d'exécution avaient été actives durant la procédure n'était pas déterminant pour la question de la violation du principe de célérité. De plus, de par les événements survenus début mars 2021 (à savoir une nouvelle tentative de suicide du Recourant et l'incendie de sa cellule) – qui avaient incontestablement conduit (i) à un changement de la situation initiale et (ii) à une nouvelle appréciation du cas d'espèce ainsi que, (iii) à l'admission du recours et à la levée de la mesure thérapeutique – un retard ultérieur de la procédure de première instance qui avait débuté en juin 2020 ne pouvait qu'être justifié. A la lumière de la jurisprudence actuelle, le Tribunal fédéral a ainsi déclaré que tant la durée de la procédure interne à l'administration que la durée de la procédure dans son ensemble n'étaient pas compatibles avec le « bref délai » de l'art. 5 § 4 CEDH (consid. 2.4).
  • Cependant, le Recourant n'exposait pas dans son recours en quoi le retard de la procédure lui aurait causé un préjudice. En constatant expressément la violation du principe de célérité selon l'art. 5 § 4 CEDH dans son dispositif et en renonçant à lui imputer les frais, notre Haute Cour a donc conclu que le Recourant obtenait une satisfaction suffisante ainsi qu'une réparation complète pour la violation subie de ses droits. Sa charge liée au retard de la procédure peut être qualifiée de légère car la demande de levée de la mesure thérapeutique a finalement été admise, malgré une durée de procédure excessivement longue (consid. 2.5).
  • Partant, le Tribunal fédéral a admis partiellement le recours au motif que le principe de célérité avait été violé par l'instance précédente. Notre Haute Cour a néanmoins rejeté le grief relatif au droit du Recourant à une indemnité au sens de l'art. 5 § 5 CEDH en raison d'une absence d'une telle demande dans la procédure cantonale (consid. 3).

II. DROIT PÉNAL ÉCONOMIQUE

TF 6B_899/2021 du 26 janvier 2023 |Violation du secret bancaire par un avocat (art. 47 LB) – violation du devoir de diligence (art. 12 let. a LLC) – dol éventuel admis (art. 12 al. 2 CP)

  • A. a mené, en tant qu'avocat de B., un procès devant l'Arbeitsgericht de Zurich contre l'ancien employeur de ce dernier, la société C. AG. Dans ce procès, était notamment contesté le fait de savoir si la banque avait encore eu des relations d'affaires problématiques avec des clients américains fin 2012. B. souhaitait le prouver à l'aide du document « US-Exit-Report », raison pour laquelle il avait remis à son avocat A. ce document de six pages qu'il avait reçu alors qu'il travaillait encore pour la banque. A. avait compté sur le fait que B. aurait déjà caviardé de lui-même les éventuelles données couvertes par le secret bancaire, raison pour laquelle il n'avait pas lu ou étudié le document dans son intégralité avant de le déposer. Les pages 4 et 5 de ce document contenaient des données soumises au secret bancaire non-caviardées, à savoir les noms et les pays de résidence des clients des banques, les numéros de compte et les soldes des comptes.
  • Il a été reproché à A. d'avoir remis le document tel quel comme preuve à l'Arbeitsgericht de Zurich, en sachant, ou du moins en acceptant, qu'il contenait des informations soumises au secret bancaire.
  • Le 7 juin 2018, le Bezirksgericht de Zurich a déclaré A. coupable d'infraction à la loi fédérale sur les banques et les caisses d'épargne (art. 47 al. 1 let. a et c LB) et l'a puni d'une peine pécuniaire de 30 jours-amende à CHF 220.-, avec sursis. Sur appel de A., l'Obergericht de Zurich l'a acquitté le 8 juin 2021 une deuxième fois, étant précisé que l'affaire était déjà montée au Tribunal fédéral une première fois.
  • Dans son recours par-devant le Tribunal fédéral, le Ministère public zurichois a fait valoir en substance que la conclusion de l'instance précédente, selon laquelle A. n'aurait pas agi intentionnellement ou par dol éventuel et n'aurait donc pas rempli les éléments subjectifs de l'infraction visée à l'art. 47 al. 1 let. a et. c LB, était contraire au droit fédéral (consid. 3.1).
  • L'objet de cet arrêt était ainsi de savoir si A remplissait les éléments subjectifs de l'infraction prévue à l'art. 47 LB.
  • Selon l'art. 12 CP, agit intentionnellement quiconque commet un crime ou un délit avec conscience et volonté. L'auteur agit déjà intentionnellement lorsqu'il tient pour possible la réalisation de l'infraction et l'accepte au cas où celle-ci se produirait (consid. 3.5.1).
  • In casu, le Tribunal fédéral a considéré qu'il était établi que A. n'avait pas lu intégralement le document « US-Exit-Report » avant de le déposer comme moyen de preuve dans le cadre du procès. Il ne savait donc pas ou ne pouvait pas savoir quel était le contenu des pages litigieuses. Il était également établi qu'il avait délibérément choisi de ne pas savoir. Le fait de déposer en partie « sciemment à l'aveugle » le document « US-Exit-Report » ou d'omettre sciemment de l'examiner intégralement avant de le déposer comme moyen de preuve, tout en sachant qu'il contenait peut-être (à l'origine) des données couvertes par le secret bancaire, indiquait que A. considérait au moins comme « possible », au sens de l'art. 12 al. 2 CP, le dépôt d'un document dont le contenu était soumis au secret bancaire (consid. 3.6.1).
  • Par ailleurs, notre Haute Cour a également retenu que l'omission de A. de ne pas lire intégralement le document avant de le présenter comme preuve dans le cadre du procès constituait une violation particulièrement grave du devoir de diligence (art. 12 let. a LLCA) (consid. 3.6.2).
  • En outre, le Tribunal fédéral a également relevé que A. avait méprisé les règles de procédure civile selon lesquelles la décision de produire des données soumises au secret bancaire est réservée au juge (art. 160 al. 1 let. b cum art. 163 al. 2 CPC) (consid. 3.6.2).
  • Dès lors, c'est à tort que l'instance précédente a retenu que A. ne s'était pas accommodé d'une violation du secret bancaire. En niant le dol éventuel de A. en relation avec l'art. 47 LB, l'instance précédente a violé le droit fédéral (consid. 3.6.3).
  • Partant, le recours a été admis, l'arrêt attaqué annulé et l'affaire renvoyée à l'instance précédente pour nouvelle décision (consid. 4).

