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29 September 2025

Bonjour/Hi! Les coulisses des enquêtes bilingues

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Rubin Thomlinson LLP

Contributor

A Canadian law firm focused solely on workplace and institutional investigations, assessments, tactical training for HR professionals, and consulting.
Dans ce billet, nous vous présentons notre équipe actuelle d'enquêteurs bilingues, composée de Frédérick J. Doucet et de Frédérik Forget. Tous deux mènent leurs enquêtes en anglais et en français...
Canada Employment and HR

Dans ce billet, nous vous présentons notre équipe actuelle d'enquêteurs bilingues, composée de Frédérick J. Doucet et de Frédérik Forget. Tous deux mènent leurs enquêtes en anglais et en français, une compétence essentielle chez Rubin Thomlinson puisque nous prenons des dossiers de partout au pays. Nous voulions donc vous donner un aperçu de ce qu'implique le fait de mener des enquêtes bilingues et de la façon dont ces deux professionnels ont développé les compétences linguistiques qui leur permettent de s'épanouir dans leur rôle.

Pour ce faire, nous avons choisi de présenter ce billet sous forme de « questions-réponses ». Le contenu s'appuie sur une conversation entre Liliane Gingras (LG), associée chez Rubin Thomlinson, qui travaille avec l'équipe bilingue, et Frédérick et Frédérik (oui, leurs prénoms sont presque identiques... et oui, on s'y perd parfois!). Ce billet reprend l'essentiel de leur échange, avec quelques ajustements pour en alléger la lecture.

J'ai eu la chance de travailler avec vous deux et je peux constater à quel point vous êtes à l'aise autant en français qu'en anglais, c'est vraiment impressionnant. Comment avez-vous développé cette aisance pour travailler dans les deux langues?

Frédérik Forget (FF): Je suis originaire d'une ville bilingue du Nouveau-Brunswick, ce qui m'a aidé à apprendre les deux langues. Je parlais français à la maison, mais à un certain moment, j'ai commencé à regarder des films avec des sous-titres en anglais, ce qui m'a permis de comprendre comment les mots anglais étaient utilisés selon le contexte. J'ai fait la majorité de mes études en français, y compris mes diplômes en droit et une maîtrise, mais j'ai aussi appris l'anglais à l'école. La capacité de travailler dans les deux langues est venue plus tard. J'ai acquis un vocabulaire plus juridique à travers différents postes, par exemple, en travaillant comme procureur dans le nord du Québec, où les procès se déroulent principalement en anglais, et en menant des enquêtes en milieu de travail dans les deux langues, surtout pour des employeurs fédéraux.

Frédérick Doucet (FD): Moi aussi, j'ai grandi dans une communauté bilingue au Québec, ce qui m'a donné de nombreuses occasions de pratiquer les deux langues. Je parlais français à la maison, mais ma famille m'a initié très tôt à l'anglais. J'ai fait la majeure partie de mes études en français, mais l'anglais faisait partie du programme tout au long de mon parcours scolaire, du primaire jusqu'au cégep. J'ai ensuite obtenu des diplômes en droit civil et en common law, ce dernier étant principalement enseigné en anglais. Ce qui m'a aussi beaucoup aidé, c'est que, comme avocat en droits de la personne, j'ai toujours lu de la jurisprudence provenant de différentes provinces, autant en anglais qu'en français.

À votre avis, jusqu'à quel point faut-il être à l'aise dans les deux langues pour pouvoir travailler comme enquêteur bilingue?

FF: Un enquêteur devrait avoir un haut niveau de maîtrise dans chaque langue. Pour moi, c'est essentiel parce que le langage entourant le harcèlement et la discrimination est tellement nuancé qu'il est important de savoir exactement quels mots utiliser. Pour qu'une personne se sente à l'aise de partager sa version des faits, il faut l'écouter activement. Cela n'est possible que si l'on a une grande aisance dans la langue de préférence de la personne qui s'exprime.

FD: Les personnes qui mènent des enquêtes bilingues doivent être pleinement compétentes en anglais et en français, à un niveau professionnel (ce qui est différent de simplement pouvoir tenir une conversation). Elles doivent connaître la terminologie appropriée, savoir lire et analyser des documents complexes dans chaque langue et démontrer une réelle maîtrise de la rédaction en français comme en anglais. Il est aussi important qu'elles puissent passer naturellement d'une langue à l'autre pendant les entretiens, car il arrive que les personnes rencontrées alternent elles-mêmes entre le français et l'anglais.

