CURATED
3 March 2023

Newsletter Du 6 Au 10 Février 2023 | N° 20

MB
Monfrini Bitton Klein

Contributor

Based in Geneva, but borderless in its reach, Monfrini Bitton Klein is a litigation-only Swiss law firm, internationally recognised for asset recovery, business crime and cross-border litigation. We are representatives for Switzerland of ICC-FraudNet, the leading global network of fraud and asset recovery lawyers.
Le Tribunal fédéral a rappelé que cette obligation procédurale n'était pas une fin en soi, mais devait permettre au Tribunal des mesures de contrainte de procéder à un tri approprié et ciblé.
Switzerland Criminal Law

Quelques propos introductifs

La présente Newsletter de Monfrini Bitton Klein vise à offrir, de manière hebdomadaire, un tour d'horizon de la jurisprudence rendue par le Tribunal fédéral dans les principaux domaines d'activité de l'Etude, soit le droit pénal économique et le recouvrement d'actifs (asset recovery).

Sans prétendre à l'exhaustivité, seront reproduits ci-après les considérants consacrant le raisonnement juridique
principal développé par notre Haute juridiction sur les thématiques suivantes: droit de procédure pénale, droit pénal économique, droit international privé, droit de la poursuite et de la faillite, ainsi que le droit de l'entraide
internationale.

I. PROCÉDURE PÉNALE

TF 1B_563/20221 du 19 janvier 2023 | Mise sous scellés - coopération suffisante de la personne concernée par l'indication des suffixes d'adresses électroniques

  • faisait l'objet d'une procédure pénale en raison de soupçons d'infraction à la LStup. Au cours de cette procédure, son téléphone portable avait été saisi et A. en avait demandé la mise sous scellés. Après une requête du Ministère public de Winterthur/Unterland, le Tribunal des mesures de contrainte avait ordonné la levée des scellés.
    A. a fait recours devant le Tribunal fédéral en faisant valoir que son portable contenait de la correspondance avec son avocat qui ne devait pas être portée à la connaissance des autorités de poursuite pénales.
  • Le Recourant a fait valoir devant l'autorité cantonale que le téléphone portable saisi contenait de la correspondance d'avocat qui avait été échangée avec des adresses électroniques se terminant par «@mffh.ch» et «@fingerhuth.law». L'instance précédente a toutefois estimé que ces informations n'étaient pas suffisantes pour permettre au Recourant de remplir son obligation de motivation des intérêts au maintien du secret invoqué (consid. 3.2).
  • Le Tribunal fédéral a rappelé que cette obligation procédurale n'était pas une fin en soi, mais devait permettre au Tribunal des mesures de contrainte de procéder à un tri approprié et ciblé. Selon la pratique, il suffit à cet effet de connaître le lieu de stockage de la correspondance protégée de l'avocat et le nom de celui-ci. Grâce à ces éléments, il est possible de rechercher au sein de la correspondance de manière plus facile au moyen d'une fonction de recherche, ainsi que de procéder à un tri sans grand effort ou recherches fastidieuses (consid. 3.3.1).
  • Notre Haute Cour a estimé que malgré le fait que le Recourant n'avait pas précisé sur quel support de stockage se trouvaient les correspondances protégées, il était évident, sur la base de ses allégations et des circonstances, qu'il s'agissait du téléphone portable saisi. Le Tribunal fédéral a ici précisé qu'il était possible de renoncer à mentionner l'emplacement exact des données litigieuses que si leur support de stockage était évident, comme c'était le cas in casu. En contrepartie, cela implique que l'instance inférieure n'est pas tenue de rechercher une éventuelle correspondance d'avocat sur d'autres supports (consid. 3.3.2).
  • En outre, l'indication des suffixes des adresses électroniques est suffisante pour permettre à l'autorité de procéder à un tri approprié et ciblé
    (consid. 3.3.2).
  • Le Tribunal fédéral a donc admis le recours, annulé la décision attaquée et renvoyé l'affaire pour nouvelle décision (consid. 4).

