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2 April 2025

Perspectives des cryptoactifs au Canada : Progrès ou immobilisme?

MT
McCarthy Tétrault LLP

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McCarthy Tétrault LLP provides a broad range of legal services, advising on large and complex assignments for Canadian and international interests. The firm has substantial presence in Canada’s major commercial centres and in New York City, US and London, UK.
2024 a été une année terne pour les cryptoactifs au Canada. Alors que le prix de la cryptomonnaie (aussi appelée bitcoin dans le présent texte) et d'autres cryptoactifs a grimpé en flèche...
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2024 a été une année terne pour les cryptoactifs au Canada. Alors que le prix de la cryptomonnaie (aussi appelée bitcoin dans le présent texte) et d'autres cryptoactifs a grimpé en flèche dans un contexte de clarification de la réglementation émergente aux États-Unis et en Europe, le régime de réglementation du Canada — qui avait pourtant été le premier au monde en 2021 — a imposé des restrictions supplémentaires sur les produits, élevé des obstacles à l'entrée et n'a pas approuvé de nouveaux produits de cryptoactifs. Cela étant dit, nous sommes optimistes et pensons que la solide réglementation de base du Canada peut soutenir une année 2025 marquée par l'innovation, au cours de laquelle la collaboration entre le secteur et les organismes de réglementation permettra au Canada de retrouver sa position de chef de file dans le domaine des cryptoactifs.

Progrès des cryptoactifs dans le monde

Pour replacer notre analyse canadienne dans son contexte, nous présentons ci-après quelques-unes des principales étapes franchies par le secteur des cryptoactifs à l'échelle mondiale en 2024 :

  • 10 janvier 2024 : La Securities and Exchange Commission (la « SEC») des États-Unis approuve les Fonds négociés en bourse de cryptomonnaies (Bitcoin ETF, un « FNB »), lesquels terminent l'année avec un total d'actifs sous gestion de plus de 120 milliards $ US1.
  • 22 mai 2024 : La Chambre des représentants des États-Unis approuve le Financial Innovations and Technology for the 21st Century Act (la « FIT21») grâce à un large soutien bipartisan, qui confère « [traduction] des mécanismes de protection robustes et éprouvés pour les consommateurs et la certitude réglementaire nécessaire pour permettre à l'innovation en matière d'actifs numériques de prospérer »2.
  • 30 juin 2024 : Les titres III et IV du Règlement européen sur les cryptoactifs (le « MiCA») entrent en vigueur; il s'agit d'une réglementation complète régissant les jetons se référant à un ou des actifs et les jetons de monnaie électronique, y compris les obligations en matière de divulgation et de réserves3.
  • 5 décembre 2024 : Le cours du bitcoin BTC franchit pour la première fois les 100 000 dollars $ US.
  • 31 décembre 2024 : Le reste du MiCA entre en vigueur, prévoyant des obligations d'enregistrement uniformes pour les prestataires de services sur cryptoactifs (PSAN) qui peuvent « bénéficier du passeport européen et fournir leurs services » dans l'ensemble de l'UE4.
  • 21 janvier 2025 : La SEC forme un nouveau groupe de travail sur la réforme de la politique en matière de cryptoactifs pour « [traduction] tracer des lignes claires en matière de réglementation, concevoir des solutions réalistes concernant l'inscription, élaborer des cadres de divulgation raisonnables et déployer de manière judicieuse des ressources en matière d'application de la loi »5.
  • 23 janvier 2025 : Le Sénat américain crée une sous-commission bancaire sur les actifs numériques, chargée d'adopter « [traduction] une législation bipartisane sur les actifs numériques qui stimule l'innovation responsable et protège les consommateurs », et de superviser « [traduction] les organismes de réglementation financiers fédéraux pour s'assurer que ces organismes respectent la loi »6.

