Certaines exigences de santé publique en Ontario imposent le port du masque dans plusieurs lieux publics et milieux de travail afin de réduire les risques de transmission de la COVID‑19. Ces restrictions donnent parfois lieu à des situations où des personnes ne peuvent pas, ou ne veulent pas, se conformer aux règles. Dans ces cas, les employeurs doivent déterminer s'ils sont tenus d'accommoder ces personnes et dans quelle mesure. Une décision récente rendue par le Tribunal des droits de la personne de l'Ontario, Sharma v. Toronto (City) (disponible en anglais seulement), confirme qu'il est seulement nécessaire prévoir des accommodements lorsqu'il s'agit de refus fondés sur des motifs protégés en vertu du Code des droits de la personne de l'Ontario (le « Code »), mais pas dans le cas de refus fondés sur des objections personnelles.

Les faits

Le plaignant a déposé une requête pour violation des droits de la personne contre la Ville de Toronto pour avoir adopté un règlement (disponible en anglais seulement) qui exige à toutes les entreprises accessibles au public, et à d'autres établissements d'autoriser l'accès uniquement aux membres du public portant un masque ou un couvre-visage (tous deux désignés par « masques » dans le cadre de ce bulletin). Selon le plaignant, la Ville a fait preuve de discrimination à son égard, car de nombreuses entreprises lui ont refusé leurs services à cause de ce règlement. La prémisse de cette plainte était qu'il ne pouvait pas porter de masque en raison de deux motifs protégés en vertu du Code, c'est-à-dire, la croyance et un handicap :

  1. ses croyances exigeaient qu'il ne « suive pas aveuglément » les lois du gouvernement, comme le règlement dans le présent cas, puisque c'était son « devoir de citoyen d'être critique à l'égard du gouvernement et de ses décisions », et, selon lui, le règlement n'est pas justifié;
  2. le port du masque l'empêcherait de respirer, et il était d'avis que le fardeau d'expliquer aux entreprises ou aux autres établissements le besoin d'être accommodé ne devrait pas incomber aux personnes handicapées.

La décision

Dans le cadre d'une audience sommaire, le tribunal a rejeté la requête sur la base qu'il n'y avait aucune chance de succès raisonnable même si toutes les allégations étaient acceptées et considérées comme étant véridiques. Quant aux croyances, le tribunal a fait remarquer qu'on entend généralement de « croyances ou pratiques religieuses profondes » celles d'une personne. Toutefois, ceci ne réfère pas aux « simples opinions politiques » qui ne font pas partie « d'un système de croyances cohérent et identifiable ». Puisque l'objection du plaignant était basée sur son désaccord avec la qualité de la justification pour le règlement plutôt que sur une croyance protégée par le Code, sa requête a été rejetée sur ce motif.

En ce qui concerne le handicap, le tribunal a conclu que les problèmes de santé décrits par le plaignant tombaient sous la définition de handicap telle qu'elle est généralement comprise en vertu du Code, mais qu'en fin de compte, sa requête a échoué sur ce motif puisqu'elle aurait dû être déposée contre les entreprises qui lui auraient présumément refusé ses services. Le tribunal a également clarifié que, bien qu'une personne ne soit généralement pas tenue de divulguer un problème de santé en particulier, à moins que cela ne soit nécessaire pour déterminer quels sont ses besoins en matière d'accommodements, le processus d'accommodement est une « responsabilité partagée » qui exige qu'une personne divulgue qu'elle a des besoins liés à un handicap.

Dans le présent cas, le règlement prévoit des exemptions pour les personnes qui ont un problème médical qui les empêche de porter un masque ou qui ne peuvent le faire pour un autre motif protégé par le Code. De tels motifs justifient le besoin d'accommodements et interdit expressément aux entreprises d'exiger aux membres du public de fournir des preuves concernant ces exemptions. Dans ce contexte, selon le tribunal, une personne serait uniquement tenue de préciser qu'elle est visée par une exemption afin de déclencher l'obligation d'adaptation. Cependant, les prétentions du demandeur à l'égard de ces entreprises ne pouvaient être déposées contre la Ville, puisque le règlement en soi est conforme au Code et que la Ville n'était pas responsable de la conduite d'autrui.

Points à retenir pour les employeurs

Cette décision rappelle que les employeurs doivent évaluer au cas par cas les refus de se conformer à l'obligation de porter un masque pour déterminer s'il y a présence d'un motif protégé par le Code, comme un handicap ou des croyances. Lorsqu'un employé ou un client considère qu'un motif protégé par le Code l'empêche de porter un masque, le devoir d'adaptation est déclenché et l'employeur doit raisonnablement accommoder cette personne jusqu'au point de contrainte excessive (ce qui comprend une évaluation de l'incidence sur la santé et la sécurité, et d'autres facteurs). Sous réserve de toutes restrictions quant à la demande de renseignements médicaux (par exemple, celles prévues au règlement pour les entreprises de Toronto ou d'autres règlementations similaires), les employeurs ont généralement le droit de demander suffisamment de renseignements pour leur permettre de déterminer les besoins d'une personne conformément au Code, et quel type d'accommodement est approprié dans les circonstances.

Tout accommodement devrait être conforme aux exigences de la santé publique pour la sécurité au travail, ainsi qu'au devoir de l'employeur, en vertu de la législation sur la santé et la sécurité au travail, de prendre toutes les précautions raisonnables dans les circonstances pour assurer la protection du travailleur. Compte tenu des risques de transmission de la COVID-19 reconnus par les autorités de santé publique, les employeurs devront réfléchir à la façon dont les conditions de travail devront être adaptées pour que les employés bénéficient d'une protection adéquate lorsqu'ils interagissent avec des personnes qui ne portent pas de masque.

Cette décision affirme également qu'une personne doit divulguer plus qu'une simple opinion pour avoir le droit à un accommodement. Le devoir d'accommodement n'est pas déclenché par une objection personnelle découlant d'un désaccord politique, philosophique ou concernant le mode de vie, qui n'est pas liée à un système de croyances cohérent et identifiable pouvant être considéré comme une croyance en vertu du Code.

Les employeurs doivent s'assurer de se conformer à toutes les règles de santé publique en plus d'avoir des procédures qui leur permettent de faire face à des situations dans lesquelles une personne ne se conforme pas aux exigences du port du masque. 

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