TF 6B_1443/2021 du 13 février 2023 | Abus de confiance (art. 138 CP) – principe d'accusation

  • La Recourante reprochait à l'instance précédente d'avoir violé la maxime d'accusation en se fondant sur des éléments qui ne ressortaient pas de l'acte d'accusation pour retenir l'existence de valeurs patrimoniales confiées au sens de l'art. 138 al. 1 CP (consid. 1).
  • Par ordonnance pénale ayant tenu lieu d'acte d'accusation (art. 356 al. 1 CPP), le Ministère public reprochait à la Recourante, en sa qualité d'organe de la société C., d'avoir utilisé le montant versé par la société B. à son propre profit, contrairement aux instructions reçues. De l'avis du Ministère public, les fonds avaient bien été reçus par la société C., mais la Recourante ne les avait pas affectés au but convenu, raison pour laquelle elle se serait rendue coupable d'abus de confiance (consid. 1.2).
  • Le Tribunal fédéral a cependant relevé que la condamnation de la Recourante par l'instance cantonale était le résultat d'un raisonnement différent de ce dernier. L'arrêt entrepris retenait que les fonds avaient été versés sur le compte de la société F. dont la Recourante était un organe assumant le rôle d'intermédiaire d'encaissement, mais n'avaient jamais été remis à la société C., qui était la cocontractante de la société B. et à qui les fonds auraient dû revenir. D'après la cour cantonale, les fonds n'avaient pas été reçus par la société C. mais avaient été conservés sans droit par la Recourante.
  • Dans cette hypothèse, les fonds avaient été confiés à la société F., dont la Recourante était un organe. En revanche, la cour cantonale ne retenait pas que la Recourante, en sa qualité d'organe de la société C., aurait renoncé à l'exécution de la transaction convenue. Au contraire, la dernière instance cantonale s'écartait des faits retenus par le Ministère public et l'autorité de première instance en retenant que le contrat avait été conclu dans un but « commercial », sans autres précisions quant à la nature du but convenu (consid. 1.3).
  • Notre Haute Cour a déclaré que la cour cantonale ne s'était pas contentée de proposer un nouveau raisonnement juridique, mais s'était écartée des faits décrits dans l'ordonnance pénale. Elle avait nouvellement retenu que les fonds confiés par les sociétés B. à F. – dont la Recourante était un organe – n'avaient jamais été remis à la société C., alors que le Ministère public avait retenu l'inverse. Ce faisant, le Tribunal fédéral a retenu que le principe de l'immutabilité de l'acte d'accusation avait été enfreint. En particulier, notre Haute Cour a expliqué ne pas déceler en quoi la Recourante répondrait pour la société F. du fait que les fonds n'avaient pas été remis à la société C., puisque l'ordonnance pénale ne faisait aucune mention de la qualité d'organe de la Recourante envers la société F. De même, il n'était rien dit du rôle de la société F. dans la transaction entre les sociétés C. et B., de sorte qu'il n'était pas possible de déterminer si, comme l'avait pourtant retenu la cour cantonale, elle agissait en qualité d'auxiliaire d'encaissement. Finalement, le Ministère public ne s'était pas avancé sur une éventuelle obligation, contractuelle ou non, de la société F. de remettre les fonds à la société C. Que ces éléments aient été évoqués lors de l'instruction n'était pas déterminant, dès lors que le Ministère public avait, dans son ordonnance pénale, cristallisé les agissements pour lesquels il entendait renvoyer la Recourante en jugement (consid. 1.4).
  • Le Tribunal fédéral a donc conclu qu'en condamnant la Recourante pour abus de confiance, l'instance cantonale avait violé le droit fédéral, en particulier le principe d'immutabilité de l'acte d'accusation selon l'art. 350 al. 1 CPP et la maxime d'accusation au sens des art. 9 et 325 CPP (consid. 1.5).
  • Compte tenu de ce qui précède, le recours a été admis par notre Haute Cour, l'arrêt entrepris annulé et la cause renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision (consid. 2).

