Tandis que la future administration Trump se prépare à prendre ses fonctions, de nombreuses évolutions, tant au niveau réglementaire qu'en matière de mise en Suvre des règlementations par les autorités américaines compétentes sont d'ores et déjà prévisibles.
Au-delà des incertitudes existantes, des divergences entre l'administration Biden et la deuxième administration Trump peuvent d'ores et déjà être identifiées. De même, des disparités entre le régime américain et ceux de ses alliés sont à prévoir.
1 Vers un renforcement du contrôle des
investissements étrangers – CFIUS
Les investisseurs non américains, en particulier chinois et
d'autres concurrents stratégiques, doivent se
préparer à faire face à des obstacles
réglementaires complexes et changeants liés au
Comité sur les investissements étrangers aux
États-Unis (« CFIUS
»), département inter-agences comprenant les
départements du Commerce, de la Défense et du
Trésor des États-Unis, et ce, pour un champ plus
large de technologies.
1.1 Constats antérieurs
Lors de son premier mandat, l'administration Trump a
concentré ses efforts de contrôle des investissements
sur la protection des technologies émergentes, notamment
l'intelligence artificielle, les semi-conducteurs et les
réseaux 5G.
De même, Donald Trump s'est fait le champion de politiques agressives à l'égard de la Chine, invoquant des préoccupations liées au vol de propriété intellectuelle, à l'espionnage et à la sécurité nationale. Dans ce contexte, le CFIUS a joué un rôle déterminant dans le blocage de plusieurs acquisitions chinoises très médiatisées. En outre, la compétence du comité a été considérablement élargie en vertu de la « Foreign Investment Risk Review Modernization Act » (« FIRRMA ») de 2018, pour y inclure les investissements non-contrôlants ainsi que les transactions immobilières à proximité de sites militaires sensibles.
L'administration Biden a, quant à elle, renforcé la surveillance des investissements étrangers chinois dans les entreprises technologiques critiques et émergentes, en particulier dans le domaine des sciences de la vie et de l'intelligence artificielle.
1.2 Tendances prospectives
1.2.1 La feuille de route conservatrice « Project 2025
»
Le « Project 2025 » publié dès avril 2023
par le think thank conservateur Heritage Foundation est
une feuille de route conservatrice1 qui a attiré
une attention considérable lors de la dernière
élection présidentielle américaine. Cette
feuille de route appelle notamment au renforcement du
CFIUS par le biais des mesures suivantes :
- élaboration d'un programme de supervision plus robuste des mesures d'atténuation ;
- l'extension de sa compétence aux « greenfield investments » ; et
- le renforcement des sanctions imposées en cas d'infraction à la réglementation.
1.2.2 Maintien et renforcement du contrôle des
investissements dans les secteurs
stratégiques
Compte tenu de l'attachement de Donald Trump aux politiques
« America First », le CFIUS
continuera certainement d'examiner de près les
investissements dans les secteurs stratégiques. Ainsi, il
est à prévoir que le CFIUS adopte une
position stricte à l'égard des acquisitions
étrangères susceptibles de compromettre la
suprématie technologique des États-Unis.
Dans ce contexte, l'influence de certains conseillers de Donald Trump, figures de la Tech, comme Elon Musk, demeure incertaine. Toutefois, il convient de s'attendre à ce que ces derniers tentent d'exercer une influence en faveur de l'innovation aux fins que cette dernière ne souffre pas des restrictions d'investissement. A ce titre, la nomination attendue de Scott Bessent, dirigeant de fonds spéculatifs, au poste de secrétaire au Trésor devrait être un soulagement pour les investisseurs non américains. Ce dernier étant davantage susceptible de favoriser la stabilité du commerce et de l'investissement international que d'autres candidats potentiels. Le CFIUS pourrait ainsi faire preuve de plus de modération dans l'application de la règlementation, en particulier pour les investisseurs des pays alliés.
