Quelques propos introductifs

La présente Newsletter de Monfrini Bitton Klein vise à offrir, de manière hebdomadaire, un tour d'horizon de la jurisprudence rendue par le Tribunal fédéral dans les principaux domaines d'activité de l'Etude, soit le droit pénal économique et le recouvrement d'actifs (asset recovery).

Sans prétendre à l'exhaustivité, seront reproduits ci-après les considérants consacrant le raisonnement juridique principal développé par notre Haute juridiction sur les thématiques suivantes : droit de procédure pénale, droit pénal économique, droit international privé, droit de la poursuite et de la faillite, ainsi que le droit de l'entraide internationale.

  1. PROCÉDURE PÉNALE

TF 6B_1428/2021 du 9 janvier 2023 | Respect du délai de recours – absence de preuve de remise au guichet postal (art. 48, 100 LTF) 

  • Par jugement du 29 octobre 2021, notifié le 4 novembre 2021, la Cour pénale I du Tribunal cantonal du Valais a partiellement admis l'appel formé par le Recourant, qui a recouru devant le Tribunal fédéral. 
  • La question qui se pose dans cet arrêt est celle du respect du délai de 30 jours (art. 100 al. 1 LTF) pour déposer le recours à la Poste (art. 48 LTF) (consid. 1 ss).  
  • Selon la jurisprudence, l'avocat qui se contente de déposer son pli dans une boîte postale n'est pas sans connaître le risque qu'il court que ce pli ne soit pas enregistré le jour même de son dépôt, mais à une date ultérieure. S'il souhaite renverser la présomption résultant du sceau postal apposé sur l'enveloppe ayant contenu un acte de procédure, on est en droit d'attendre de lui qu'il indique spontanément – et avant l'échéance du délai de recours – à l'autorité compétente avoir respecté le délai, en présentant les moyens probatoires en attestant. Ainsi, il n'est pas admissible d'indiquer à l'autorité judiciaire, pour la première fois après l'expiration du délai de recours, que le pli litigieux aurait été déposé en présence de témoins, ou encore d'affirmer qu'il avait été déposé dans les délais tout en évoquant un enregistrement vidéo tenu à la disposition du Tribunal fédéral. Cette manière de faire ne permet pas de renverser la présomption découlant du sceau postal, ni celle de tardiveté du recours. Les parties doivent donc produire les preuves du dépôt en temps utile avant l'expiration du délai de recours ou, à tout le moins, les désigner dans l'acte de recours, ses annexes, ou encore sur l'enveloppe (consid. 1.2.1). 
  • In casu, le délai de recours a commencé à courir le 5 novembre 2021, pour arriver à échéance le lundi 6 décembre 2021, ce qui est admis par le Recourant (consid. 1.2.1). 
  • Le Tribunal fédéral a relevé que le pli recommandé ayant contenu le recours n'a été ni affranchi, ni oblitéré, ne permettant ainsi pas, de prime abord, de déterminer quand il a été déposé. Une recherche du suivi de l'envoi sur le site internet de la Poste (« track and trace») a permis de déterminer qu'elle avait saisi les données relatives à l'envoi dans son système le 8 décembre 2021 pour la première fois. Le recours est dès lors réputé avoir été déposé à cette date, soit tardivement (consid. 1.2.2). 
  • Au vu de ce qui précède, le Tribunal fédéral a ensuite examiné si cette présomption a été renversée par le Recourant (consid. 1.2.3). 
  • In casu, le pli recommandé ayant contenu le recours a été déposé par Madame C., en sa qualité d'apprentie employée de commerce, au guichet commercial de la Poste, le 6 décembre 2021 à 17h45. La précitée l'a confirmé dans une attestation non datée produite à l'appui des déterminations. En revanche, le Recourant n'a pas expliqué pourquoi ce pli recommandé, prétendument remis au guichet commercial de la Poste, n'a été ni affranchi, ni oblitéré par la personne qui occupait le guichet. De même, il n'a pas expliqué pourquoi la première trace de cet envoi dans le système de la Poste intervenait deux jours après seulement (consid. 1.2.3). 
  • Le Recourant a produit une pièce le 21 décembre 2021 qui consistait en une copie du pli recommandé portant une annotation manuscrite du 15 décembre 2021 rédigée par Monsieur D., responsable des cases postales du bureau de la Poste, que ce pli recommandé a été : « Déposé le lundi 06.12.2021 à U. non affranchi ! Colis envoyé au service ad-hoc à Éclepens» (consid. 1.2.3). 
  • Compte tenu des explications fournies par le Recourant, le Tribunal fédéral a considéré que le pli recommandé avait vraisemblablement été déposé par erreur dans une case postale, été oublié quelque part dans ou aux abords des locaux de la Poste, ou simplement été glissé dans la boite postale de la Poste, mais pas qu'il aurait été remis au guichet commercial. À tout le moins, le Recourant n'est pas en mesure de démontrer le contraire au moyen d'une preuve stricte (consid. 1.2.4). 
  • Partant, le recours est tardif, donc irrecevable (consid. 2). 