III. DROIT INTERNATIONAL PRIVÉ

TF 5A_900/2021 du 23 janvier 2023 | Prononcé de l'exequatur de deux décisions roumaines dans le cadre d'un séquestre – application de la Convention de Lugano

  • Les parties se sont engagées dans un litige qu'elles ont porté devant les tribunaux roumains. B. SRL (la créancière) avait son siège en Roumanie, A. (le débiteur) résidait au Ghana. A. détenait, avec C. et D., en tant que société simple, l'immeuble U. en propriété commune. Par ordonnance du 10 mars 2020, le Tribunal de district de Constanța (Roumanie) a ordonné une saisie conservatoire des biens mobiliers et immobiliers de A. jusqu'à concurrence d'un montant converti de CHF 237'239.60.-. La Cour d'appel de Constanța a rejeté un appel contre cette décision par un arrêt du 29 avril 2020.
  • Le 14 décembre 2020, B. SRL a requis du Tribunal régional du Jura bernois-Seeland (i) l'exequatur de l'arrêt rendu par la Cour d'appel le 29 avril 2020 et (ii) le séquestre de la part de liquidation du débiteur dans la société simple de l'immeuble U.
  • Le 18 décembre 2020, le cantonal a déclaré exécutoire non seulement l'arrêt de la Cour d'appel de Constanța du 29 avril 2020, mais également l'ordonnance du Tribunal de district de Constanța du 10 mars 2020. Par ordonnance de séquestre du même jour, le Tribunal régional du Jura bernois-Seeland a, sur la base de l'art. 271 al. 1 ch. 6 et al. 3 LP, séquestré la part de liquidation de A. dans la société simple précitée jusqu'à concurrence de CHF 237'239.60.-. A a recouru au Tribunal fédéral.
  • Le recours portait uniquement sur la déclaration d'exequatur (consid. 1).
  • Le Recourant a tout d'abord critiqué le fait que le tribunal bernois ait déclaré exécutoire l'ordonnance ainsi que l'arrêt d'appel roumain, alors que B. SRL n'avait pas explicitement mentionné dans ses conclusions que l'exequatur portait sur les deux décisions (consid. 2).
  • Selon l'art. 40 al. 1 CL, le droit de l'État requis est déterminant pour les modalités du dépôt de la requête d'exequatur (consid. 2.2).
  • En revanche, la requête doit être interprétée selon les règles de l'État d'exécution. Il est conforme à la conception suisse du droit de procédure que les conclusions juridiques doivent être interprétées de bonne foi et à la lumière de leur motivation (consid. 2.2).
  • Le Tribunal fédéral a récemment laissé ouverte la question de savoir si, dans le cadre d'une demande de séquestre fondée sur un titre de Lugano (art. 271 al. 3 LP), une requête d'exequatur du titre de Lugano était nécessaire ou si le tribunal devait statuer d'office sur la demande d'exequatur (ATF 147 III 491 consid. 6.2.1 avec renvois). Entre-temps, il a clarifié cette question en ce sens qu'aucune demande formelle d'exequatur n'est nécessaire (TF 5A_428/2022 du 18 janvier 2023 consid. 5.2.3, destiné à la publication) (consid. 2.2).
  • In casu, le Tribunal fédéral a considéré que l'interprétation de la requête effectuée par l'instance précédente, en tenant compte des annexes et des motifs, était conforme au droit. Il était exact de prononcer l'exequatur des deux décisions roumaines, bien que cela n'avait pas été formellement demandé. En effet, en application de sa jurisprudence récente, l'exequatur devait également être étendue à un jugement pour lequel il n'existait certes pas de demande expresse, mais pour lequel les conditions de l'art. 271 al. 1 ch. 6 et al. 3 LP avaient été démontrées (consid. 2.3).
