Par décision du 12 juillet 2022, le Tribunal Suprême de la Principauté de Monaco a fait droit à la demande d'un résident tendant à l'annulation de la décision lui refusant le renouvellement de sa carte de séjour ordinaire.

1.    La durée minimale de 3 mois de résidence n'est pas une condition de renouvellement d'une carte de séjour

Pour justifier son refus de renouvellement, le Ministère d'Etat avait notamment considéré que la consommation d'électricité du Requérant était « faible » et qu'il ne passait pas « au moins 3 mois en Principauté ».

En réponse, le Requérant faisait valoir que :

  • Aucun seuil minimal de consommation n'est légalement imposé par les textes en vigueur applicables ;
  • Sa consommation énergétique s'expliquait en réalité par sa présence sur son navire battant pavillon monégasque et territorialement soumis aux lois de la Principauté, ce dont il justifiait ; et
  • La notice individuelle communiquée par le Ministère d'Etat et indiquant que le Requérant résidait de « moins en moins à Monaco » faisait surtout référence à une enquête de voisinage et une analyse des relevés bancaires que le Ministère d'Etat avait refusé de communiquer, empêchant ainsi le Tribunal Suprême d'exercer son contrôle de la légalité.

Ainsi, pour annuler la décision du Directeur de la Sûreté Publique, le Tribunal Suprême a considéré que :

  • Il résulte des termes de l'article 1er de l'Ordonnance Souveraine du 19 mars 1964 que la durée de trois mois de séjour prévue par cette disposition est la période au-delà de laquelle un étranger est tenu d'obtenir une carte de séjour s'il souhaite continuer à séjourner ou résider en Principauté ;
  • Les articles 6 et 7 de la même Ordonnance Souveraine prévoient que le renouvellement d'une carte de séjour est soumis aux mêmes conditions que celles prévues pour l'octroi d'une première carte de séjour de résident, à savoir :
    • La possession d'un titre d'identité valable ;
    • La justification d'une autorisation d'exercer une activité professionnelle ou de la disposition de ressources suffisantes; et
    • L'absence de circonstances justifiant que les autorités compétentes, dans l'exercice de leur pouvoir de police administrative, ne délivrent pas la carte de séjour.   

Ainsi, le Tribunal Suprême a considéré qu'une durée minimale de trois mois de séjour en Principauté au cours de l'année précédente ne constitue pas une condition de renouvellement d'une carte de séjour de résident.

En conséquence, en refusant, pour non-respect d'une durée minimale de trois mois de séjour en Principauté, le renouvellement de la carte de séjour du Requérant, la Direction de la Sûreté Publique a fait une application inexacte  de l'article 1er de l'Ordonnance Souveraine du 19 mars 1964.

Sa décision a, ainsi, été annulée.

2.    La consécration de la notion de résidence effective

Aux termes de cette même décision, le Tribunal Suprême a précisé qu'il était loisible à l'Administration de refuser l'octroi d'une première carte de séjour de résident ou son renouvellement lorsqu'il apparaissait que la demande était manifestement dépourvue d'utilité, en se fondant sur les éléments en sa possession relatifs à la vie personnelle et professionnelle du demandeur et, le cas échéant, sur le défaut de séjour effectif de ce dernier sur le territoire de la Principauté.

Un tel critère s'apprécie au cas par cas.

Cette décision illustre la constance du Tribunal Suprême qui dans une affaire passée a déjà pu considérer que l'abrogation de la carte de séjour d'un résident privilégié était entachée d'une erreur manifeste d'appréciation lorsque la décision attaquée était fondée sur la circonstance que la Requérante ne résidait pas de manière effective à Monaco alors que les éléments contraires étaient largement étayés.

En particulier, la seule circonstance que la Requérante ait été propriétaire d'un appartement en commune limitrophe dont elle avait la libre disposition ne pouvait suffire à établir l'absence d'effectivité de sa résidence en Principauté (Décision TS 2020-15 Mme M. G. épouse L. et M. L. L. c/ Etat de Monaco).

En conclusion, la consécration de la notion de résidence effective, renouvelée par la décision du 12 juillet 2022, permet une appréciation au cas par cas qu'il conviendra d'établir.  

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