Dans sa récente décision, Canada c. Csak1 (« Csak »), la Cour d'appel fédérale (la « CAF ») a réexaminé le rôle et les conséquences du dépôt d'une renonciation concernant la période normale de nouvelle cotisation2. Elle a confirmé qu'une renonciation constitue une entente entre le contribuable et le ministre, et non une concession unilatérale de la part du contribuable. En prolongeant la période de prescription au cours de laquelle le ministre peut procéder à une nouvelle cotisation, les contribuables peuvent à leur tour bénéficier d'avantages importants, notamment en réduisant la portée d'une éventuelle nouvelle cotisation. Compte tenu de l'objectif d'une renonciation, la CAF a estimé que lorsqu'un délai de prescription expire un dimanche, une renonciation demeure valable si elle est présentée le lundi suivant.
Contexte
Dans l'affaire Csak, le contribuable faisait
valoir qu'une nouvelle cotisation établie par
l'ARC n'était pas valide parce que la
renonciation s'y rapportant avait été
présentée un jour trop tard
(c.-à-d. que la période normale de nouvelle
cotisation avait expiré le dimanche 30 mai 1991,
alors que la renonciation avait été reçue par
l'ARC le lundi 31 mai).
L'affaire portait sur l'interprétation de l'art. 26 de la Loi d'interprétation, qui prévoit que « [t]out acte ou formalité peut être accompli le premier jour ouvrable suivant lorsque le délai fixé pour son accomplissement expire un jour férié »3.
La Cour canadienne de l'impôt a estimé que la renonciation n'était pas valide et que l'année d'imposition s'y rapportant était frappée de prescription. La prolongation du délai de prescription serait contraire à la nature réparatrice de l'art. 26. Selon la Cour de l'impôt, cette règle offre des avantages qui ne profiteraient qu'au ministre, une renonciation ne préservant aucun droit que le contribuable pourrait avoir4.
La décision de la CAF
La CAF n'a pas été du même avis. S'exprimant au nom d'une cour unanime, le juge Biringer a souligné les nombreux bénéfices que les contribuables peuvent éventuellement tirer des renonciations. Notamment, une renonciation permet d'éviter une nouvelle cotisation hâtive, ce qui donne au contribuable plus de temps pour présenter des observations en faveur d'un résultat plus favorable5. Une nouvelle cotisation prématurée est également susceptible d'avoir une portée beaucoup plus large. Cela peut s'avérer très préjudiciable pour le contribuable, étant donné que c'est à lui seul qu'il incombe de réfuter les faits sur lesquels se fonde la nouvelle cotisation6.
En outre, une cotisation émise en vertu d'une renonciation est limitée aux questions qui y sont décrites. En tant que telle, une renonciation est un outil permettant de limiter le pouvoir étendu du ministre d'avancer un autre fondement ou argument à l'appui de tout ou partie du solde d'une cotisation à un stade ultérieur de la procédure7.
S'appuyant sur ces principes, la CAF a finalement conclu qu'en vertu d'une interprétation textuelle, contextuelle et téléologique de l'art. 26, la renonciation était valide. Il serait conceptuellement illogique d'affirmer le contraire, étant donné que l'art. 26 aurait clairement permis au ministre de procéder à une nouvelle cotisation le lundi suivant l'expiration de la période de prescription s'il avait cherché à le faire8.
Points à retenir
Même si le fait de renoncer au bénéfice de la période de prescription peut sembler contraire aux intérêts du contribuable, la décision Csak rappelle utilement qu'une renonciation est une entente qui peut en réalité jouer en faveur du contribuable. Par exemple, en l'absence d'une renonciation, l'ARC ne peut pas établir de nouvelle cotisation au-delà de la période de prescription, même si c'est ce que souhaite le contribuable. De même, une nouvelle cotisation émise en l'absence d'une renonciation à l'issue d'une vérification peut en fin de compte être étayée par un nouveau fondement dont le ministre n'avait à l'origine pas connaissance et qui est mis en lumière au fur et à mesure du déroulement du contentieux fiscal.
Footnotes
1. 2025 CAF 60.
2. Sous-al. 152(4)a)(ii) de la Loi de l'impôt sur le revenu, L.R.C., 1985, c. 1 (5e suppl.) (la « LIR »).
3. Loi d'interprétation, L.R.C., 1985, c. I-21; le dimanche est un jour férié en vertu du par. 35(1) de la Loi d'interprétation.
4. Décision de la Cour canadienne de l'impôt (2024 TCC 9), par. 152 à 159.
5. Csak, par. 38; citant Bailey v. The Minister of National Revenue, [1989] 2 CTC 2177, p. 2181 et 2182.
6. Ibid., citant CAL Investments Ltd. c. Canada (T.D.), [1991] 1 C.F. 199, p. 213 et 214.
7. En l'absence d'une renonciation, le ministre peut invoquer, sujet à des restrictions qui ne sont que très limitées, un nouveau fondement ou un nouvel argument à quelque moment que ce soit au cours du litige, conformément au par. 152(9) de la LIR.
8. Csak, par. 48.
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