TF 6B_762/2022 du 11 janvier 2023 | Classement de la procédure – violation d'une norme claire de comportement – frais de procédure à charge (art. 426, 429 CPP) 

  • Une société a déposé plainte pénale contre le Recourant. Elle lui a reproché d'avoir publié sur le site Internet Google de l'entreprise, le commentaire suivant : « Surtout ne commandez pas !!! il va probablement faire faillite prochainement car il ne paye pas ses SOUS-TRAITANTS et ses clients sont très mécontents (voir les autres commentaires autres que ceux de ses proches) ». Le Ministère public de l'arrondissement du Nord vaudois a ordonné le classement de la procédure pénale pour diffamation. Considérant que le comportement civilement répréhensible du Recourant était à l'origine de l'ouverture de la procédure pénale, il a mis les frais de procédure pour un montant de CHF 375.- à sa charge, le solde suivant le sort de la cause, et ne lui a pas alloué d'indemnité.
  • Le Recourant a dénoncé devant le Tribunal fédéral une violation des art. 426 et 429 CPP.
  • Conformément à l'art. 426 al. 2 CPP portant sur la question des frais de procédure, le Tribunal fédéral a rappelé que la condamnation d'un prévenu acquitté à supporter tout ou partie des frais doit respecter la présomption d'innocence, consacrée par les art. 32 al. 1 Cst. et 6 par. 2 CEDH. Celle-ci interdit de rendre une décision défavorable au prévenu libéré en laissant entendre que ce dernier serait néanmoins coupable des infractions qui lui étaient reprochées. Une condamnation aux frais n'est ainsi admissible que si le prévenu a provoqué l'ouverture de la procédure pénale dirigée contre lui ou s'il en a entravé le cours. A cet égard, seul entre en ligne de compte un comportement fautif et contraire à une règle juridique, qui soit en relation de causalité avec les frais imputés. Pour déterminer si le comportement en cause est propre à justifier l'imputation des frais, le juge peut prendre en considération toute norme de comportement écrite ou non écrite résultant de l'ordre juridique suisse pris dans son ensemble, dans le sens d'une application par analogie des principes découlant de l'art. 41 CO. Le fait reproché doit constituer une violation claire de la norme de comportement. Une condamnation aux frais ne peut se justifier que si, en raison du comportement illicite du prévenu, l'autorité était légitimement en droit d'ouvrir une enquête. Elle est en tout cas exclue lorsque l'autorité est intervenue par excès de zèle, ensuite d'une mauvaise analyse de la situation ou par précipitation ; la mise des frais à la charge du prévenu en cas d'acquittement ou de classement de la procédure doit en effet rester l'exception (consid. 2.1.1).
  • Si le prévenu supporte les frais en application de l'art. 426 al. 1 ou 2 CPP, une indemnité au sens de l'art. 429 al. 1 CP est en règle générale exclue, alors que le prévenu y a, en principe, droit si l'État supporte les frais de la procédure pénale (consid. 2.1.2).
  • Dans la présente cause, le Tribunal fédéral a constaté que la cour cantonale n'avait mentionné aucune norme de comportement résultant de l'ordre juridique suisse que le Recourant aurait violée. Elle a considéré que le Recourant avait eu un comportement fautif en se fondant sur la jurisprudence posée notamment à l'arrêt 6B_434/2008 du 29 octobre 2008 consid. 2, non publié dans l'ATF 135 IV 43. Selon cette jurisprudence, il y a en substance comportement fautif lorsque le prévenu aurait dû se rendre compte, au vu des circonstances et de sa situation personnelle, que son attitude risquait de provoquer l'ouverture d'une enquête pénale ; le droit civil non écrit interdisant en effet de créer un état de fait propre à causer un dommage à autrui, sans prendre les mesures nécessaires afin d'en éviter la survenance. En outre, le droit de procédure pénale interdit implicitement de créer sans nécessité l'apparence qu'une infraction a été ou pourrait être commise, car un tel comportement est susceptible de provoquer l'intervention des autorités répressives et l'ouverture d'une procédure pénale et, partant, de causer à la collectivité le dommage que constituent les frais liés à une instruction pénale ouverte inutilement (consid. 2.3). 
  • Or, comme le Tribunal fédéral a eu l'occasion de le souligner à plusieurs reprises, cette jurisprudence doit être interprétée de manière restrictive. En effet, tout prévenu qui fait l'objet d'une enquête pénale doit normalement, dans un État de droit, avoir eu un comportement impliquant des soupçons se portant sur lui. Ainsi, il est admis qu'un comportement immoral ou contraire au principe de la bonne foi au sens de l'art. 2 CC ne saurait suffire pour justifier l'intervention des autorités pénales et, partant, entraîner l'imputation des frais au prévenu acquitté (consid. 2.3).
  • In casu, une violation claire d'une norme de comportement n'était nullement établie, de sorte que la cour cantonale ne pouvait mettre les frais à la charge du Recourant, respectivement refuser de lui allouer une indemnité pour ses frais de défense (consid. 2.3).  
  • Partant, le recours a été admis, l'arrêt attaqué annulé et la cause renvoyée à l'autorité précédente pour nouvelle décision (consid.3).

