- within Insurance topic(s)
- with readers working within the Healthcare industries
L'employée, qui travaillait depuis 30 ans au sein d'une société de commerce de produits agricoles, occupait le rôle de marchandiseuse et coordonnatrice de la logistique. Au moment de son congédiement, elle était l'une des deux employés de l'entreprise (l'autre étant le propriétaire de l'entreprise). L'employeur lui a accordé un préavis travailléde 13 mois1.
Le 8 avril2025, le propriétaire de l'entreprise a informé l'employée qu'il envisageait de prendre sa retraite et qu'il ne souhaitait plus exploiter l'entreprise. Il lui a alors proposé deux options: 1) acheter l'entreprise pour un prix symbolique et en reprendre les rênes; ou 2) accepter que son emploi prenne fin une fois l'entreprise liquidée.
L'employée a retenu les services d'un avocat. Le 14 avril, l'avocat de l'employée a envoyé une mise en demeure à l'employeur pour lui demander un préavis de 24 mois.
Le 29 avril, l'employeur a officiellement avisé l'employée que son emploi prendrait fin 13 mois plus tard, soit le 31 mai 2026.
Le 5 mai, l'avocat de l'employée a envoyé une deuxième mise en demeure.
Le 14 mai, l'employée a intenté une poursuite civile pour congédiement injustifié contre l'employeur.
Le 17 juin, l'employeur a envoyé à l'employée une lettre l'informant que, par l'introduction d'une poursuite judiciaire, elle avait répudié son contrat de travail, et que l'employeur acceptait cette répudiation.
Au procès, l'employeur a déclaré: 1) qu'il avait des motifs valables de congédier l'employée le 17 juin 2025, celle-ci ayant demandé à son avocat d'envoyer des mises en demeure et d'intenter une poursuite contre lui alors qu'elle était toujours à son emploi; et 2) subsidiairement, que par cette conduite, l'employée avait répudié son contrat de travail.
Quelle a été la décision de la Cour ?
Pas de motif valable dans les circonstances...
D'abord, la Cour suprême de la Colombie-Britannique (la «Cour») a conclu que, dans les circonstances, la conduite de l'employée ne constituait pas un motif valable de congédiement.
Si les tribunaux ont déjà reconnu que le fait d'intenter une poursuite contre l'employeur peut constituer un motif valable de congédiement, il n'existe pas, en Colombie-Britannique, de règle claire et universelle selon laquelle l'envoi d'une lettre de mise en demeure ou l'introduction d'une procédure judiciaire entraînerait systématiquement une telle conséquence.
En analysant si les circonstances propres à cette affaire permettaient de conclure à l'existence d'un motif valable de congédiement, la Cour a estimé que les lettres de mise en demeure de l'employée constituaient une tentative raisonnable de négocier ses droits après avoir reçu de la part du propriétaire un plan ambigu relatif à la fermeture de l'entreprise. Il convient également de noter que:
- L'employée avait présenté une justification raisonnable quant à son choix de communiquer par l'intermédiaire d'un avocat plutôt que de s'adresser directement au propriétaire de l'entreprise;
- Les lettres de mise en demeure n'étaient ni impolies ni trop agressives, et témoignaient de la volonté de l'employée d'engager des négociations.
En outre, le litige n'était pas, en soi, incompatible avec le maintien de la relation d'emploi, d'autant plus que:
- Les actes de procédure étaient brefs, simples et ne contenaient aucune allégation scandaleuse ou incendiaire;
- L'employée travaillait principalement à distance et interagissait peu en personne avec le propriétaire de l'entreprise.
cela dit... l'employée avait tout de même répudié son contrat de travail.
Bien quele juge Brongersaitconclu à un congédiement injustifié, il anéanmoins pousséson analyseplus loin. Selon la Cour, l'action en justice intentée par l'employéeéquivalait à une répudiation de son contrat de travail, sans toutefois constituer, en soi,un motif suffisant pour justifier son congédiement.
Le juge Brongers a fondé sa décision sur la jurisprudence établie par la Cour d'appel de la Colombie-Britannique selon laquelle un employé qui intente une action pour congédiement injustifié contre son employeur pendant la période de préavis travailléaprès avoir reçu un préavis de cessation d'emploi sans motif valable est réputé avoir répudié son contrat de travail sans justification – à moins qu'il ne puisse démontrer que l'employeur avait déjà, de manière déguisée, mis fin à son emploi ou répudié son contrat de travail.
Le juge Brongers a estimé qu'en l'espèce, les conditions requises pour invoquer l'exception n'étaient pas réunies. En remettant à l'employée un préavis officiel indiquant que son emploi prendrait fin à la clôture du prochain exercice financier de l'entreprise, l'employeur avait cherché à respecter les dispositions du contrat de travail écrit conclu entre les parties. Un tel comportement ne saurait être interprété comme un congédiement déguisé ni comme une répudiation du contrat de travail par l'employeur, même si le délai de préavis s'est révélé insuffisant.
Par conséquent, le juge Brongers a conclu que la décision de l'employée de déposer et de signifier une poursuite pour congédiement injustifié contre son employeur pendant la période de préavis travailléavait entraîné la répudiation de son contrat de travail, que son employeur a acceptée le 17 juin 2025.
La répudiation a eu une incidence importante sur l'indemnité accordée à l'employée pour congédiement injustifié : celle-ci a été ajustée en fonction de la période de préavis que l'employée aurait normalement travaillée si elle n'avait pas répudié son contrat de travail.
Dans cette affaire:
- La période de préavis raisonnable était fixée à 24 mois;
- L'employée a seulement travaillé pendant 1,5 mois de sa période de préavis (celle-ci ayant pris fin à la date à laquelle l'employeur a accepté la répudiation);
- En pratique, l'employée n'a pas travaillé durant 11,5 mois de sa période de préavis réelle de 13 mois, de sorte que;
- Les 11,5 mois durant lesquels elle n'a pas travaillé ont été soustraits de la période de préavis raisonnable, la réduisant à seulement 12,5 mois.
Comme le procès n'a eu lieu que quatre mois après le début de la période de préavis revendiquée, la Cour aégalementjugé approprié d'appliquer une«réduction pourimprévu» d'un mois afin de refléter la possibilité que l'employée réintègre le marché du travail avant la fin des 12,5 mois.
Points à retenir
Cette affaire confirme que, dans le cadre d'un litige et selon les circonstances propres à chaque situation, la conduite d'un employé pendant la période de préavis travailléaura une incidence sur: 1) l'existence d'un motif valable de congédiement; et 2) la question à savoir si le contrat de travail a été répudié par l'employé, ce qui peut, en conséquence, limiter partiellement son droit à des dommages-intérêts pour congédiement injustifié. La décision souligneégalement que, dans certaines circonstances, le préavis travaillé peut constituer un outil permettant àl'employeur de limiter substantiellement sa responsabilité en cas de poursuite pour congédiement injustifié, à condition toutefoisque le préavis travaillé soit mis en Suvre correctement.
Si vous avez des questions à ce sujet ou besoin d'aide pour la révision de vos contrats, n'hésitez pas à communiquer avec l'auteure de ce bulletin ou avec votre avocat(e) attitré(e) chez Fasken.
The content of this article is intended to provide a general guide to the subject matter. Specialist advice should be sought about your specific circumstances.