1.2.3 Maintien d'une surveillance accrue des
investissements chinois
Il convient de s'attendre à ce que la deuxième
administration Trump poursuive les efforts de l'administration
Biden en matière de surveillance des investissements
étrangers en provenance de Chine et d'autres pays
considérés comme des menaces pour la
sécurité nationale. Dans ce contexte, le
CFIUS continuera de jouer un rôle central.
La deuxième administration Trump maintiendra et intensifiera très certainement la surveillance des investissements chinois. Avec la rhétorique persistante de Donald Trump sur la Chine en tant qu'adversaire stratégique, les examens du CFIUS sur les transactions chinoises pourraient se renforcer, notamment concernant des secteurs plus traditionnels de l'économie, tels que l'industrie manufacturière. De plus, il est probable que ces contrôles renforcés concernent des entités basées en dehors de Chine, mais détenues ou contrôlées par des personnes chinoises.
1.2.4 Elargissement des transactions soumises à
un signalement obligatoire
Des mesures législatives ou exécutives additionnelles
pourraient être prises par la nouvelle administration Trump
pour renforcer à nouveau les pouvoirs du CFIUS,
notamment en élargissant le champ des transactions devant
faire l'objet de signalements obligatoires.
Pourraient ainsi être intégrés à son champs de compétence, certains investissements immobiliers ou des technologies sensibles qui ne font pas, à date, l'objet de mesures de contrôle des exportations significatives (justifiant de ce fait un dépôt obligatoire auprès du CFIUS).
1.2.5 Utilisation du CFIUS comme outil de politique
étrangère
La deuxième administration Trump utilisera également
probablement le CFIUS comme un outil permettant de faire
avancer les objectifs de politique étrangère des
États-Unis.
A titre d'exemple, l'administration Trump pourrait pousser ses alliés à mettre en Suvre des régimes d'examen des investissements étrangers (entrants) ou des investissements sortants plus stricts, en échange d'exemptions pour leurs ressortissants du processus d'examen du CFIUS.
Le CFIUS pourrait également devenir un instrument de protectionnisme clef pour examiner les investissements étrangers de ressortissants de pays alliés des États-Unis (e.g. le Japon ou encore l'Union Européenne, le Canada et le Mexique), susceptibles d'entraîner un changement de contrôle des entreprises manufacturières et énergétiques américaines au profit de propriétaires étrangers, comme cela a été le cas avec le projet de rachat de U.S. Steel par Nippon Steel.
En outre, le style de leadership peu orthodoxe de
Donald Trump pourrait donner lieu à des interventions plus
motivées politiquement dans les décisions du
CFIUS, en particulier dans les cas très
médiatisés comme précédemment vu avec
le cas TikTok.
2 La politique américaine en
matière de sanctions économiques
La préférence de Donald Trump pour l'action
unilatérale au détriment de la diplomatie
multilatérale laisse à penser que le second mandat de
Donald Trump donnera lieu à un recours accru aux sanctions
économiques unilatérales par les
États-Unis.
Il est recommandé aux entreprises engagées dans le commerce international, réalisant des investissements internationaux ou recevant des investissements étrangers, de continuer à faire preuve de diligence dans leurs efforts de mise en conformité aux sanctions économiques américaines.
2.1 Constats antérieurs
Sous la première administration Trump, les sanctions
économiques ont été utilisées dans un
double objectif :
- faire avancer les objectifs de sécurité nationale et de politique étrangère ; et
- renforcer les politiques fondées sur le principe de « America First ».
Si D. Trump a fait part de son désir d'améliorer les relations avec la Russie, lors de son premier mandat, son administration a imposé d'importantes sanctions à l'égard de personnes et entités russes au cours de son premier mandat. En outre, l'une des caractéristiques du premier mandat de Trump a été la campagne de « pression maximale » contre l'Iran, destinée à contraindre Téhéran à renégocier le Joint Comprehensive Plan of Action (« JCPOA ») et à limiter son influence régionale.
