L’issue de votre succession après votre décès pourrait dépendre moins de la planification que vous aurez effectuée de votre vivant que de ce que votre testament autorisera réellement les autres à faire en votre absence. Même le plan successoral le mieux réfléchi peut échouer si le testament n’est pas rédigé dans une perspective de flexibilité et d’efficience fiscale et ne prévoit aucune stratégie à mettre en œuvre après le décès. Résultat? Des occasions manquées, des impôts excessifs et des conséquences imprévues pour vos héritiers.
Le présent article est le premier d'une série consacrée aux stratégies qui permettent aux familles, aux exécuteurs testamentaires et aux conseillers canadiens de tirer parti de la planification d'héritage dans un environnement juridique et fiscal de plus en plus complexe. Nous analyserons la jurisprudence et les modifications législatives récentes, puis nous examinerons les meilleures pratiques à adopter pour que votre testament ne soit pas simplement le reflet de vos volontés, mais qu'il permette également à vos héritiers de passer à l'action.
En quoi consiste exactement la planification d'héritage?
La planification d'héritage s'entend des stratégies juridiques et fiscales qui peuvent être mises en Suvre après le décès d'une personne dans le but de réduire au minimum le montant total des impôts à payer, d'éviter la double, voire la triple imposition et d'assurer un transfert harmonieux et efficace du patrimoine aux bénéficiaires. En général, il s'agit essentiellement de gérer de manière fiscalement avantageuse le transfert d'actifs à faible coût et à forte valeur ajoutée – souvent des actions de sociétés privées.
Pourquoi un testament bien rédigé est-il la clé de la flexibilité après le décès?
Par définition, la planification d'héritage s'effectue après le décès, mais son succès dépend dans bien des cas des choix qui ont été faits bien avant ce moment. Un testament n'est pas qu'une simple formalité juridique; c'est le document qui permet à vos représentants personnels, à vos bénéficiaires et à leurs conseillers professionnels d'agir. Si les bons outils ne sont pas intégrés dans le testament, même les meilleurs conseillers peuvent se trouver dans l'incapacité de redresser une structure d'actifs inadéquate, d'éviter les pièges fiscaux ou de concrétiser efficacement vos intentions.
Obstacles courants à surmonter :
- actifs dont le mode de détention restreint la flexibilité ou la planification fiscale;
- restrictions imprévues applicables aux transferts d'actions de sociétés privées; et
- testaments dépourvus de dispositions autorisant les choix fiscaux ou les réaffectations d'actifs après le décès.
Résultat? Des impôts plus élevés à payer, une complexité accrue et des conséquences potentiellement injustes ou imprévues pour vos bénéficiaires.
Le présent article traite des principaux éléments que les testateurs et leurs conseillers doivent prendre en considération au moment de rédiger un testament.
Nomination des exécuteurs et des fiduciaires
Il arrive trop souvent que le choix des exécuteurs testamentaires et des fiduciaires se porte par défaut sur le conjoint, les enfants ou d'autres membres de la famille immédiate du testateur. La plupart du temps, ces choix sont motivés par l'émotion plutôt que par des considérations pratiques. Le conjoint survivant qui possède une connaissance approfondie et une vaste expérience des actifs et des affaires du défunt peut être très bien placé pour agir à titre d'exécuteur testamentaire. Cependant, il arrive tout aussi souvent que le conjoint (ou les enfants) ne possède pas les connaissances, la sagesse, le sang-froid, l'expertise et les compétences nécessaires pour gérer un processus complexe d'administration d'une succession.
Avant de choisir les exécuteurs testamentaires et les fiduciaires, il faut discuter de ces facteurs, et le faire avec les personnes pressenties pour occuper ces fonctions. Ces dernières pourraient ne pas souhaiter assumer la responsabilité inhérente à ces fonctions, et la possibilité de nommer une société de fiducie ou un fiduciaire professionnel devrait presque toujours être envisagée.
Maintien du statut de succession assujettie à l'imposition à taux progressifs
Opter pour le statut de « succession assujettie à l'imposition à taux progressifs » (« SAIP ») peut procurer des avantages fiscaux importants aux bénéficiaires. Un testament qui accorde aux exécuteurs testamentaires et aux fiduciaires une grande latitude pour choisir et maintenir le statut de SAIP peut s'avérer un formidable outil de planification.
Par exemple, le testament peut interdire aux exécuteurs testamentaires et aux fiduciaires de prendre des mesures qui compromettraient le statut de fiducie testamentaire de la succession. Par ailleurs, si les exécuteurs testamentaires et les fiduciaires ont reçu comme directives de maintenir le statut de SAIP, il peut être plus facile de gérer les attentes des bénéficiaires en ce qui concerne la disposition anticipée ou prématurée des actifs de la succession.
Pouvoirs des fiduciaires : ce qui rend souvent les clauses types insuffisantes
Les exécuteurs testamentaires et les fiduciaires disposent de certains pouvoirs inhérents qui leur sont conférés par la loi, mais l'étendue de leur autorité dépend des dispositions du testament. Bien que certains pouvoirs soient conférés par la loi provinciale, de nombreuses mesures essentielles à la mise en Suvre d'un plan d'héritage exigent une autorisation expresse dans le testament lui-même.