TF 6B_1362/20212 du 26 janvier 2023 | Indemnité du défenseur d'office - interdiction de la reformatio in pejus (art. 391 al. 2 1ère phrase CPP)

  • Le Recourant invoquait une violation de l'interdiction de la reformatio in pejus. Il se plaignait à cet égard que l'instance précédente avait réduit de CHF 373,15 l'indemnité qui avait été arrêtée en sa faveur par le Tribunal de police.
  • Le Tribunal fédéral a dès lors analysé la portée de l'interdiction de la reformatio in pejus dans le cadre limité à l'application du CPP en lien avec la fixation de l'indemnité en faveur du défenseur d'office, ce que la jurisprudence n'avait pas encore eu l'occasion de trancher (consid.4).
  • Notre Haute Cour a commencé par rappeler qu'en procédure pénale, le principe de la prohibition de la reformatio in pejus est concrétisé par l'art. 391 al.2 1ère phrase CPP dont le but est de permettre au prévenu d'exercer son droit de recours sans craindre de voir le jugement modifié en sa défaveur. L'interdiction de la reformatio in pejus est également applicable, par le biais de l'art. 391 al. 3 CPP, à la partie plaignante pour ce qui concerne ses prétentions civiles (consid. 4.1.1).
  • La règle de la prohibition de la reformatio in pejus est limitée par la loi, en particulier par l'art. 391 al.1 let. b CPP qui dispose que l'autorité de recours n'est pas liée par les conclusions des parties (sauf lorsqu'elle statue sur une action civile), ainsi que par l'art.391 al. 2 2ème phrase CPP permettant à l'autorité de recours d'infliger une sanction plus sévère en cas de faits nouveaux. Le but poursuivi par le législateur est de permettre à l'autorité de recours de se fonder sur la vérité matérielle et d'appliquer le droit pénal d'office indépendamment des conclusions des parties (consid. 4.1.1).
  • Le Tribunal fédéral a ensuite indiqué que l'art. 391 CPP ne régit pas expressément le cas particulier du recours de l'avocat d'office contre la fixation de son indemnité (consid. 4.1.3).
  • Selon notre Haute Cour, le recours de l'avocat d'office contre la fixation de son indemnité revêt un caractère exclusivement patrimonial. Dans cette configuration, à l'instar de ce qui a été prévu à l'art.391 al. 3 CPP pour la partie plaignante concernant les conclusions civiles, le Tribunal fédéral a conclu qu'il se justifie, au vu de la nature pécuniaire de l'objet du recours, de faire application du principe fondamental de l'interdiction de la reformatio in pejus (consid. 4.1.4).
  • Cette solution se justifie en procédure pénale d'autant plus que le Ministère public est autorisé à contester en appel le montant de l'indemnité d'office et que, ce faisant, il peut obtenir la levée de l'interdiction de la reformatio in pejus afin de permettre à l'autorité de recours de statuer au détriment de l'avocat d'office (consid. 4.1.4).
  • Notre Haute Cour a appuyé sa conclusion en soulignant que cette dernière s'imposait également au regard de la jurisprudence selon laquelle l'interdiction de la reformatio in pejus est violée dans le cas où l'autorité de recours modifie au détriment du prévenu la décision sur l'indemnité relative à ses frais de défense privée. Il n'est en effet pas justifié, sous l'angle de l'interdiction de la reformatio inpejus, de traiter différemment le recours du prévenu sur l'indemnité quant à ses frais de défense privée et celui du défenseur d'office sur son défraiement (consid. 4.1.4).
  • En conséquence, à moins que le Ministère public n'ait pas lui-même interjeté un appel principal sur ce point, l'autorité de recours ne pouvait pas allouer à l'avocat d'office une indemnité inférieure à celle accordée par l'autorité de première instance, sans violer le principe de l'interdiction de la
    rerfomatio in pejus (consid. 4.1.5).
  • In casu, la cour cantonale avait réduit à CHF4'954,75 l'indemnité d'office du Recourant, fixée à CHF 5'327,90 en première instance. Cette réduction d'un montant de CHF 373,15 opérée par l'instance précédente à la suite du recours contre la fixation de l'indemnité d'office constitue une reformatio in pejus. En procédant à cette réduction de l'indemnité d'office en défaveur du Recourant, ce qui n'était justifié ni par la loi, ni par un appel principal formé par le Ministère public, la cour cantonale a donc violé le principe de la prohibition de la reformatio in pejus (consid. 4.2).
  • Partant, le recours a été partiellement admis par le Tribunal fédéral et la cause renvoyée à l'instance inférieure pour nouvelle décision concernant les frais et dépens cantonaux (consid. 5).