Parmi les autres développements majeurs figurent un recours accru au paiement au moyen de cryptomonnaies stables à garantie fiduciaire, qui ont atteint une capitalisation boursière mondiale de plus de 200 milliards $ US7, et des progrès concrets en matière de titrisation en cyberjetons (tokenization) d'actifs numériques issus du monde réel (RWA pour Real Word Assets), comme illustré par le BlackRock USD Institutional Digital Liquidity Fund en mars 2024, offrant une exposition à la titrisation en cyberjetons fondés sur l'Ethereum aux bons du Trésor américain.

Stagnation des cryptoactifs au Canada

Adhésion obligatoire à l'OCRI pour les PNC avec garde

Après avoir approuvé l'inscription d'une seule plateforme de négociation de cryptoactifs (une « PNC ») en 20248, les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (les « ACVM ») ont annoncé en août que le cadre flexible de « courtier d'exercice restreint » n'était plus offert aux PNC cherchant à entrer sur le marché canadien9. La seule option pour une PNC offrant des services de garde est de faire une demande d'adhésion auprès des ACVM en tant que courtier en placement et de devenir membre de l'Organisme canadien de réglementation des investissements (l'« OCRI »).

Les exigences rigoureuses de l'OCRI en matière de capital, d'assurance, de communication de l'information financière et de compétence garantissent que les cryptoactifs des utilisateurs canadiens seront protégés de manière adéquate. Toutefois, le régime normatif de l'OCRI a été conçu pour les courtiers en valeurs mobilières et ne tient pas compte des marchés mondiaux de cryptoactifs fonctionnant 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, du règlement transparent des transactions sur une chaîne de blocs et des mouvements d'actifs dirigés par l'utilisateur entre les comptes sur PNC centralisés et les portefeuilles en autogarde. En tant qu'organisme d'autoréglementation (OAR), l'OCRI n'a pas le pouvoir discrétionnaire de s'écarter trop de ses modèles d'affaires habituels, qui ne prennent pas en compte les actifs pouvant être utilisés à d'autres fins que les placements, telles que les paiements, les jeux et d'autres fonctions Web3.

Les ACVM et l'OCRI devront faire preuve d'une flexibilité renouvelée afin que les Canadiens puissent participer aux nouvelles occasions d'utilisation des cryptoactifs tout en continuant à acheter et à stocker leurs actifs auprès d'un intermédiaire réglementé.

Réglementation des cryptomonnaies stables à garantie fiduciaire en tant que valeurs mobilières

Les ACVM ont finalement mis en Suvre leur régime provisoire pour les cryptomonnaies stables à garantie fiduciaire (que les ACVM appellent « cryptoactifs arrimés à une valeur », value-referenced crypto assets) lorsque Circle Internet Financial Inc. a accepté sa compétence sur USD Coin (« USDC »), comme nous l'avons indiqué dans notre article de blogue du 10 décembre (en anglais seulement). Par conséquent, les PNC inscrites peuvent continuer à offrir des USDC en conformité avec les « Conditions applicables à la négociation de cryptoactifs arrimés à une valeur » imposées par les ACVM.

Toutefois, l'avis du personnel des ACVM10 suggère que tout nouvel émetteur de cryptomonnaies stables cherchant à faire des affaires au Canada dépose un prospectus et se soumette à un régime d'information continue. En revanche, étant donné que le MiCA et tous les autres régimes mondiaux émergents réglementeront les cryptomonnaies stables en tant qu'instruments de paiement dans le cadre de régimes prudentiels, le Canadian Web3 Council a exprimé les préoccupations du secteur concernant l'approche adoptée par les ACVM dans sa lettre de commentaires du 20 décembre relative à l'Énoncé de priorités 2025-2026 de la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario (la « CVMO »), en ces termes :