LG: Pour rebondir sur ce que FD vient de dire, je pense que la capacité de bien écrire dans les deux langues est essentielle. On ne sait jamais quand un rapport peut se retrouver devant un tribunal. Si la qualité de la langue laisse à désirer, cela peut nuire à la crédibilité même du rapport.

Je sais que certaines de vos enquêtes se déroulent uniquement en anglais, d'autres seulement en français, et que beaucoup se déroulent dans un mélange des deux langues. Qu'est-ce que ça implique de mener une enquête bilingue?

FD: Mener des enquêtes bilingues implique beaucoup de travail de traduction. C'est pourquoi elles prennent généralement plus de temps à réaliser que les enquêtes « régulières ». Cela suppose aussi de passer fréquemment d'une langue à l'autre, selon les préférences des personnes impliquées. Ces préférences linguistiques peuvent parfois surprendre : dans un milieu bilingue, le client ne sait pas toujours dans quelle langue une personne voudra participer à l'enquête (certaines, par exemple, peuvent souhaiter utiliser les deux langues). Cela signifie qu'il faut toujours être prêt à conduire un entretien dans l'une ou l'autre langue.

FF: Je suis d'accord pour dire qu'enquêter dans les deux langues nécessite généralement beaucoup de temps consacré à la traduction. Par exemple, un plaignant peut présenter sa preuve en français, mais la liste des allégations doit être remise au répondant en anglais (ou vice versa). Nous faisons parfois appel à des traducteurs externes, mais nous devons malgré tout vérifier le travail traduit afin de nous assurer que le sens voulu dans la langue originale a été fidèlement rendu. Retravailler un document traduit peut prendre un certain temps.

FD: Il m'arrive également d'avoir recours à des services de traduction externes, mais je constate moi aussi qu'il faut vérifier le travail attentivement. La traduction des termes techniques par une personne qui ne connaît pas le domaine des enquêtes ou du droit de la personne peut poser des défis.

Selon vous, quel est le plus grand défi des enquêtes bilingues?

FD: Comme je l'ai mentionné, les enquêtes bilingues prennent plus de temps et réservent souvent des surprises (par exemple, il peut arriver qu'une partie demande, en cours d'enquête, à recevoir les documents dans une autre langue). Les personnes qui travaillent dans deux langues ont généralement une langue dominante, et il peut être plus exigeant de travailler dans l'autre. Cela dit, dans mon cas, j'ai remarqué que même l'écriture en français, qui est ma langue dominante, peut parfois demander un effort supplémentaire. Dans certains contextes (par exemple lorsqu'un dossier touche à l'identité ou à l'expression de genre), il est nécessaire d'utiliser un langage inclusif, à l'oral comme à l'écrit. Comme le français est une langue genrée, il faut souvent faire preuve de créativité.

FF: Le défi pour moi se pose lorsqu'une partie présente sa preuve dans une langue, mais que je dois la retranscrire avec précision dans l'autre (par exemple, un plaignant présente sa preuve en français, mais je dois formuler les allégations en anglais pour le répondant). Il faut du temps pour mettre en mots ce que l'on a entendu dans une langue dans l'autre, car la traduction ne peut pas être littérale (une telle traduction ne rendrait pas fidèlement le sens voulu).

Pour terminer, qu'est-ce que vous trouvez le plus gratifiant dans la conduite d'enquêtes bilingues?

FD: Pour moi, c'est de pouvoir mettre les personnes à l'aise en leur permettant de participer à l'enquête dans la langue où elles se sentent le plus confortables. Offrir cette possibilité crée un climat plus respectueux et rend le processus plus accessible. Cela change vraiment la dynamique d'une enquête.

FF: J'aime pouvoir offrir un service qui répond aux besoins des milieux de travail d'aujourd'hui. La réalité est qu'il existe de nombreux milieux de travail bilingues, et je trouve positif de pouvoir offrir des services adaptés à cette réalité.

En conclusion, ce que les employeurs doivent surtout retenir, c'est que la conduite d'enquêtes bilingues requiert une véritable maîtrise des deux langues. Le simple fait de pouvoir se débrouiller dans les deux langues ne suffit pas pour offrir des services d'enquête bilingues de qualité. Un haut niveau de compétence linguistique permet aux personnes de participer à l'enquête dans la langue où elles se sentent le plus à l'aise, ce qui contribue à garantir un processus plus équitable et respectueux. Les employeurs devraient donc s'assurer, en posant les bonnes questions, que la personne qu'ils songent retenir pour mener l'enquête dispose des aptitudes nécessaires. C'est la seule façon de garantir que les besoins linguistiques de l'enquête seront adéquatement comblés.

The content of this article is intended to provide a general guide to the subject matter. Specialist advice should be sought about your specific circumstances.

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