TF 1B_418/2022 du 17 janvier 2023 | Qualité de lésé et de partie plaignante - actionnaires d'une société faillie

  • En août 2019, les Recourants - plusieurs actionnaires de la société G. SA (dont un revêtant également la qualité de créancier de la société) - ont déposé plainte pénale contre toutes les personnes impliquées dans la procédure de sursis concordataire engagée par les organes de la société précitée, dont la faillite a été prononcée le 27 juin 2019. Ils ont déclaré vouloir participer à la procédure en qualité de demandeurs au civil et au pénal.
  • Dans ce cadre, ils reprochaient en substance aux organes de G. SA d'avoir, par le biais de l'institution du sursis concordataire, fait croire à une volonté d'assainir la société alors qu'en réalité, cela aurait permis la cession de ses principaux actifs en faveur d'une nouvelle entité - créée peu avant le dépôt de la demande de sursis concordataire et maîtrisée par certains actionnaires principaux de G.SA - à un prix notablement plus bas que celui figurant au bilan. Cette opération leur aurait permis de se libérer de certaines dettes et de ne pas racheter les parts des actionnaires minoritaires (47,17 % du capital).
  • Le 10 septembre 2019, le Ministère public de l'Etat de Fribourg a ouvert une procédure pénale contre inconnu pour le chef d'obtention frauduleuse d'un concordat judiciaire (art. 170 CP), instruction ensuite étendue à d'«év[entuels] crimes ou délits dans la faillite».
  • Entre septembre et décembre 2019, le Ministère public a procédé à des demandes de renseignements, de documents et de compléments.
  • Agissant par le biais d'un mandataire commun, les Recourants ont relancé à plusieurs reprises le Ministère public s'agissant du sort de leur plainte pénale. Ils ont aussi procédé à divers compléments et analyses, notamment sur requête du Ministère public. L'avocat a également invité l'autorité de poursuite pénale à examiner la situation sous l'angle des art. 146 CP («escroquerie au procès») et 158 CP.
  • Par ordonnance du 18 février 2022, le Ministère public a informé les Recourants qu'ils n'étaient pas autorisés à participer à la procédure pénale en tant que parties plaignantes.
  • Se référant aux art. 115 et 118 CPP, les Recourants ont reproché à l'autorité précédente d'avoir confirmé le refus du Ministère public de leur reconnaître la qualité de partie plaignante, cela malgré le dommage direct subi en tant qu'actionnaires et/ou créancier à la suite des faits dénoncés. Invoquant l'interdiction de l'arbitraire, les Recourants ont également prétendu qu'un tel refus équivaudrait à un déni de justice ; vu le défaut d'action de la part de l'administration de la faillite, les Recourants seraient privés de tout moyen d'agir (consid. 3 ss).
  • Le Tribunal fédéral a débuté son analyse en rappelant les principes selon lesquels lorsqu'une infraction est perpétrée au détriment du patrimoine d'une personne morale, seule celle-ci subit un dommage et peut donc prétendre à la qualité de lésé, à l'exclusion des actionnaires d'une société anonyme, des associés d'une société à responsabilité limitée, des ayants droit économiques et des créanciers desdites sociétés. Il n'en va pas différemment si le comportement pénalement répréhensible, en tant qu'infraction contre le patrimoine, réalise aussi -lors d'un examen ex post - les conditions d'une infraction dans la faillite (consid. 3.1).
  • Si la société lésée tombe en faillite ou est liquidée conformément aux dispositions sur la faillite, c'est la masse en faillite qui lui succède
    (cf. art. 121 al. 2 CPP en lien avec l'art.197 LP) (consid. 3.1).
  • En ce qui concerne la qualité de lésé en lien avec une éventuelle infraction dans la faillite, la question doit être examinée séparément de celle relative à une infraction contre le patrimoine : en cas d'infractions dans la faillite, ce n'est plus le patrimoine de la société qui est directement lésé, mais celui des créanciers du failli. Le bien juridiquement protégé par les art. 163 ss CP est le patrimoine des créanciers du failli, lesquels sont donc des personnes lésées au sens de l'art. 115 CP. Tel n'est en revanche pas le cas des actionnaires, à moins qu'ils détiennent simultanément une créance contre la société faillie (consid. 3.1).
