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19 November 2025

PGC : Sécuriser la négociation commerciale entre acheteurs et fournisseurs

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Bignon Lebray

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Sécuriser la négociation commerciale passe inéluctablement par un retour aux fondamentaux : travailler les contreparties, définir des services clairs et en donner les clés d'exécution.
France Corporate/Commercial Law
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La sécurisation juridique des négociations notamment dans le cadre de la grande distribution repose d'abord sur un principe simple : garantir un équilibre réel entre les parties, fondé sur des contreparties clairement définies. « Cet équilibre fondé sur le « bon sens » s'est trouvé dilué par la complexité de textes et l'importance du formalisme », introduit Caroline Cazaux, avocate associée au cabinet Bignon Lebray. Pour le rétablir, il est essentiel de revenir aux fondamentaux de la négociation achats, avec entre autres le fait de définir précisément services et contreparties, formaliser les échanges, et coconstruire avec la direction juridique un cadre clair, simple et exécutable.

Principe cardinal, la contrepartie participe à la sécurisation

Le cSur de la sécurisation juridique tient au principe de contrepartie. « Par exemple, pour les PGC, le retour du « ligne à ligne » exige que la convention exprime chacune des obligations réciproques des parties et leur prix unitaire. Plus généralement, l'importance des contreparties va être clé puisque notamment sur, le fait qu'il n'y ait pas de contrepartie est susceptible d'être sanctionné en tant que tel. » L'article L442-1 du Code de commerce sanctionne ainsi le fait d'obtenir ou de tenter d'obtenir « un avantage quelconque qui ne correspond à aucune contrepartie ou qui est manifestement disproportionné au regard de la valeur de la contrepartie ». Ce rappel, trivial en apparence, demeure une ligne de crête qu'il importe de proportionner et documenter.

La sécurisation passe par une définition précise des engagements. Côté obligations, les contreparties peuvent être liées à des volumes d'achat, au référencement d'une innovation ou encore à la profondeur de gamme. Côté services – coopération commerciale ou services distincts – il s'agit de cadrer : « Qui fait quoi, et sous quel délai ? Selon quelle modalité, pour quel prix ? Et surtout comment puis-je avoir un contrôle sur l'exécution, une preuve de l'exécution. C'est ça la contrepartie d'un service », résume Caroline Cazaux.

Ce standard de description (rôles, calendrier, modalités, prix, contrôle et preuve) doit figurer dans les documents contractuels et être vérifiable. Il offre à l'acheteur comme au fournisseur une boussole commune. Dit autrement, ce qui n'est ni décrit ni prouvable devient contestable.

La mise en concurrence, outil de gestion du risque

Au-delà du face-à-face CGV/réponses, Me Cazaux souligne l'importance d'appels à compétition privés : « Certaines entreprises décident d'organiser leur processus d'achat par des appels à compétition, équivalent des appels d'offres en droit public. » Dans ce schéma, l'acheteur définit son besoin via un cahier des charges et structure la comparaison.

L'avantage ne se limite pas à l'efficacité économique. Il touche la gestion du risque fournisseur et le régime de la rupture brutale des relations commerciales établies. Ces relations, replacées dans un cycle de remises en compétition, « ne sont pas généralement perçues comme des relations commerciales établies parce qu'elles sont précaires. A chaque nouvelle mise en compétition il y a une incertitude sur la prolongation de la relation ». En jurisprudence jusqu'à présent, ces relations précaires échappent à l'obligation d'un long préavis, le plafond actuel étant rappelé comme 18 mois.

Comment revenir à l'essentiel dans un corpus complexe

Pourquoi le « bon sens » se perd-il ? Me Caroline Cazaux pointe l'empilement législatif et réglementaire, applicable à tous les secteurs et non aux seuls GSA, qui multiplie les cas de figure. « Les réformes successives, avec entre autres EGalim, extrêmement encadrante, se sont multipliées, estime l'avocate. Cet empilement rend la mise à jour difficile, notamment pour les ETI et PME sans direction juridique interne. Il importe de savoir dans quel corpus de contractualisation s'inscrit la négociation ».