TF 6B_1453/2021 du 12 janvier 2023 | Classement implicite – application du principe de l'autorité de l'arrêt de renvoi   

  • Par acte d'accusation du 26 juin 2017, le Ministère public de la République et canton de Genève a renvoyé en jugement C. pour escroquerie par métier, subsidiairement abus de confiance aggravé, gestion déloyale aggravée et faux dans les titres. Un certain nombre de faits en relation avec cette affaire n'ont pas été retenus dans l'acte d'accusation et ont fait l'objet d'un classement implicite, notamment des faits en rapport avec la plainte déposée par la Recourante A. Cette dernière a contesté le classement implicite jusqu'au Tribunal fédéral, lequel a admis son recours en matière pénale (TF 6B_819/2018) et renvoyé l'affaire à l'autorité précédente. Le 11 février 2021, le Ministère public genevois a classé les plaintes de la Recourante et refusé de joindre la procédure à une procédure séparée, en cours contre la banque B. SA, ainsi que d'administrer des preuves supplémentaires. 
  • La Recourante a porté l'affaire à nouveau devant notre Haute Cour. Elle s'est plainte d'une violation du principe de l'autorité de l'arrêt de renvoi (consid. 2 ss).
  • Le principe de l'autorité de l'arrêt de renvoi découle du droit fédéral non écrit. Concernant en particulier l'état de fait, l'autorité à laquelle la cause est renvoyée par le Tribunal fédéral est liée par celui-ci uniquement lorsque les constatations de l'état de fait de l'instance précédente n'ont pas été attaquées, lorsque les griefs de faits ont été rejetés car considérés comme infondés par le Tribunal fédéral et qu'ils ont été tranchés de manière définitive ou lorsque les griefs relatifs à l'appréciation des preuves ont été déclarés irrecevables puisqu'ils ne respectaient pas les exigences légales de motivation (consid. 2.1).
  • Le Tribunal fédéral a tout d'abord relevé qu'il ressortait de son arrêt de renvoi (TF 6B_819/2018 consid. 3.8) que dans la mesure où la cour cantonale avait constaté que le Ministère public avait rendu un classement implicite, il lui incombait de renvoyer la cause à celui-ci afin qu'il rende une décision formelle, l'absence d'une telle décision violant le droit d'être entendu des parties. Par ailleurs, l'absence de décision formelle et, par-là, l'ignorance des faits exacts dont la poursuite était abandonnée par le Ministère public et des motifs justifiant cet abandon constituait une atteinte grave aux droits procéduraux de la partie, si bien que la cour cantonale ne pouvait réparer la violation du droit d'être entendu (consid. 2.3).
  • Il a également retenu que contrairement à ce qu'a estimé la cour cantonale, l'arrêt de renvoi ne pouvait être interprété en ce sens qu'il limitait l'examen au comportement de C., à l'exclusion de tout autre auteur ou participant potentiel. Bien au contraire, l'absence de décision de classement impliquait que l'on ignorait quels faits – et également quels éventuels auteurs – le Ministère public avait renoncé à poursuivre. Le renvoi avait justement pour but que le Ministère public rende une décision délimitant clairement et formellement les limites des faits bénéficiant de l'abandon des charges, afin de permettre également à la Recourante de recourir utilement, y compris si elle estimait que le Ministère public devait poursuivre d'autres auteurs. En outre, l'admission d'un grief de nature formelle tel que la violation du droit d'être entendu impliquait, par essence, que notre Haute Cour n'avait pas tranché le fond du litige, pas plus qu'elle ne s'était prononcée sur les faits (consid. 2.3).
  • Dès lors, après l'arrêt de renvoi, l'état de fait n'était donc pas établi définitivement, pas plus que le droit n'avait été définitivement tranché si bien qu'ils ne pouvaient ainsi être couverts par l'autorité de l'arrêt de renvoi (consid. 2.3).  
  • Par ailleurs, le Tribunal fédéral a soulevé que son arrêt de renvoi visait également une nouvelle instruction. Les développements de l'arrêt avaient pour but de guider l'autorité, par économie de procédure, comme cela ressort de la formulation du dernier paragraphe du considérant 3.8 de l'arrêt TF 6B_819/2018. En outre, la seconde instruction impliquait que des faits nouveaux pouvaient être révélés par les mesures d'instruction, dont notamment l'implication d'autres auteurs ou participants. Un tel renvoi ne pouvait, à l'évidence, pas signifier que si, dans le cadre de ses investigations, le Ministère public découvrait des indices de commission d'une infraction par une autre personne que C., il ne pourrait poursuivre cette personne ou qu'il ne pourrait étendre son instruction à d'autres infractions en cas de découverte de nouveaux faits (consid. 2.3).
  • Notre Haute Cour a rappelé à cet égard que, conformément à l'art. 7 CPP, les autorités pénales sont tenues, dans les limites de leurs compétences, d'ouvrir et de conduire une procédure lorsqu'elles ont connaissance d'infractions ou d'indices permettant de présumer l'existence d'infractions. C'est par conséquent à tort que la cour cantonale a estimé que le principe de l'autorité de l'arrêt de renvoi empêchait l'examen des allégations de la Recourante quant à l'implication éventuelle d'autres personnes dans le complexe de faits litigieux (consid. 2.3).