  • Les art. 163 à 167 CP ont une portée plus étroite que les autres infractions contre le patrimoine.
    Ils concernent en premier lieu le droit des créanciers de pouvoir, dans la procédure d'exécution forcée, saisir les biens du débiteur en vue de leur désintéressement. Ces dispositions visent ainsi à la protection du droit à l'exécution forcée, auquel elles sont directement rattachées et en fonction duquel elles doivent être comprises. Elles tendent également à protéger les créanciers du débiteur menacé par une faillite ou tombé en faillite. Ces règles apparaissent ainsi comme un complément, sous l'angle pénal, de la LP (consid. 3.1).
  • L'infraction d'obtention frauduleuse d'un concordat au sens de l'art. 170 CP tend avant tout à prévenir les atteintes à l'administration de la justice -soit la bonne exécution de la procédure concordataire - et ne protège donc que de manière indirecte les intérêts des créanciers (consid. 3.1).
  • In casu, le Tribunal fédéral a considéré que la juridiction précédente avait retenu, de manière conforme à la jurisprudence, que le statut d'actionnaires d'une société en cas de faillite ne suffisait pas, y compris dans cette configuration, pour considérer que les Recourants seraient directement lésés par des infractions commises contre le patrimoine de la société (dont l'escroquerie ou la gestion déloyale) ; eu égard à ces infractions contre le patrimoine, il en va d'ailleurs de même des créanciers de la société (consid.3.2).
  • Si les Recourants semblent en substance soutenir avoir été induits en erreur lors de mesures de recapitalisation antérieures à la faillite et/ou afin de renoncer à sa créance pour un des Recourants - ce qu'aurait arbitrairement omis de prendre en compte l'autorité précédente - ils ne développent cependant aucune argumentation circonstanciéeafin d'étayer de telles affirmations. Le Tribunal fédéral a indiqué être lié par les faits retenus dans l'arrêt attaqué à savoir que les Recourants reprochaient aux organes de la société, non pas de les avoir poussés à investir et/ou recapitaliser la société, mais d'avoir induit en erreur les autorités concordataires afin de permettre à une entité tierce de racheter à un prix notablement inférieur à celui figurant au bilan les actifs de la société (consid.3.2).
  • En outre, les Recourants, en tant qu'actionnaires et/ou créanciers, ne pouvaient pas non plus se prévaloir des possibilités d'actions - sociales ou individuelles - reconnues par le droit civil pour étayer leur qualité de partie plaignante afin de participer à la procédure pénale. En effet, la règle de protection du droit de la société anonyme invoquée en l'occurrence - qui prévoit l'obligation d'aviser le juge (civil) en cas de surendettement - n'a pas été édictée dans le seul intérêt des actionnaires ou créanciers, mais aussi dans celui de la société elle-même (consid. 3.2).
  • Sur le plan pénal, il n'y a pas non plus de déni de justice du seul fait que l'administration de la faillite n'agisse pas. Les Recourants ne prétendaient d'ailleurs pas que le refus de leur accorder la qualité de partie plaignante conduirait au classement de la procédure pénale (consid. 3.2).
  • Quant à un des Recourants, il prétend encore détenir la qualité de partie plaignante eu égard aux infractions dans la faillite vu son statut de créancier. Indépendamment de savoir si cette qualité suffit s'agissant de l'art. 170 CP, il est incontesté que celui-ci n'a pas été admis à l'état de collocation ; peu importe d'ailleurs les motifs du refus et/ou les raisons l'ayant amené à renoncer à son action en contestation de l'état de collocation. Faute de participer à la procédure d'exécution forcée proprement dite, ce Recourant ne dispose plus du droit - protégé - àpouvoir être, dans ce cadre particulier, désintéressé sur les biens du débiteur. Il n'apparaît en conséquence pas lésé par d'éventuelles infractions dans la faillite (consid. 3.2).
  • Partant, la décision attaquée ne violait ni le droit fédéral, ni l'interdiction de l'arbitraire, si bien que le recours a été rejeté (consid 4).