  • « [Traduction] Les entreprises qui utilisent des cryptomonnaies stables pour payer des employés ou des fournisseurs sont confrontées à l'incertitude de savoir si leurs opérations visent des valeurs mobilières, ainsi que celle inhérente aux conséquences d'un point de vue fiscal et réglementaire.
  • Les consommateurs doivent s'inquiéter des incidences fiscales de l'utilisation des cryptomonnaies stables pour les paiements quotidiens.
  • Les prestataires de services de paiement qui acceptent des cryptomonnaies stables doivent se demander s'ils font effectivement du commerce de valeurs mobilières et s'ils doivent s'enregistrer en tant que courtiers en valeurs mobilières.
  • Les nouveaux émetteurs de cryptoactifs arrimés à une valeur se heurtent à des obstacles pour l'inscription à la cote d'une bourse de leurs cryptomonnaies stables [...] Cette restriction décourage l'innovation de nouveaux produits, en particulier pour les cryptomonnaies stables libellées en CAD, et compromet le développement et l'adoption de nouveaux réseaux, applications et produits de paiement au Canada »11.

Les cryptomonnaies stables à garantie fiduciaire sont un élément clé des marchés mondiaux des cryptoactifs et revêtent une importance croissante dans les paiements et la finance à l'échelle mondiale. Si l'approche du Canada en matière de réglementation ne tient pas compte de l'utilisation prédominante des cryptomonnaies stables en tant que monnaie numérique, nous risquons d'isoler tant nos marchés de cryptoactifs que les voies de paiement de nos sociétés de technologie financière du reste du monde.

Pleins feux sur les teneurs de marché automatisés (AMM)

En juillet 2024, la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario (la « CVMO ») et la Banque du Canada ont publié le document intitulé The Ecology of Automated Market Makers (le « document sur les AMM »), un document de travail sur l'écosystème des teneurs de marché automatisés (les « AMM ») en tant que source potentielle de préjudice pour les investisseurs et de risque pour l'intégrité du marché et comme courroie de transmission du risque systémique. Ce document reflète l'intérêt croissant de la CVMO pour la finance décentralisée (la « FiDé ») et son intention « [traduction] d'appliquer les cadres de réglementation existants ou d'en élaborer de nouveaux, afin de mettre en Suvre des mécanismes réglementaires de protection des investisseurs et d'intégrité des marchés dans le domaine de la FiDé qui soient compatibles avec ceux des marchés financiers traditionnels »12.

Le document sur les AMM décrit les préjudices éventuels pour les investisseurs découlant de l'information asymétrique des utilisateurs de protocoles de FiDé, qui pourraient donner lieu à des pertes dues à des fautes professionnelles ou à des défaillances du marché, et cerne « [traduction] un ensemble limité d'activités des AMM qui peuvent déjà être prises en compte dans les cadres de réglementation existants ». Le document indique que les AMM semblent : « [traduction] i) émettre et utiliser une variété de cryptoactifs qui peuvent être considérés comme des valeurs mobilières ou des dérivés, ii) exécuter certaines fonctions clés comparables à celles exécutées par des structures de marché centralisées et iii) encourager la participation des utilisateurs individuels et institutionnels aux activités de négociation et à la réserve de liquidités13.

Dans l'ensemble, le document sur les AMM montre que la CVMO n'en est encore qu'au stade initial, soit la question de savoir quand et comment réglementer les activités liées à la FiDé, et qu'elle reconnaît que la nature décentralisée et autonome des AMM soulève des enjeux sur le plan de la réglementation. Toutefois, il montre également que la CVMO, suivant l'exemple de l'Organisation internationale des commissions de valeurs (OICV), est en train d'approfondir sa compréhension de la FiDé et qu'elle a cerné les enjeux en matière de protection des investisseurs et d'intégrité des marchés qui y sont associés.

Le ton suggère que la CVMO examine la question de près et serait susceptible de publier des orientations avant d'exercer sa compétence à l'égard des AMM ou d'autres projets liés à la FiDé. Toutefois, compte tenu de l'utilisation répandue des cryptomonnaies stables dans le cadre de la FiDé, que les ACVM proposent déjà de réglementer comme s'il s'agissait de valeurs mobilières, le risque lié à la réglementation est plus élevé au Canada et pourrait dissuader les innovateurs en matière de cryptoactifs de permettre aux utilisateurs canadiens d'accéder aux marchés et aux services décentralisés.