Pour l'acheteur, cela implique un travail de remise à plat et réexaminer la pertinence des clauses conservées éventuellement depuis plusieurs années.

2026 : respecter le calendrier et formaliser les échanges

Les fournisseurs de PGC et de produits alimentaires doivent communiquer aux distributeurs au plus tard le 1er décembre leurs conditions générales de vente, pour les autres la règle est celle d'un délai raisonnable avant la date butoir, et la convention commerciale doit être conclue au plus tard le 1er mars 2026.

Point clé à ne pas omettre, les observations écrites du distributeur sur les CGV. Pour les produits visés par EGalim, le distributeur dispose d'un mois à compter de la réception des CGV pour notifier par écrit les clauses refusées et leurs motifs, ainsi que celles qu'il souhaite soumettre à la négociation. Pour les PGC, le distributeur dispose d'un délai raisonnable. Me Cazaux insiste : « Et c'est obligatoire de le faire par écrit. Cela formalise les échanges entre les parties et permet de poser les jalons de la négociation ».

Sécuriser et négocier ne se limitent pas à la seule signature. « Il vaut mieux avoir une convention lisible conclue à date que les parties maîtrisent complètement, plutôt qu'une bible juridique trop complexe qui va freiner l'exécution », explique Me Cazaux. Le rappel vaut aussi pour la convention logistique (articles L441-7 et L441-8) qui n'est pas soumise à la date butoir du 1er mars. Ici encore, la priorité est la maîtrise de l'exécution : des documents courts, clairs, opérationnels, qui guident l'exécution et la preuve.

Travailler de concert avec la direction juridique

La sécurisation est un sport d'équipe. Il faut anticiper la remontée d'informations opérationnelles. Me Cazaux recommande un bilan en amont avec la direction juridique et d'analyser les sujets de réussite ou les sujets sensibles de l'année précédente pour en tirer des évolutions contractuelles.

Cette démarche permet la coconstruction : « c'est l'échange de ces deux visions de la négociation commerciale qui vont permettre de coconstruire des éléments qui vont être satisfaisants pour les deux directions dans l'intérêt de l'entreprise », poursuit Caroline Cazaux. Autrement dit, l'acheteur apporte les faits et les usages, le juriste sécurise la forme et la preuve.

Pour aller plus loin : La négociation, les bonnes pratiques opérationnelles

  1. Arrimer chaque avantage à sa contrepartie. Qualifier l'objet (volume, référencement, profondeur de gamme), fixer un prix ou une équivalence, et prévoir les moyens de contrôle et de preuve.
  2. Décrire les services. Pour toute coopération commerciale ou service distinct : qui fait quoi, quand, comment, pour quel prix, avec indicateurs d'exécution, livrables, et dispositifs de vérification.
  3. Mettre en concurrence lorsque cela est pertinent. Structurer un appel à compétition avec cahier des charges. Cela procure une transparence de la sélection, une sécurisation de l'approvisionnement et une maîtrise du risque de rupture dans des relations non établies.
  4. Respecter le calendrier et formaliser. Conserver les traces écrites et veiller à la lisibilité.
  5. Privilégier l'exécutable au verbeux. Une convention claire vaut mieux qu'un document touffu. L'objectif est l'exécution sans ambiguïté, avec des clauses activables.
  6. Revoir, simplifier, clarifier. Une remise à plat continue doit être réalisée : retirer le superflu, harmoniser, et revenir à des dispositifs simples et clairs.
  7. Institutionnaliser le bilan achats-juridique. Un rendez-vous annuel d'anticipation pour ajuster gabarits, clauses et modes opératoires à partir des retours du terrain.

Originally published by Décision Achats

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