TF 1B_614/2022 du 10 janvier 2023 | Revirement de jurisprudence concernant les voies de droit contre une décision de mise en détention (art. 222 CPP)

  • A la suite des débats parlementaires concernant les modifications du CPP qui entreront vraisemblablement en vigueur en 2024, le Tribunal fédéral est revenu sur sa jurisprudence concernant l'art.222CPP. Alors que notre Haute Cour considérait jusqu'alors qu'un recours du Ministère public était possible - malgré la lettre de l'art.222CPP - contre une décision concernant la détention provisoire, les débats parlementaires ont conduit les juges de Mont-Repos à conclure que la volonté du législateur est que seul le prévenu puisse recourir (consid.2.4).
  • Dès lors, depuis la publication de l'arrêt, seul le détenu sera en mesure de recourir contre une telle décision et non plus le Ministère public
    (consid.2.4).

II. DROIT PÉNAL ÉCONOMIQUE

TF 6B_243/2022 du 18 janvier 2023 | Gestion fautive (art. 165 CP) - principe de la lex mitior

  • Cet arrêt traite de l'application du principe de la
    lex mitior au Recourant, condamné pour gestion fautive conformément au nouveau droit relatif à la fixation de la peine alors que l'ancienne teneur des articles pertinents aurait dû primer.
  • Le Tribunal fédéral a commencé par rappeler que le principe de la lex mitior exige une comparaison des lois pénales concurrentes. Selon la jurisprudence, il convient de procéder à un rattachement en cascade lors de la détermination du droit plus clément, le juge devant examiner l'acte concret aussi bien selon l'ancien que le nouveau droit et déterminer, en comparant les résultats, sous laquelle des teneurs l'auteur est le plus favorablement jugé. L'application simultanée de l'ancien et du nouveau droit à une seule et même infraction est exclue. Une fois qu'il est établi que la punissabilité du comportement en question subsiste sous le nouveau droit, il convient de comparer les cadres pénaux légaux ou les sanctions au moyen d'un rattachement en cascade : (1) Les sanctions doivent être comparées (2) A peine égale, la comparaison porte sur la modalité d'exécution de la peine (3) A peine et modalités d'exécution identiques, le quantum de la peine est ensuite mis en comparaison (4) Les éventuelles peines complémentaires sont finalement être prises en compte (consid. 2.5.1).
  • L'infraction de gestion fautive au sens de l'art. 165 ch. 1 CP prévoit comme sanction une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou une peine pécuniaire, tant sous l'empire du droit en vigueur au moment des faits qu'au moment du jugement. Selon l'art. 34 al. 1 aCP, en vigueur jusqu'au 31 décembre 2017, la peine pécuniaire s'élevait, sauf disposition contraire, à 360 jours-amende au maximum. Le nouvel art. 34 CP, selon lequel la peine pécuniaire est de trois jours-amende au moins et de 180 jours-amende au plus, durcit le système des sanctions dans la mesure où il restreint le champ d'application de la peine pécuniaire et étend en conséquence celui de la peine privative de liberté (consid. 2.5.2).
  • In casu, le nouveau droit n'est pas plus clément sur le plan de la peine principale, de sorte que l'ancien droit est en principe applicable (consid. 2.5.2).