S'agissant de l'administration Biden, de nombreux praticiens et observateurs en matière de sanctions économiques s'accordent pour indiquer que le président sortant a, durant toute la durée de son mandat, cherché à obtenir une coopération multilatérale lors de l'imposition de sanctions économiques, s'éloignant ainsi de l'approche unilatérale que l'administration Trump privilégiait. Cette critique, dans la mesure où elle s'applique principalement, si ce n'est exclusivement, aux sanctions adoptées contre la Russie doit, pour autant, être nuancée. En effet, alors que le niveau de coordination de l'administration Biden avec les alliés sur les sanctions contre la Russie a été sans précédent, dans la majorité des autres programmes de sanctions des États-Unis, une divergence politique significative avec les alliés a été, et continuera probablement d'être sous une deuxième administration Trump, la norme. Pour rappel, la majorité des alliés n'ont pas, ou de manière limitée, de sanctions à l'égard des principales cibles américaines, telles que Cuba, l'Iran et le Venezuela.
2.2 Tendances prospectives
2.2.1 Alignement des sanctions sur la politique
étrangère de D. Trump
2.2.1.1 A l'égard de la Russie
L'administration Trump ajustera probablement les sanctions économiques américaines pour les aligner sur sa politique étrangère, en commençant par une réévaluation de l'approche américaine contre la Russie.
Depuis l'invasion de l'Ukraine par la Russie, l'administration Biden a étendu les sanctions économiques à de nombreux secteurs de l'économie russe et a largement utilisé les sanctions contre les ressortissants et les entreprises russes susceptibles d'opérer dans les secteurs stratégiques de l'économie russe.
Récemment, l'administration Biden s'est concentrée sur l'imposition de sanctions secondaires à l'encontre de personnes (notamment chinoises) soupçonnées d'assister la Russie à des fins de contournement des sanctions. L'administration Trump pourrait ainsi chercher à renforcer la position américaine à l'égard des efforts d'évasion et de contournement des sanctions économiques, tout en affirmant sa volonté d'offrir à la Russie un allègement des sanctions en échange de la négociation de la fin du conflit en Ukraine.
Un second mandat de Trump pourrait effectivement conduire à un maintien des sanctions contre la Russie afin d'améliorer la position de négociation de l'Ukraine (et, indirectement, de l'OTAN) avec la Russie. En outre, la pression des sanctions pourrait s'accroître sur d'autres alliés de la Russie, dont la Biélorussie, l'Iran et d'autres États perçus comme soutenant les politiques du Kremlin.
2.2.1.2 A l'égard de la Chine
Une escalade des sanctions ciblant des entités chinoises est à prévoir au cours de la seconde administration Trump, notamment contre des entreprises accusées de violations des droits de l'Homme dans la région du Xinjiang.
S'agissant des sanctions contre la Chine, l' « Office of Foreign Assets Control » (« OFAC ») du département du Trésor américain n'a pas institué de programme de sanctions spécifiques à la Chine. En effet, jusqu'alors, l'OFAC a utilisé des pouvoirs de sanction existants pour cibler les personnes et entités chinoises. A ce titre, l'administration Trump pourrait également accroître la pression sur la Chine avec un programme de sanctions plus ciblé contre certains secteurs de l'économie chinoise (sans pour autant établir de sanctions globales contre la Chine), notamment dans les entreprises liées au complexe militaro-industriel chinois.
2.2.1.3 A l'égard de l'Iran et du
Venezuela
Dans la continuité de son précédent mandat, et
en particulier si les efforts diplomatiques avec les régimes
visés restent au point mort, les sanctions contre les
secteurs iraniens de l'énergie, de la finance et des
transports s'intensifieront probablement, avec de potentielles
nouvelles mesures visant ses alliés et ses partenaires
commerciaux.
