La loi de finances rectificative pour 2022 du 16 août 2022 prévoit des mesures sociales en faveur du pouvoir d'achat dont l'employeur a la possibilité de se saisir.

Parmi celles-ci figurent notamment la nouvelle prime de partage de la valeur, différents assouplissements en matière de frais professionnels, le rachat des JRTT et de nouvelles dispositions en faveur de l'épargne salariale.

Article rédigé en collaboration avec Matthieu Blaschczyk

Petit tour d'horizon de ces nouvelles mesures.

La prime de partage de la valeur (PPV)

Cette prime est un dispositif facultatif qui permet à l'employeur de verser à tous ses salariés (ou à ceux dont la rémunération annuelle est inférieure à un montant qu'il détermine), une prime dont le montant exonéré peut atteindre 3.000€ (jusqu'à 6.000€ si l'entreprise est dotée d'un accord d'intéressement).

Cette prime, qui succède à la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat (PEPA), présente l'avantage d'être exonérée de charges sociales patronales et salariales, mais le salarié devra acquitter la CSG/CRDS et l'impôt sur le revenu sur la PPV. Côté patronal, seules les entreprises employant 250 salariés et plus seront assujetties au forfait social.

Cette prime peut être versée depuis le 1er juillet 2022 et pourra être reconduite pour les années civiles suivantes. Lorsque la prime est versée entre le 1er juillet 2022 et le 31 décembre 2023 aux salariés dont la rémunération est inférieure à 60.442,20€ (soit trois fois le SMIC annuel), l'exonération vise le forfait social, la CSG/CRDS et l'impôt sur le revenu. A compter de 2024 en revanche, peu important le niveau de rémunération du salarié, la prime sera assujettie à CSG/CRDS et à l'impôt sur le revenu.

En pratique, l'entreprise pourra mettre en place par décision unilatérale (DUE) cette prime ou la négocier dans le cadre de la NAO en prenant garde que la prime ne remplace (i) aucun élément de rémunération versé jusqu'alors, ni (ii) aucune augmentation de salaire ou prime prévues par un accord d'entreprise, par le contrat de travail ou par les usages en vigueur dans l'entreprise.

Le régime de faveur (exonération sociale et fiscale) ne sera accordé qu'aux entreprises respectant scrupuleusement les conditions d'attribution. Le texte de la DUE ou de l'accord devra donc démontrer que les conditions légales d'éligibilité ont été suivies.

Les assouplissements sur les frais professionnels

La loi de finances rectificative du 16 août 2022 a revalorisé les seuils d'exonération fiscale de diverses primes facultatives liées aux frais supportés par le salarié pour ses déplacements. Ces primes bénéficient également d'une exonération de cotisations sociales sous certaines limites.

Ces dispositifs, ou la revalorisation de ceux déjà en vigueur dans l'entreprise, permettent aux salariés de bénéficier d'un complément de rémunération assorti d'exonérations sociale et fiscale.

La prime de transport

Elle permet à l'employeur d'assumer tout ou partie des frais de carburant des salariés qui se trouvent contraints d'utiliser leur véhicule personnel pour leurs trajets entre leur domicile et leur lieu de travail.

Exceptionnellement, pour les années 2022 et 2023, la loi permet cette possible prise en charge des frais de carburant des salariés qui utilisent leur véhicule pour se rendre sur le lieu de travail, sans qu'ils n'aient à justifier de leur impossibilité d'utiliser les transports en commun.

Les sommes versées par l'employeur à ses salariés au titre de la prise en charge des frais de carburant sont, en principe, exonérées d'impôt sur le revenu, dans la limite de 200 € par an et par salarié, et, au titre de la prise charge des frais d'alimentation d'un véhicule électrique, hybride rechargeable ou à hydrogène, dans la limite de 500 € par an et par salarié. Pour les années 2022 et 2023, ces deux plafonds sont relevés de 200 € supplémentaires en franchise d'impôt.

Par exception pour 2022 et 2023, les salariés auront la possibilité de cumuler la prime de transport avec la prise en charge du coût des titres d'abonnement aux transports collectifs.

Le forfait « mobilités durables »

Il permet à l'employeur de prendre en charge tout ou partie des frais exposés par les salariés qui utilisent des moyens de transport durables pour effectuer leur trajet domicile et lieu de travail. Ce forfait couvre notamment le vélo, le covoiturage (conducteur ou passager) et les déplacements en transports publics.

La prise en charge des frais du forfait « mobilités durables » est exonérée en principe d'impôt sur le revenu, de cotisations sociales et de CSG/CRDS à hauteur de 500 € par an. Ce plafond d'exonération est également relevé de 200 € supplémentaires pour les années 2022 et 2023 (soit un plafond d'exonération à 700 €).

Il est également possible de cumuler ce forfait avec la prise en charge du coût des titres d'abonnement aux transports collectifs.

Les tickets-restaurant

Les tickets-restaurant voient leurs limites d'exonération sociale et fiscale relevées et leur utilisation assouplie.