Sorties de fonds pour les fonds de cryptoactifs canadiens

Le Canada a été le premier pays au monde à approuver les fonds de cryptoactifs ouverts, avec des fonds à capital fixe pour le lancement des fonds fondés sur le bitcoin et l'éther à la Bourse de Toronto en 2020, suivi par des FNB pour les deux actifs en 2021, et les premières approbations d'un fonds de jalonnement sur l'éther et de plusieurs FNB en 2023. Les fonds de cryptoactifs innovants du Canada ont attiré d'importants investissements mondiaux, avec plus de 3 milliards $ CA d'actifs sous gestion au 30 juin 202314.

Il n'est pas surprenant qu'après l'approbation par la SEC de FNB de bitcoin en janvier 2024 et de FNB d'éther en mai, les FNB de cryptoactifs canadiens aient enregistrés des sorties de fonds d'environ 1,4 milliard $ CA, les investisseurs américains et d'autres investisseurs internationaux ayant modifié leur exposition15. Un seul nouveau FNB de cryptoactifs canadien a été lancé en 2024 lorsque l'émetteur à petite capitalisation Ether Capital Corp. s'est converti en un FNB, le Purpose Ether Staking Corp., en juin 2024 (CBOE:ETHC.B).

Des raisons d'être optimiste

De la retenue dans les mesures d'exécution

Même si le cadre de réglementation du Canada pour les PNC est strict, les ACVM n'ont pas utilisé leurs pouvoirs d'exécution pour établir de nouvelles règles à l'intention du secteur des cryptoactifs. Au contraire, jusqu'à présent, toutes les mesures d'exécution prises par les membres des ACVM à l'endroit des participants au marché des cryptoactifs ont été précédées d'avis publics16 qui visent à articuler le point de vue des ACVM sur la façon dont la législation en valeurs mobilières existante s'applique aux activités liées aux cryptoactifs.

La première vague de mesures d'application de la CVMO a eu lieu en 2022, un an après la publication de l'avis 21-329 des ACVM. Cet avis a clarifié le point de vue des ACVM selon lequel les comptes de garde offerts par les PNC centralisées visent des valeurs mobilières ou des produits dérivés et que, par conséquent, ils relèvent de la réglementation applicable aux courtiers en valeurs mobilières et aux marchés. La CVMO a engagé des procédures à l'encontre de quatre PNC étrangères qui desservaient des utilisateurs canadiens et qui proposaient toutes des produits dérivés et des produits à fort effet de levier en plus des contrats de cryptomonnaie au comptant, comme nous l'avons expliqué dans notre article de 2023 (en anglais seulement). En réponse, de nombreuses PNC étrangères ont cessé d'offrir leurs services au Canada.

En 2023 et 2024, la CVMO et d'autres membres des ACVM ont engagé des poursuites contre un total de 14 PNC et émettrices (dont certaines sont abordées dans notre article de 2024 (en anglais seulement) pour avoir distribué et/ou négocié des cryptoactifs qui sont des valeurs mobilières ou des dérivés sans se conformer aux exigences en matière de prospectus et/ou d'inscription à titre de courtiers en valeurs mobilières. En général, les défendeurs visés par ces poursuites ont fait des déclarations fausses ou trompeuses dans les documents de promotion, ont fait preuve d'insouciance ou de négligence dans la prestation de services liés aux cryptoactifs ou, tout au moins, ont fourni des services de garde dont il est largement reconnu qu'ils rentrent dans le champ d'application de la législation en valeurs mobilières. À ce jour, aucun membre des ACVM n'a engagé de procédure publique d'exécution à l'encontre d'un développeur de cryptoactifs relativement à des services autres que de garde.