Il est donc essentiel que le rédacteur du testament définisse soigneusement l'étendue des pouvoirs du fiduciaire. D'une part, les administrateurs doivent disposer de pouvoirs suffisamment étendus pour être en mesure d'accomplir les actes essentiels. D'autre part, les pouvoirs accordés au fiduciaire ne doivent pas être étendus à un point tel que ce dernier peut agir à l'encontre des intentions du testateur.
La plupart des rédacteurs de testaments comprennent que les exécuteurs testamentaires et les fiduciaires doivent se voir expressément accorder un pouvoir de vente. Cependant, il est généralement nécessaire de leur accorder également des pouvoirs étendus, tels que :
- le pouvoir d'exercer des activités; et
- le pouvoir d'exercer tous les droits et de respecter toutes les obligations liés à la détention d'actions d'une société privée.
Un rédacteur de testaments chevronné dans les domaines du droit fiscal, du droit des biens, du droit des sociétés, des réorganisations d'entreprises, des pertes en capital et de la technique de planification fiscale appelée « pipeline » peut fournir un excellent service à son client en : (1) prévoyant les pouvoirs dont les exécuteurs testamentaires et les fiduciaires auront besoin; et (2) rédigeant des clauses exhaustives relatives aux pouvoirs qui empêcheront toute contestation de la portée et de l'étendue des pouvoirs des exécuteurs testamentaires et des fiduciaires.
Par exemple, il pourrait être souhaitable d'exempter les exécuteurs testamentaires et les fiduciaires des restrictions légales applicables aux investissements. Il peut être difficile pour un exécuteur testamentaire et un fiduciaire de respecter la règle de l'investisseur prudent – et l'obligation connexe de diversifier les placements – si le seul actif important géré se compose d'actions illiquides d'une société privée. Il pourrait également être nécessaire d'exempter les exécuteurs testamentaires et les fiduciaires de leurs obligations de vendre les actifs consomptibles ou dangereux, car ces obligations pourraient limiter considérablement leur capacité à gérer certains actifs ou à en disposer dans le cadre d'un plan d'héritage global.
Legs – Spécifiques et résiduels
Lorsque le testateur opte délibérément pour le recours à des dispositions de roulement spécifiques de la loi de l'impôt sur le revenu, il peut être approprié de désigner certains biens et actifs à léguer à une personne admissible particulière, par exemple le conjoint survivant. Hors de cette exception, toutefois, le testateur doit évaluer soigneusement si le legs de certains biens ou actifs pourrait entraîner un déséquilibre entre les actifs légués et l'impôt y afférent, ou limiter la capacité des exécuteurs testamentaires et des fiduciaires à gérer ces actifs dans le cadre d'un plan global de réorganisation après le décès.
Le testateur doit également vérifier si les dispositions du testament sont conformes aux restrictions en matière de transfert, telles que celles prévues dans une convention d'actionnaires à laquelle le testateur est partie.
Si le testateur souhaite que ses actifs soient transférés à une fiducie de conjoint admissible, les dispositions du testament doivent être soigneusement rédigées de façon que toutes les conditions d'admissibilité soient remplies, que la fiducie ne soit pas viciée et que les actions commises par les exécuteurs testamentaires et les fiduciaires dans l'administration de la fiducie soient conformes à ces conditions d'admissibilité.
L'essentiel à retenir : comment assurer la pérennité de votre plan successoral grâce à un testament bien rédigé
- Un testament est plus qu'un simple document — c'est la boîte à outils de votre exécuteur testamentaire. Sans les dispositions adéquates, même le meilleur plan d'héritage peut rater ses objectifs.
- La planification d'héritage débute de votre vivant. Les choix que vous faites aujourd'hui – qu'il s'agisse du mode de détention de vos actifs ou des pouvoirs accordés dans votre testament – déterminent ce qui pourra être fait après votre décès.
- Les pouvoirs des fiduciaires doivent être adaptés à chaque situation, non standardisés. Les clauses types ne permettent pas toujours aux exécuteurs testamentaires et aux fiduciaires de prendre les mesures qui s'imposent sur le plan commercial et fiscal et le plan des réorganisations pour réduire l'impôt et préserver la valeur de la succession.
- Le choix des exécuteurs testamentaires est une décision stratégique. Les choix émotionnels peuvent entraîner des casse-tête administratifs. Envisagez la possibilité de faire appel à des fiduciaires professionnels ou institutionnels pour gérer les successions complexes.
- Maintenir le statut de SAIP. Un testament bien rédigé permet de conserver les avantages fiscaux et de gérer les attentes des bénéficiaires quant au calendrier de distribution des actifs.
- Éviter une charge fiscale imprévue grâce à des legs soigneusement consentis. Les dons spécifiques doivent tenir compte des obligations connexes, des restrictions applicables au transfert ainsi que des possibilités de roulement, en particulier lorsqu'il s'agit de fiducies de conjoint ou testamentaires.
- Les nuances juridiques ont leur importance. Qu'il s'agisse de la structure du capital social ou de la planification des pertes en capital, votre testament doit refléter une stratégie juridique et fiscale intégrée, plutôt qu'une approche uniforme.
The content of this article is intended to provide a general guide to the subject matter. Specialist advice should be sought about your specific circumstances.