Aussi, s'agissant du Venezuela, le renforcement des sanctions économiques pour mettre fin au régime Maduro pourrait être lié aux efforts visant à restreindre l'immigration, des centaines de milliers de personnes ayant fui le Venezuela pour se rendre aux Etats-Unis au cours des dernières années.
2.2.2 Utilisation de sanctions
secondaires
Étant donné que la marge de manSuvre pour renforcer
les sanctions primaires à l'encontre de l'Iran et de
la Russie apparait relativement faible, il est à
prévoir que l'utilisation de sanctions secondaires pour
contraindre des tiers à se conformer aux objectifs des
Etats-Unis soit un élément clef de la future
politique de sanctions économiques de l'administration
de Trump.
2.2.3 Utilisation des sanctions économiques au service de la doctrine « America First »
Lors du second mandat, les sanctions économiques pourraient être davantage utilisées pour satisfaire les partisans de cette idéologie de nationalisme économique.
Notamment, pourraient être ciblés des pays accusés de pratiques commerciales déloyales ou de ne pas contrôler l'immigration. Les sanctions économiques pourraient également être utilisées pour soutenir des promesses électorales clefs, telles que la protection des emplois américains ou la mise à mal d'adversaires étrangers.
3 La politique américaine en matière de
contrôle des exportations
Au même titre que pour les sanctions économiques, une
deuxième administration sera probablement marquée du
sceau de l'intensification des contrôles des exportations
en tant qu'outil central de la politique économique et
de sécurité nationale des États-Unis,
reflétant l'engagement à sauvegarder le
leadership technologique des États-Unis et à
contrer les adversaires stratégiques. Par conséquent,
les entreprises engagées dans le commerce international, en
particulier dans les secteurs sensibles, doivent se préparer
à des réglementations plus strictes et à des
exigences de conformité accrues.
3.1 Constats antérieurs
Au cours de son premier mandat, Donald Trump a cherché
à restreindre l'accès de la Chine aux
technologies américaines en matière de
semi-conducteurs et a mis en place une liste noire
d'entreprises engagée dans des violations des droits de
l'homme ou faisant partie du complexe militaro-industriel
chinois. De plus, la première administration Trump a
renforcé les contrôles de l'utilisation finale et
de l'utilisateur final pour prévenir l'utilisation
abusive de la technologie américaine dans des applications
militaires ou de surveillance.
Le « Project 2025 » contient de nombreuses critiques à l'égard des 20 dernières années de politique américaine de contrôle des exportations notamment en matière de contrôle des exportations de biens à double usage. Une brève mention de l'« International Traffic in Arms Regulations » (« ITAR ») recommande de réduire les réglementations ITAR pour faciliter le commerce avec des alliés tels que le Royaume-Uni, le Canada et l'Australie.
Les auteurs du « Project 2025 » appellent également :
- au revirement de la « Export Control Reform » (votée sous l'administration Obama) et à l'élimination du concept de « spécialement conçu », que les auteurs qualifient curieusement de « faille » ;
- à la mise en Suvre de contrôles unilatéraux des exportations ;
- à faire pression sur les alliés pour qu'ils mettent en Suvre des politiques complémentaires ;
- à une augmentation des rapports au Congrès sur les activités d'octroi de licences d'exportation ;
- à un renforcement des contrôles d'utilisation finale ;
- à des efforts de modernisation réglementaire ;
- à des politiques d'octroi de licences plus strictes à l'égard de la Chine et de la Russie ;
- ainsi que l'élargissement de la Entity List et d'autres listes de contreparties désignées.
3.2 Tendances prospectives
3.2.1 Renforcement des restrictions sur les exportations vers des
entités chinoises
La Chine devrait rester au centre de la politique de contrôle des exportations d'une deuxième administration Trump.
Cette dernière pourrait ainsi renforcer les restrictions visant les exportations vers des entités chinoises, notamment en :
- élargissant la Entity List et d'autres listes de contreparties désignées ; et
- renforçant les politiques d'octroi de licences pour certaines technologies à double usage.