En outre, le Tribunal des marchés financiers de l'Ontario (le « TMFO ») semble adopter une approche mesurée à l'égard de l'application de la législation en valeurs mobilières aux cryptoactifs. Dans l'affaire de 2024, Re Hogg17, le TMFO a rejeté la position de la CVMO selon laquelle les cryptoactifs promus et vendus par les défendeurs étaient, en soi, des valeurs mobilières, et a approuvé l'analyse du contrat d'investissement dans la décision américaine SEC v. Ripple Labs18 :

[Traduction] Nous n'avons pas été convaincus par l'affirmation de la Commission selon laquelle les jetons en l'espèce sont un « contrat intelligent », un « contrat », l'« équivalent d'un document écrit » ou qu'ils renferment des « modalités ». La Commission s'est appuyée sur une seule ligne du livre blanc intitulé Cryptobontix White Paper, indiquant que les jetons sont « [trad.] basés sur la technologie Ethereum Smart Contract, également connue sous le nom de jetons ERC20 ». La Commission n'a pas expliqué de manière satisfaisante en quoi cela était important. Ces affirmations de la Commission n'ont été étayées par aucune preuve... Nous n'avons pas non plus été convaincus que les jetons dont il est question ici constituent un instrument d'investissement tel qu'un certificat d'action. Il n'a pas été établi qu'il y a quelque chose d'inhérent à ces jetons qui confère aux investisseurs une participation dans Cryptobontix ou dans une entreprise.

Même si les jetons font l'objet de la transaction ou du stratagème en l'espèce, nous estimons que les jetons (tout comme les sacs de pièces d'argent dans l'affaire Pacific Coast Coin et les plantations d'agrumes dans l'affaire Howey, visant des contrats dans lesquels les investisseurs achetaient des plantations d'agrumes pour essentiellement les louer à un prestataire de services afin de récolter, de mettre en commun et de commercialiser les produits), en eux-mêmes, ne contiennent pas les éléments d'un contrat d'investissement19.

Maturation du secteur canadien des cryptoactifs

L'un des avantages de l'approche stricte adoptée par les ACVM en matière de réglementation est que le Canada compte désormais cinq PNC qui sont des courtiers en valeurs mobilières à part entière et des membres de l'OCRI, six PNC qui sont des courtiers en valeurs mobilières d'exercice restreint et une poignée d'autres qui devraient achever leur inscription au cours du premier semestre de 2025. Toutes ces PNC sont tenues de maintenir de solides programmes financiers, d'exploitation, de conformité et de gestion des risques afin de satisfaire aux normes de la réglementation. Ainsi, les PNC canadiennes sont supervisées par des professionnels qualifiés, dont beaucoup ont une expérience traditionnelle des marchés des capitaux.

En outre, les ACVM et l'OCRI a développé une expertise dans la négociation et les marchés liés aux cryptoactifs. Par exemple, les ACVM et l'OCRI ont chacun élaboré les modalités et conditions d'autorisation des PNC à offrir des services de jalonnement à leurs utilisateurs, ainsi que des normes minimales applicables aux mécanismes de contrôle du « stockage à chaud » (hot wallet), aux audits de sécurité et à l'assurance.

La combinaison de PNC professionnalisées et d'organismes de réglementation expérimentés dans le domaine devrait faciliter la collaboration qui permettra aux plateformes réglementées d'offrir de nouveaux produits aux utilisateurs canadiens. Les ACVM et l'OCRI devraient être réceptifs aux propositions des PNC visant à offrir des marges, des produits dérivés et des conseils liés aux cryptoactifs en suivant les principes existants en matière de réglementation des marchés des capitaux, tout en reconnaissant que de nombreux cryptoactifs ne sont pas des valeurs mobilières. Par conséquent, les clients peuvent chercher à négocier et à détenir des cryptoactifs à des fins autres que l'investissement, et il peut donc être approprié d'adopter des approches flexibles en matière de vérification diligente des produits, de convenance et de garde.