  • S'agissant de l'infraction de faux dans les titres, le Tribunal fédéral a retenu que la cour cantonale ne pouvait pas non plus être suivie lorsqu'elle estimait que les investigations ne devaient se limiter qu'aux agissements de C. Outre que l'ensemble du raisonnement ci-dessus vaut mutatis mutandis pour cette infraction, celle-ci faisait, quoi qu'il en soit, l'objet d'une procédure séparée, instruite contre inconnu – ce qui ressort également de l'arrêt de renvoi – qui n'était pas objet de l'arrêt de renvoi. Cet arrêt ne pouvait donc, à l'évidence, limiter le pouvoir d'examen des autorités cantonales en relation avec cette infraction, même à suivre le raisonnement de la cour cantonale (consid. 2.3).
  • Concernant la procédure distincte menée contre B. SA, elle a été ouverte pour blanchiment d'argent. Le Tribunal fédéral a indiqué ignorer à ce stade si la Recourante était partie à cette procédure, tout comme en quoi le fait d'examiner l'implication de la banque dans le cadre de la procédure ici en cause se recouperait avec la procédure distincte menée contre B. SA pour blanchiment d'argent, la cour cantonale ne l'expliquant pas mais se contentant de l'affirmer. A cet égard, les faits constatés et la motivation cantonale ont été jugés insuffisants pour permettre au Tribunal fédéral de vérifier la bonne application du droit (cf. art. 112 LTF) (consid. 2.3).
  • Par ailleurs, le Tribunal fédéral a relevé que la motivation cantonale en tant qu'elle indique que la Recourante ne pouvait obtenir que le complément d'instruction s'étende à B. SA ou à tout autre participant éventuel, sauf « à maintenir artificiellement deux instructions distinctes qui poursuivraient les mêmes fins» apparaît peu claire, voire contradictoire (consid. 2.3). 
  • De deux choses l'une : soit la procédure séparée à laquelle se réfère la cour cantonale traite de l'ensemble des faits dénoncés par la Recourante comme constitutifs, selon elle, d'infractions dont elle serait directement lésée commises par des tiers (soit d'autres personnes ou entités que C.). Dans ce cas, il suffisait à la cour cantonale de l'exposer (de manière suffisamment motivée pour permettre la vérification par le Tribunal fédéral) et le classement de la procédure en faveur de C. – et uniquement en ce qui le concerne – se justifiait en raison de son décès. Soit la procédure séparée à laquelle se réfère la cour cantonale ne concerne que des faits potentiellement constitutifs de blanchiment d'argent (commis par la banque ou des tiers), ce qui semble être le cas au vu du reste de la motivation de l'arrêt cantonal et du résumé de la motivation de l'ordonnance de classement du Ministère public. Dans ce cas, on ne distingue pas en quoi cette procédure parallèle empêcherait d'examiner, dans la procédure ici en cause, l'implication éventuelle de tiers et de la banque dans les faits constitutifs d'autres infractions que le blanchiment (consid. 2.3).  
  • Quoi qu'il en soit, le Tribunal fédéral a considéré que la Recourante avait le droit, sous peine d'être victime d'un déni de justice, à ce que l'implication éventuelle de tiers dans les faits dont elle estimait qu'ils étaient constitutifs d'infractions dont elle serait directement lésée soit instruite ou, à tout le moins, qu'une décision soit expressément prise à ce sujet, libre aux autorités cantonales, qui ont décidé de multiplier les procédures, de choisir dans le cadre de laquelle elles statueront sur ces faits. En effet, la Recourante a déposé plainte pénale contre C. et contre toute autre personne impliquée. Dans cette mesure, elle avait le droit à ce qu'il soit statué sur ses plaintes en tant qu'elles sont dirigées contre inconnu – que ce soit dans le cadre de la procédure menée contre C. ou dans une procédure séparée (consid. 2.3).
  • Au vu de ce qui précède, le Tribunal fédéral a admis le recours, annulé l'arrêt attaqué et renvoyé la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision. Dans le cadre du renvoi de la cause, il incombera donc à la cour cantonale d'examiner si l'ensemble des faits dénoncés par la Recourante en tant qu'ils auraient été commis par des tiers ont effectivement été traités par l'ordonnance de classement du 11 février 2021. Si tel est le cas, elle devra statuer sur les griefs soulevés par la Recourante contre ce classement, y compris le refus des mesures d'instruction requises. Si tel n'est pas le cas, il lui incombera de renvoyer la cause au Ministère public pour qu'il statue sur cet aspect de la procédure, au besoin après instruction et examen des réquisitions de preuve (consid. 3).
  • On précisera au surplus que le Tribunal fédéral a admis un autre recours dans le cadre de la même cause portant sur la problématique du renvoi (TF 6B_1480/2021 du 12 janvier 2023).