3.2.2 Potentiel alignement du contrôle des
exportations sur les régimes des pays
alliés
Afin de s'assurer que l'industrie américaine ne soit
pas désavantagée par des concurrents non
américains opérant sous des régimes de
contrôle des exportations plus cléments, et alors
même que l'approche de l'administration Trump
précédente en matière de commerce
international était souvent unilatérale, les
contrôles à l'exportation pourraient faire
l'objet d'une plus grande coordination avec les principaux
alliés.
Afin de présenter un front uni contre les nations adverses qui acquièrent des technologies sensibles, en particulier les semi-conducteurs, les technologies quantiques et les technologies liées à l'intelligence artificielle, ces efforts d'alignement viseraient notamment les politiques :
- de l'Union européenne ;
- du Japon ; et
- de la Corée du Sud.
Cet alignement pourrait inclure des activités de mises en Suvre conjointes.
3.2.3 Renforcement des contrôles relatifs aux
utilisations finales et aux utilisateurs finaux
Le second mandat de Trump pourrait viser un nouveau renforcement
des contrôles de l'utilisation finale et de
l'utilisateur final pour prévenir l'utilisation
abusive de la technologie américaine dans des applications
militaires ou de surveillance.
3.2.4 Durcissement du contrôle en lien avec un
repli sur la production nationale
Les contrôles des exportations sous une seconde
administration Trump pourraient également servir des
objectifs économiques plus larges, tels que, par exemple
:
- des restrictions sur les exportations de technologies associées à des initiatives visant à inciter la production nationale ; et
- le rapatriement des chaînes d'approvisionnement et la réduction de la dépendance à l'égard de la production étrangère dans les secteurs stratégiques.
3.2.5 Rationalisation du processus d'octroi de
licences d'exportation
Aux fins de garantir la conformité, sans entraver la
compétitivité, une deuxième administration
Trump pourrait poursuivre des réformes visant à
rationaliser les processus d'octroi de licences et à
réduire les charges administratives pour les entreprises
américaines.
De telles réformes s'inscriraient dans la feuille de route de la nouvelle administration sur l'efficience et l'efficacité des opérations gouvernementales (comme en témoigne la création du « Department of Government Efficiency »).
4 La politique américaine en matière de
lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du
terrorisme (« LCB-FT »)
4.1 Constats antérieurs
Aux États-Unis, un consensus bipartite s'est
dégagé autour du renforcement des
réglementations relatives à la lutte contre le
blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme («
LCB-FT») ainsi qu'en matière de
connaissance du client (« KYC
») dans l'ensemble du secteur financier. En effet, la
législation LCB-FT la plus marquante de ces dernières
années, l' « Anti-Money Laundering Act of
2020 » (« AMLA »),
a été adoptée par une majorité
qualifiée du Congrès à la fin de la
dernière administration Trump.2
De plus, l'entrée en vigueur du « Corporate Transparency Act » (« CTA ») à compter du 1er janvier 2024 est également significatif, notamment eu égard à son articulation avec le régime européen de déclaration des bénéficiaires effectifs.3
En Europe, la 6ème directive AML4 adoptée en 2024 (à transposer par les États membres) renforce l'obligation actuelle pour les États membres de créer et de tenir à jour des registres des bénéficiaires effectifs (« UBO ») (chaque registre étant interconnecté avec un système dédié) en prévoyant (i) des processus de vérification en cas de doute sur l'exactitude des informations fournies relatives à l'UBO et (ii) des pouvoirs spécifiques pour les entités gérant les registres.
Il est dans ce contexte intéressant de constater que le « Project 2025 » appelle explicitement à l'abrogation de la CTA.
4.2 Tendances prospectives
4.2.1 Faible probabilité d'assouplissement des
règlementations LCB-FT
Il apparait peu probable que la future administration Trump tente de réduire de manière significative la règlementation LCB-FT et les poursuites engagées sur ce fondement.