  • Le premier grief du Recourant a donc été rejeté (consid. 2.4).
  • Le Recourant a ensuite argumenté que la Convention de Lugano aurait été appliquée à tort, car les décisions roumaines avaient été rendues dans le cadre d'une procédure de faillite et d'insolvabilité (consid. 3).
  • Selon l'art. 1 al. 2 let. b CL, les faillites, concordats et autres procédures analogues sont exclus du champ d'application de la Convention. D'une manière générale, cette exclusion ne s'applique qu'aux actions qui ont lieu dans le cadre d'une liquidation de faillite, qui découlent directement de la procédure de faillite et qui s'inscrivent étroitement dans une liquidation d'actifs. Les procédures qui ne trouvent pas leur origine dans le droit de la poursuite pour dettes et faillite ou qui n'en sont pas la conséquence directe et qui, au contraire, auraient selon toute vraisemblance été introduites même en l'absence de faillite, ne tombent pas sous le coup de l'exclusion (consid. 3.2).
  • En vertu de la clause d'exclusion de l'art. 1 al. 2 let. b CL, le Tribunal fédéral a rappelé que ce n'est pas la classification formelle d'un recours précis dans un acte de droit de l'insolvabilité qui est déterminante en premier lieu. Il convient plutôt d'examiner au cas par cas si un recours tombe sous le coup de la clause d'exclusion (consid. 3.3.1).
  • In casu, le Tribunal fédéral a confirmé le raisonnement suivi par l'instance cantonale précédente : les deux décisions roumaines visaient en substance à garantir une créance contestée entre les parties au titre de la responsabilité du gérant (similaire à l'art. 754 CO). Elles ne traitaient pas d'une action matérielle d'un administrateur de faillite qui aurait pour conséquence une augmentation de la masse de la faillite. Il s'agissait plutôt uniquement de garantir une créance litigieuse dans le cadre de mesures provisoires en limitant le pouvoir de disposition du débiteur. La procédure roumaine était donc comparable à une procédure de séquestre en Suisse, qui ne tombe justement pas sous le coup de la clause d'exclusion de l'art. 1 al. 2 let. b de la CL. Comme les décisions roumaines n'ordonnaient qu'une saisie conservatoire (à exécuter en Suisse comme un séquestre) pour une créance litigieuse, il ne s'agissait ni d'une procédure de faillite ni d'une procédure annexe étroitement liée à la faillite (consid. 3.1).
  • Le fait qu'une ordonnance de saisie conservatoire étrangère porte globalement sur tous les actifs d'un débiteur - le cas échéant contrairement aux usages suisses - ne signifie pas qu'il y ait une liquidation générale de ses biens ou une faillite. La comparaison entre la saisie conservatoire roumaine et le séquestre suisse se réfère manifestement au but (similaire) de la garantie d'une créance et non au degré de détail avec lequel les objets utilisés pour la garantie ont été désignés dans les décisions roumaines ou devraient l'être dans le cas d'une mesure comparable en Suisse (consid. 3.4).
  • Le deuxième grief du Recourant a été rejeté (consid. 3.4)
  • Partant, le recours a été rejeté (consid. 5).

IV. DROIT DE LA POURSUITE ET DE LA FAILLITE

-

V. ENTRAIDE INTERNATIONALE

-

Footnote

1. Destiné à publication

The content of this article is intended to provide a general guide to the subject matter. Specialist advice should be sought about your specific circumstances.