  • Contrairement à l'interdiction d'exercer une profession prévue par l'ancien droit, l'interdiction d'exercer une activité au sens de l'art. 67CP à teneur du nouveau droit est étendue aux activités extra-professionnelles, de sorte que les infractions commises pendant les loisirs entrent également en ligne de compte. En outre, contrairement à l'ancienne législation sur l'interdiction d'exercer une profession, l'art. 67d al. 1 CP prévoit expressément l'extension ultérieure d'une interdiction par l'autorité d'exécution. Partant, l'interdiction d'exercer une activité au sens de l'art. 67 al. 1 CP n'est pas plus légère que l'interdiction d'exercer une profession au sens de l'ancien art. 67 al. 1 aCP
    (consid.2.5.3).
  • Au vu de ce qui précède, notre Haute Cour a donc conclu que le nouveau droit ne s'avérait pas plus clément pour le Recourant, ni en ce qui concerne la fixation de la peine, ni en ce qui concerne le prononcé de l'interdiction d'exercer une activité qualifiée d'«autre mesure», tout comme son exécution. Par conséquent, c'était l'ancien droit, en vigueur au moment des faits, qui devait s'appliquer. Alors que l'instance inférieure partait à juste titre de l'applicabilité de l'ancien droit en ce qui concerne la fixation de la peine, elle avait appliqué à tort le droit en vigueur au moment du jugement en ce qui concerne l'«autre mesure» [à savoir l'interdiction d'exercer une profession] et a ainsi violé le droit fédéral (art. 2 CP) (consid. 2.5.4).
  • Toutefois, le Tribunal fédéral a déclaré que cela ne conduisait pas nécessairement à l'admission du recours, car il convenait plutôt d'examiner si les conditions pour ordonner une interdiction d'exercer selon l'ancien droit conformément à l'art. 67 al. 1 aCP étaient remplies (consid. 2.5.4).
  • Le Tribunal fédéral a entièrement fait sien le raisonnement de l'instance précédente concernant l'interdiction d'exercer une activité qui retenait en résumé que le Recourant avait déjà violé de manière grave ses obligations en tant qu'organe dans deux sociétés différentes et causé des dommages de plusieurs millions auxdites sociétés, de sorte que le risque de nouvelles violations de ses obligations était considérable. En outre, le Recourant était toujours administrateur de sociétés pour lesquelles il existait au moins la possibilité que des conflits d'intérêts surviennent à nouveau et qu'il prenne à nouveau une décision contraire aux intérêts de la société ou des créanciers. Malgré le laps de temps écoulé depuis les faits antérieurs, il existait toujours un risque important que le Recourant commette une nouvelle fois des violations pénalement répréhensibles de ses obligations en tant qu'organe de sociétés. L'interdiction d'exercer à l'avenir des activités d'organe de sociétés ne restreignait que faiblement la liberté économique du Recourant, âgé de 76 ans et déjà à la retraite. En outre, le Recourant était libre de continuer à conseiller et à accompagner d'autres personnes ou de travailler pour une société en tant qu'employé. La balance penchait donc clairement en faveur de la prévention des risques, raison pour laquelle une interdiction d'exercer devait être prononcée (consid. 4.3).
  • Compte tenu de toutes les circonstances pertinentes, le Tribunal fédéral a déclaré que l'arrêt entrepris devait être corrigé au motif que ce n'était pas une interdiction d'exercer une activité au sens de la nouvelle teneur de l'art. 67 al. 1 CP qui aurait dû être prononcée, mais une interdiction d'exercer une profession conformément à l'ancien droit au sens de l'art. 67 al. 1 aCP (consid. 4.3).
  • Partant, le Tribunal fédéral a partiellement admis le recourssur ce seul point (consid. 5).