En effet, en raison du consensus existant parmi les décideurs politiques à Washington concernant l'opportunité d'un régime de lutte contre le blanchiment de capitaux robuste aux fins de lutter contre le financement du terrorisme et le blanchiment des produits du trafic de stupéfiants, une telle tentative semble peu probable.
Toutefois, il est possible qu'une administration Trump réexamine de nouvelles réglementations, telles que la CTA, qui ont un impact plus important que prévu sur les entreprises. Cependant, cette réglementation, ayant été adoptée avec un large soutien bipartite, il apparait difficile de l'abroger, en particulier au regard de la faible majorité républicaine dans les deux chambres. De plus, le Département du Trésor américain pourrait utiliser l'autorité que lui confère la CTA pour créer des catégories supplémentaires d'exemptions de déclaration afin d'alléger le fardeau que représente la loi pour les petites entreprises.
4.2.2 Potentiels domaines de discorde entre les Etats-Unis et l'Union Européenne
Les divergences anticipables entre les régimes de sanctions économiques américaines et ceux du reste du monde poseront des défis de conformité pour les institutions financières internationales qui ont des succursales aux États-Unis ou qui entretiennent des relations de correspondance bancaire avec des banques américaines.
En effet, l'utilisation accrue des règlementations LCB-FT par les régulateurs américains pourrait également entraîner une augmentation des contrôles visant des entités non américaines. En effet, il est notamment recommandé aux institutions financières européennes soumises à la juridiction américaine d'être attentives à la portée extraterritoriale du programme « US's AML whistleblower program ». 5
Un autre domaine dans lequel des divergences pourraient
apparaitre est celui des réglementations LCB-FT entourant
l'industrie des crypto-monnaies. La future administration Trump
semble être très favorable à cette industrie,
et pourrait ne pas être disposée à envisager
des efforts supplémentaires pour accroître la
transparence dans l'industrie des crypto-monnaies. Cela entrera
de manière évidente en conflit avec les obligations
des institutions financières de l'UE notamment eu
égard aux récentes réglementations de
l'UE, entrées en vigueur ces derniers mois (MiCA,
nouveau paquet règlementaire LCB-FT). Ainsi, un
régime réglementaire plus souple aux
États-Unis pourrait se traduire par un plus grand nombre de
transactions en crypto-monnaies transitant par les
États-Unis dans le but d'échapper aux exigences
réglementaires européennes plus strictes.
Footnotes
1 Rédigée ni par le groupe de campagne de D. Trump, ni par le parti républicain.
2 Cette loi appelle à une coopération internationale accrue entre les États-Unis et les pays étrangers afin de promouvoir le respect des meilleures pratiques internationales en matière de LCB. Elle renforce également les sanctions civiles et pénales prévues par les lois américaines en cas de violation de certaines lois anti-blanchiment réglementant le secteur bancaire et renforce la capacité des régulateurs à collecter des données et promeut des protections pour les lanceurs d'alerte alertant sur des violations des lois LCB.
3 Cette loi a créé une obligation d'enregistrement fédéral de la propriété effective de certaines entités juridiques enregistrées en vertu des lois américaines, y compris les entités constituées en dehors des États-Unis qui s'enregistrent pour faire des affaires dans un État américain ou une entité tribale par le biais du dépôt d'un document auprès d'un secrétaire d'État ou d'un bureau similaire.
4 Directive (UE) 2024/1640 du Parlement européen et du Conseil du 31 mai 2024 relative aux mécanismes à mettre en place par les États membres pour prévenir l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme.
5 Ce programme est supervisé par le Département du Trésor des États-Unis, qui récompense les personnes basées n'importe où dans le monde qui fournissent des informations clefs au Trésor sur des violations des lois LCB sous réserve que l'enquête aboutisse.
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