De même, les FNB canadiens de cryptoactifs fonctionnent depuis 2021, et trois fonds ouverts canadiens d'ether se livrent à des activités de jalonnement pour améliorer les rendements pour leurs détenteurs20. Les ACVM ont proposé des modifications à la réglementation qui feront expressément rentrer les fonds de cryptoactifs dans le champ d'application du régime des fonds d'investissement ouverts du Canada21. Les ACVM ont maintenant l'occasion d'appliquer leur cadre établi et leur expertise en matière de réglementation à de nouveaux types de fonds de cryptoactifs qui offrent une exposition à différents actifs et stratégies.

Consultation publique et collaboration avec les organismes de réglementation

Les ACVM ont introduit un cadre de réglementation des marchés des capitaux pour les cryptoactifs en 202122, conférant des normes élevées de compétence, de solvabilité et d'intégrité au secteur canadien des cryptoactifs. Plutôt que de proposer de nouvelles règles expressément conçues pour les cryptoactifs (ce qui aurait probablement nécessité des modifications législatives), les ACVM ont appliqué la législation existante aux PNC offrant des services de garde, en l'adaptant au moyen d'une dispense afin d'offrir une certaine souplesse.

Les ACVM ont mis en Suvre leur cadre en publiant neuf avis, ainsi que des modalités et conditions d'inscription adaptées à chaque PNC s'étant inscrite en qualité que courtier. Quatre ans plus tard, près de 20 PNC sont inscrites en tant que courtiers ou exercent leurs activités dans le cadre d'engagements préalables à l'inscription en vertu de la législation canadienne en valeurs mobilières. L'initiative des ACVM a permis de clarifier la réglementation et d'assurer une solide protection des consommateurs, ce qui a profité à de nombreux investisseurs et utilisateurs canadiens dans le domaine des cryptoactifs.

Toutefois, étant donné que l'approche des ACVM consiste à appliquer aux cryptoactifs la législation en valeurs mobilières existante, plutôt que de créer de nouvelles règles fondées sur les principes des marchés des capitaux, elle est intrinsèquement limitée et de plus en plus rigide. Dans l'ensemble, toutes les PNC canadiennes n'offrent qu'un seul produit : des services autogérés de négociation au comptant et de garde relatifs aux cryptoactifs, dans certains cas avec jalonnement. De même, l'initiative des ACVM visant à réglementer les cryptomonnaies stables à garantie fiduciaire en tant que valeurs mobilières a fait de l'USDC la seule cryptomonnaie stable à garantie fiduciaire dont la négociation est autorisée sur les PNC canadiennes, alors qu'un lourd fardeau réglementaire empêche l'offre de jetons en CAD ou de toute autre cryptomonnaie stable au Canada.

Parallèlement, le MiCA, le FIT21 et d'autres régimes de réglementation des cryptoactifs adaptés témoignent de la nouveauté des cryptoactifs, dont beaucoup présentent à la fois des caractéristiques d'investissement et d'utilité. Fait important, la plupart des régimes mondiaux font également la distinction entre les cryptomonnaies stables à garantie fiduciaire (généralement réglementées de manière prudente en tant que monnaie numérique) et d'autres types de cryptoactifs. Pour que le Canada puisse continuer à réglementer les cryptoactifs sans étouffer l'innovation, il est impératif de mener une consultation publique avec le secteur et les autres parties prenantes.

En outre, maintenant qu'une masse critique de PNC sont enregistrées, les ACVM et l'OCRI devraient être ouverts aux propositions du secteur pour développer les produits et services de cryptoactifs dans l'intérêt des clients et des utilisateurs canadiens. C'est donc ensemble que le secteur et les organismes de réglementation pourront s'appuyer sur leur historique de collaboration fructueuse et ouvrir la voie à l'innovation dans le secteur des cryptoactifs au Canada.

Footnotes

1. CoinDesk, « U.S. Listed Spot Bitcoin ETFs on the Verge of Surpassing Gold ETFs », en ligne: https://www.coindesk.com/markets/2024/12/19/u-s-listed-spot-bitcoin-etfs-on-the-verge-of-surpassing-gold-etfs.