TF 6B_495/2022 du 9 janvier 2023 | Divergences de motivation – violation du droit d'être entendu 

  • Le Ministère public du canton de Lucerne a classé une procédure pénale ouverte pour diffamation et calomnie contre B. et son avocat C.
  • , via son avocat, avait déposé une demande de séquestre contre le Recourant, A., et son épouse. Il y faisait notamment valoir l'accusation de faux dans les titres et de commission de délits de faillite. A. a recouru contre le classement, sans succès.
  • Sur le fond, le Recourant s'est plaint d'une violation de son droit d'être entendu, respectivement de l'obligation du juge de motiver sa décision (art. 29 al. 2 Cst. et art. 6 ch. 1 CEDH). L'instance inférieure aurait rejeté son recours sur la base d'une motivation totalement différente de celle de l'ordonnance de classement et imprévisible, laissant ainsi son argumentation non traitée (consid. 2.1).  
  • Il ressort des faits que le Ministère public a motivé le classement de la procédure par le fait que les déclarations litigieuses (i) se rapportaient exclusivement à l'activité professionnelle des fonctionnaires de D. SA et de E. SA, (ii) n'entraient pas dans le champ de protection des délits d'atteinte à l'honneur selon les art. 173 ss CP, (iii) étaient objectives, (iv) avaient été faites sur la base d'une incitation fondée. En outre, l'Intimée aurait agi dans le cadre d'une procédure judiciaire, raison pour laquelle les déclarations seraient justifiées par l'art. 14 CP (acte autorisé par la loi).  
  • En revanche, l'instance inférieure a soutenu que les propos litigieux ont tous été consignés sur le papier à en-tête de l'Etude de C. et signés par ce dernier. L'auteur des déclarations incriminées serait donc l'avocat de B. en tant que représentant de celui-ci. 
  • Le Tribunal fédéral a alors constaté que l'instance inférieure avait invoqué des motifs totalement différents de ceux invoqués par le Ministère public dans son ordonnance. Ce faisant, elle a déplacé le centre de l'argumentation sur un autre domaine des faits. En même temps, elle en a redéfini certains éléments et soulevé de nouveaux aspects juridiques (consid. 2.4.1).  
  • Le Tribunal fédéral a donc considéré qu'au vu du changement abrupt de la ligne d'argumentation, l'instance précédente aurait dû inviter les parties à prendre position au préalable. Rien dans la décision attaquée ne permet d'affirmer qu'une telle invitation aurait eu lieu. Par conséquent, la cour cantonale a violé le droit d'être entendu du Recourant (consid. 2.4.2).
  • Dans ces circonstances, le Tribunal fédéral a jugé qu'une réparation de la violation du droit d'être entendu n'entrait pas en ligne de compte (consid. 2.5).
  • Partant, le recours a été admis, l'arrêt attaqué annulé et la cause renvoyée à l'autorité précédente pour nouvelle décision (consid. 3).
  1. DROIT PÉNAL ÉCONOMIQUE
  2. DROIT INTERNATIONAL PRIVÉ
  3. DROIT DE LA POURSUITE ET DE LA FAILLITE
  4. ENTRAIDE INTERNATIONALE