Financés conjointement par l'employeur et le salarié, ces titres bénéficient d'un traitement social avantageux puisque la contribution patronale au financement de l'acquisition des titres-restaurant est exonérée d'impôt et de cotisations sociales à condition d'être comprise entre 50 et 60 % de la valeur du titre et de ne pas dépasser le plafond maximal d'exonération de la part patronale.

La loi de finance rectificative a porté ce plafond d'exonération social et fiscal à 5,92 euros au lieu de 5,69 euros.

L'attribution de ces tickets-restaurant, qui demeure une faculté pour l'entreprise, s'est généralisée depuis longtemps mais jusqu'à présent le salarié ne pouvait que régler un repas ou des aliments préparés. La loi de finances rectificative assouplit leur utilisation puisqu'elle permet dorénavant aux salariés d'utiliser ces titres pour régler tout achat de produit alimentaire (directement consommable ou pas). Le plafond journalier d'utilisation des titres est d'ailleurs porté à 25 €.

L'attribution de ces tickets-restaurant peut être réalisée par décision unilatérale ou par accord collectif.

Les indemnités forfaitaires de repas

Les indemnités forfaitaires de repas permettent à l'employeur de rembourser les frais supplémentaires de repas engagés par ses salariés. Ces indemnités sont réputées utilisées conformément à leur objet et exonérées de charges sociales, sans justificatifs, lorsqu'elles ne dépassent pas certaines limites (à la condition que le caractère professionnel du repas soit justifiable).

La loi de finances rectificative prévoit une revalorisation exceptionnelle des limites d'exonération des allocations forfaitaires de repas à compter du 1er septembre 2022, fixées comme suit :

  • salarié en déplacement, contraint de prendre son repas au restaurant : 20,20 € ;
  • salarié en déplacement, qui ne peut justifier de prendre son repas au restaurant : 9,90 € ;
  • salarié contraint de prendre son repas sur son lieu de travail : 7,10 €.

Le rachat des JRTT

Ce dispositif permet au salarié d'obtenir :

  • le versement d'une rémunération supplémentaire assortie d'un régime social avantageux (réduction de cotisations sociales salariales et exonération d'impôt sur le revenu, déduction forfaitaire patronale pour les entreprises de moins de 20 salariés) ;
  • en contrepartie de la renonciation par le salarié à des journées ou demi-journées de repos qu'il a acquises en application d'un accord de réduction du temps de travail antérieur au 20 août 2008 ou d'un dispositif d'aménagement du temps de travail prévu par les article L.3121-41 et suivants du Code du travail (décompte des heures supplémentaires sur une période supérieure à la semaine).

La mise en Suvre effective du dispositif nécessite un accord de l'employeur et du salarié.

En application du dispositif, l'employeur versera une rémunération supplémentaire à des conditions sociales et fiscales d'exception calquées sur celles des heures supplémentaires (réduction des cotisations sociales salariales sous certaines limites et exonération d'impôt sur le revenu dans la limite de 7.500 €). De son côté, le salarié renoncera à ses journées ou demi-journées de repos acquises en application d'un dispositif conventionnel d'aménagement du temps de travail.

Ce système suppose une activité soutenue de l'entreprise et des collaborateurs concernés mais aussi un suivi correctement mené des journées ainsi cédées. Le système adopté est temporaire et vise les journées et demi-journées de repos acquises au titre des périodes postérieures au 1er janvier 2022 et jusqu'au 31 décembre 2025.

Par ailleurs, il peut être utile de conclure un accord, notamment dans le cadre de la NAO, afin de préciser :

  • le nombre de jours maximal pouvant faire l'objet d'un rachat ;
  • le taux de majoration de salaire applicable, qui doit être au moins égal au taux de majoration de la première heure supplémentaire applicable en entreprise ;
  • et, le cas échéant, le formalisme applicable à toute demande du salarié et à la réponse de l'employeur.

Les mesures en faveur de l'épargne salariale

Si elle n'en est déjà dotée, l'entreprise pourrait adopter le dispositif facultatif de l'intéressement qui voit son régime assoupli par la loi « pouvoir d'achat ».

Celle-ci prévoit en effet diverses mesures destinées à faciliter l'extension de l'épargne salariale. C'est principalement le régime de l'intéressement qui se trouve modifié par cette réforme, notamment par un allègement des procédures de contrôle par l'Administration du travail et une durée d'application portée à 5 ans. L'entreprise pourra d'ailleurs recourir au dispositif du supplément d'intéressement pour doper la rémunération de ses collaborateurs.

Le déblocage exceptionnel de la participation et de l'intéressement est mis en Suvre pour permettre de soutenir immédiatement le pouvoir d'achat. Ce déblocage, prévu pour une durée limitée (jusqu'au 31 décembre 2022), est possible sous certaines conditions et pourra atteindre jusqu'à 10.000 € exonérés de charges sociales et fiscales. Il vise les fonds issus de la participation ou de l'intéressement affectés avant le 1er janvier 2022.

Il revient à l'entreprise d'informer ses collaborateurs sur cette possibilité de déblocage avant le 16 octobre 2022.

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