Solution. - Après avoir posé en principe que, dans leurs rapports directs, l'action en garantie des vices cachés n'est pas ouverte au maître de l'ouvrage contre l'entrepreneur, l'arrêt confirme que le délai dont dispose l'entrepreneur pour former un recours en garantie contre le fabricant en application de l'article 1648 du Code civil court à compter de la date de l'assignation délivrée contre lui.

Impact. - En n'enfermant pas le délai de 2 ans de ce texte dans le délai de prescription extinctive de droit commun de 5 ans de l'article L. 110-4 du Code de commerce, dont elle estimait jusqu'alors qu'il devait courir à compter de la vente, la chambre commerciale de la Cour de cassation laisse espérer l'abandon de sa jurisprudence controversée sur l'encadrement dans le temps de l'action en garantie des vices cachés.

Cass. com., 29 juin 2022, n° 19-20.647, F-B : JurisData n° 2022-011364 (non reproduit)

En 2009, la société GDF Suez, devenue la société Engie (le maître de l'ouvrage), a confié la réalisation d'une centrale de production d'électricité à la société SMAC (l'entrepreneur) qui, pour l'exécution de sa prestation, a acquis des panneaux photovoltaïques auprès de la société Tenesol (le vendeur), laquelle, pour les construire, a assemblé des connecteurs fabriqués par la société TEC (le fabricant). Invoquant des interruptions de la production d'électricité dues à des défaillances des connecteurs, le maître de l'ouvrage a assigné les différents intervenants en réparation de ses préjudices matériel et immatériel en puisant, sur des fondements juridiques divers, dans plusieurs régimes de responsabilité civile.

Après avoir logiquement mis hors de cause le vendeur assigné sur le fondement du régime de la responsabilité du fait des produits défectueux des articles 1386-1 et suivants, devenus 1245 et suivants, du Code civil, dont on sait bien qu'il interdit d'engager la responsabilité du fournisseur non-fabricant autrement que subsidiairement dans les cas dans lesquels l'identité du producteur demeurerait inconnue (C. civ., anc. art. 1386-7, devenu C.civ., art. 1245-6), les premiers juges ont rejeté la demande formée, sur ce même fondement, contre le fabricant, producteur des connecteurs défectueux, pour ce qui concerne la réparation du préjudice consistant dans le remplacement de ceux-ci. La solution, justifiée par le fait que la condition d'extériorité de la réparation du dommage matériel n'était manifestement pas remplie, paraît difficilement contestable, seuls constituant des préjudices réparables ceux qui résultent, suivant l'article 1386-2, devenu 1245-1, d'une atteinte « à un bien autre que le produit défectueux lui-même ». De façon plus surprenante, ils ont en revanche décidé qu'il devait réparer le préjudice immatériel consistant dans la perte d'exploitation soufferte par le maître de l'ouvrage. Pourtant, s'il est vrai que la jurisprudence entend largement la notion de dommages aux biens, dont elle estime qu'elle englobe les conséquences économiques préjudiciables du défaut (Cass. 1re civ., 1er juill. 2015, n° 14-18.391 : JurisData n° 2015-016121 ; Bull. civ. I, n° 70 ; Resp. civ. et assur. 2015, comm. 295 ; RTD civ. 2015, p. 892, obs. P. Jourdain ; RDC 2015, p. 852, note J.-S. Borghetti), cette conception extensive ne devrait pouvoir se concevoir qu'à la condition que le préjudice économique soit consécutif à une atteinte à un bien par hypothèse distinct du produit défectueux luimême, ce qui n'était pas le cas en l'espèce.

Quoi qu'on puisse en penser, le débat n'a dès lors plus porté que sur la réparation du préjudice non indemnisable au titre de la responsabilité du fait des produits défectueux. La cour d'appel, ayant écarté la garantie décennale des constructeurs de l'article 1792 du Code civil, dont elle a estimé que les conditions n'étaient pas satisfaites, et décidé que la garantie biennale de bon fonctionnement de l'article 1792-3, applicable aux panneaux photovoltaïques dissociables de l'ouvrage mais que le maître n'avait pas invoquée, était exclusive de la responsabilité contractuelle de droit commun (V. déjà, en ce sens : Cass. 3e civ., 11 mars 1992, n° 90-15.633 : Bull. civ. III, n° 78 ; JurisData n° 1992-000338 ; RD imm. 1992, p. 218, note Ph. Malinvaud. - Et plus généralement, sur l'application exclusive des garanties légales: Cass. 3e civ., 12 nov. 2020, n° 19-22.376 : JurisData n° 2020-018320 ; Constr.-Urb. 2021, comm. 9, M.-L. Pagès-de Varenne ; JCP N 2021, n° 17, 1174, S. Bertolaso. - Cass. 3e civ., 8 juill. 2021, n° 19-15.165 : Resp. civ. et assur. 2021, comm. 197), a curieusement estimé que l'entrepreneur était tenu, dans ses rapports avec le maître de l'ouvrage, à la garantie des vices cachés des articles 1641 et suivants du Code civil. Elle a, dans le même temps, jugé que l'appel en garantie formé par l'entrepreneur à l'encontre du fabricant était prescrit au motif que plus de 2 ans s'étaient écoulés entre la découverte du vice et l'assignation introductive d'instance

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