TF 1C_25/2023 du 9 janvier 2023 | Irrecevabilité du recours en matière d'entraide pénale vers la France (art. 84 LTF) 

  • Par décision de clôture du 22 septembre 2021, le Ministère public du canton du Valais a ordonné la transmission, à la Cour d'appel de Rouen, des procès-verbaux d'auditions du Recourant, ainsi que de la documentation remise à ces occasions. Cette transmission intervient en exécution d'une demande d'entraide judiciaire formée dans le cadre d'une enquête ouverte contre Waeffler pour banqueroute et détournements. Par arrêt du 30 décembre 2022, la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral a rejeté le recours formé par le Recourant. La commission rogatoire émanait de la Cour d'appel de Rouen – autorité compétente pour une telle transmission – et la question de la compétence répressive de l'Etat requérant devait être soulevée devant les autorités françaises. Il en allait de même de l'objection tirée du fait que le Recourant ne se serait pas vu, avant ses auditions, notifier ses droits selon la législation française. Les questions posées au Recourant, selon un questionnaire fourni par l'autorité requérante, respectaient le principe de la proportionnalité. 
  • Agissant par la voie du recours en matière de droit public, le Recourant a demandé au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt de la Cour des plaintes, de rejeter la demande d'entraide judiciaire et de refuser la transmission des deux procès-verbaux d'auditions et les documents y relatifs.
  • Le Tribunal fédéral a dû trancher la question de la recevabilité du recours au sens de l'art. 84 LTF (consid. 1 ss).
  • Le Tribunal fédéral a considéré que le cas ne revêtait aucune importance particulière, compte tenu des faits à l'origine de la demande (des agissements qualifiés de banqueroute et de détournements) et de la nature de la transmission envisagée (limitée à des procès-verbaux d'auditions et des documents remis par le Recourant), quand bien même la transmission de documents touchait le domaine secret (consid. 1.1).
  • Par ailleurs, le Tribunal fédéral a retenu que la question de la compétence de l'autorité requérante, qu'il s'agisse de la compétence répressive proprement dite ou de la faculté de présenter une demande d'entraide judiciaire, est présumée. Dès lors, c'est aux autorités de l'Etat requérant de tirer les conséquences d'un éventuel défaut de compétence de l'instance requérante (consid. 1.2).  
  • Il en va de même de la question de la notification des droits avant les auditions du Recourant. Notre Haute Cour a relevé que le Recourant ne s'était pas plaint d'une violation de ses droits dans la procédure d'exécution en Suisse, dès lors que les exigences des art. 157 et 158 CPP (applicables par renvoi de l'art. 12 al. 1 EIMP) ont été respectées. C'est donc aux autorités de l'Etat requérant qu'il appartiendra de tirer les conséquences de l'irrégularité dont se plaint le Recourant. On ne saurait en tout état discerner de violation grave susceptible de justifier une entrée en matière (consid. 1.3).
  • Enfin, le Tribunal fédéral a considéré que la violation alléguée du principe de la proportionnalité ne saurait faire de la présente cause un cas particulièrement important. L'autorité d'exécution s'en est tenue à la liste de questions présentée par l'autorité requérante et la Cour des plaintes a appliqué le principe de l'utilité potentielle conformément à la jurisprudence constante (consid. 1.4).  
  • Partant, le recours était irrecevable (consid. 2).

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