2. Chambre des représentants des États-Unis, « House Passes Financial Innovation and Technology for the 21st Century Act with Overwhelming Bipartisan Support », en ligne: https://financialservices.house.gov/news/documentsingle.aspx?DocumentID=409277. La FIT21 devra être approuvée par le Sénat américain avant d'entrer en vigueur.

3. K&L Gates LLP, « The Regulation on Markets in Crypto-Assets Becomes Fully Applicable in All Member States of the European Union », en ligne: https://www.lexology.com/library/detail.aspx?g=365ab9e7-14c2-404e-a1e8-1d85b441a03d.

4. Ibid.

5. Voir : https://www.sec.gov/newsroom/press-releases/2025-30.

6. Cynthia Lummins, « Lummis to Chair Historic Senate Panel on Digital Assets », en ligne : https://www.lummis.senate.gov/press-releases/lummis-to-chair-historic-senate-panel-on-digital-assets/

7. Forbes, « 2024 The Year Of Crypto: From Bitcoin ETFs To Memecoins », en ligne : https://www.forbes.com/sites/lawrencewintermeyer/2024/12/31/2024-the-year-of-crypto-from-bitcoin-etfs-to-memecoins/.

8. Coinbase Canada, Inc. a été inscrit en tant que courtier d'exercice restreint le 3 avril 2024, voir: https://www.osc.ca/fr/droit-valeurs-mobilieres/ordonnances-decisions/coinbase-canada-inc-and-coinbase-inc.

9. Commission des valeurs mobilières de l'Ontario, « Les ACVM et l'OCRI attendent des plateformes de négociation de cryptoactifs qu'elles présentent sans tarder leur demande d'inscription à titre de courtier en placement et d'adhésion à l'OCRI », en ligne : https://www.osc.ca/fr/nouvelles-evenements/nouvelles/les-acvm-et-locri-attendent-des-plateformes-de-negociation-de-cryptoactifs-quelles-presentent-sans.

10. ACVM, « Avis 21-333 du personnel des ACVM – Plateformes de négociation de cryptoactifs : conditions applicable à la négociation de cryptoactifs arrimés à une valeur avec des clients », en ligne : https://lautorite.qc.ca/fileadmin/lautorite/reglementation/valeurs-mobilieres/0-avis-acvm-staff/2023/2023oct05-21-333-avis-acvm-fr.pdf.

11. Ibid, p. 3.

12. Document sur les AMM, p. 32.

13. Document sur les AMM, p. 38.

14. Commission des valeurs mobilières de l'Ontario, « Notice and Request for comment », en ligne : https://www.osc.ca/sites/default/files/2024-01/csa_20240118_81-102_rfc_crypto-assets.pdf.

15. TD, « Retour sur les FNB au Canada en 2024 », en ligne : https://www.tdsecurities.com/ca/fr/canada-etf-recap-2024#.

16. Le Pôle ACVM d'innovation financière tient à jour une liste de toutes les publications des ACVM relatives aux cryptoactifs à l'adresse suivante : https://www.autorites-valeurs-mobilieres.ca/ressources/pole-finov/publications-des-acvm/.

17. 2024 ONCMT 15 (« Hogg »).

18. 20 Civ. 10832 (AT).

19. Hogg, par. 104 et 105.

20. Purpose Ether Staking Corp. ETF (numéro de profil SEDAR+ 000104893); 3iQ Ether Staking ETF (numéro de profil SEDAR+ 000051756); The Ether Fund (numéro de profil SEDAR+ 000060045).

21. Commission des valeurs mobilières de l'Ontario, « Notice and Request for comment », en ligne : https://www.osc.ca/sites/default/files/2024-01/csa_20240118_81-102_rfc_crypto-assets.pdf.

22. ACVM, « Avis 21-329 du personnel des ACVM – Guidance for Crypto-Asset Trading Platforms », en ligne : https://www.osc.ca/sites/default/files/2021-03/csa_20210329_21-329_compliance-regulatory-requirements.pdf.

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