III. DROIT INTERNATIONAL PRIVÉ

-

IV. DROIT DE LA POURSUITE ET DE LA FAILLITE

TF 5A_433/20223 du 24 novembre 2022 | Frais mis à la charge du débiteur par une décision de mainlevée définitive - perte de cette créance par le créancier en cas de non-continuation de la poursuite

  • La question posée par cet arrêt est de savoir si le créancier qui a laissé se périmer une poursuite au cours de laquelle il a obtenu une décision de mainlevée définitive de l'opposition mettant à la charge du débiteur des frais judiciaires et des dépens peut introduire une nouvelle poursuite pour recouvrer ces montants en produisant cette décision judiciaire comme titre de mainlevée.
  • Pour rappel, les frais de la poursuite sont à la charge du débiteur, mais il appartient au créancier d'en faire l'avance (art. 68 al. 1 LP). L'art. 68 al.2LP prévoit en outre que le créancier a le droit de prélever les frais de poursuite sur les paiements du débiteur. Cela signifie que ces frais sont ajoutés à la dette et que le débiteur doit les payer en plus du montant accordé au créancier, sans que celui-ci ait à le requérir. En règle générale, tous les frais de poursuite doivent être considérés comme occasionnés par le débiteur, et donc supportés par lui, ce qui inclut tous les frais engendrés pour la mise en ouvre efficace de la poursuite. En revanche, les frais que le créancier aurait pu et dû éviter ne doivent pas être imputés au débiteur. Ainsi, si le créancier retire une poursuite ou laisse celle-ci s'éteindre sans que le débiteur ait fourni de prestation, le transfert au débiteur des frais des actes de poursuite accomplis n'intervient pas (consid. 4.1 et 4.1.2).
  • Le Tribunal fédéral s'est penché sur d'anciens arrêts publiés (ATF 31 III 265 et ATF 47 III 120). Sur cette base, notre Haute Cour a conclu que la décision de mainlevée qui octroie des frais et dépens au créancier peut constituer un titre de mainlevée définitive pour ces créances contre le débiteur. Le créancier peut donc intenter une poursuite pour obtenir le paiement des seuls frais de poursuite. D'ailleurs, la décision de mainlevée constitue aussi un titre pour les dépens du débiteur lorsque celui-ci obtient gain de cause dans la procédure de mainlevée et que son opposition est maintenue (consid. 4.3.3).
  • Néanmoins, si le créancier obtient la mainlevée de l'opposition, mais ne continue pas la poursuite, il faut alors admettre que les frais de poursuite, y compris les frais et dépens, sont des frais inutilement engagés que le créancier ne peut pas faire supporter au débiteur. En effet, la décision qui accorde ou refuse la mainlevée est une pure décision d'exécution forcée dont le seul objet est de déterminer si la poursuite peut continuer ou si le créancier est renvoyé à agir par la voie d'un procès ordinaire. La mainlevée n'a donc pas d'autre but que la continuation de la poursuite (consid. 4.3.3).
  • Dans une telle situation, soit lorsque le créancier renonce de lui-même à continuer une poursuite, comme c'est le cas en l'espèce, il faut retenir que le débiteur dispose d'une exception, à savoir l'extinction de la dette (art. 81 al. 1 et 82 al. 2 LP)
    (consid. 4.3.3).
  • In casu, l'Intimée avait obtenu la mainlevée définitive mettant les frais à la charge du Recourant. Toutefois, elle avait laissé se périmer la poursuite, pour ensuite notifier un nouveau commandement de payer ayant pour objet les frais traités par la décision de mainlevée. Au cours de cette seconde poursuite, l'autorité cantonale avait prononcé la mainlevée définitive en se fondant sur la première décision de mainlevée, à tort (consid. 4.4).
  • En conclusion, le Tribunal fédéral a admis le recours, estimant que la créance en paiement des frais de poursuite de l'Intimée s'était éteinte (art. 81 LP) (consid. 5).


V. ENTRAIDE INTERNATIONALE

-

Footnotes

1. Destiné à publication

2. Destiné à publication

3. Destiné à publication

The content of this article is intended to provide a general guide to the subject matter. Specialist advice should be sought about your specific circumstances.

Mondaq uses cookies on this website. By using our website you agree to our use of cookies as set out in our Privacy Policy.

Learn More