Le Gouvernement fédéral propose des modifications à la Loi sur l'évaluation d'impact afin de respecter la décision de la Cour suprême

Le 30 avril 2024, le Gouvernement du Canada a déposé des modifications à la Loi sur l'évaluation d'impact (la « LEI ») dans un Avis de motion et moyens...
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Le 30 avril 2024, le Gouvernement du Canada a déposé des modifications à la Loi sur l'évaluation d'impact (la « LEI  ») dans un Avis de motion et moyens en vue du dépôt de la Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 16 avril 2024 (les « Amendements à la LEI »).

Ces modifications constituent une réponse au Renvoi relatif à la Loi sur l'évaluation d'impact (le « Renvoi relatif à la LEI »), dans lequel la Cour suprême du Canada conclut que les dispositions liées au régime des « projets désignés » sont inconstitutionnelles, puisqu'elles excèdent les compétences fédérales.

Pour en savoir davantage sur ce jugement d'importance, vous pouvez consulter notre bulletin sur le sujet intitulé La Cour suprême du Canada conclut que la loi fédérale sur l'évaluation d'impact outrepasse la compétence du Parlement.

Le Gouvernement du Canada avait réagi promptement à la publication du Renvoi relatif à la LEI, s'engageant à apporter les modifications législatives nécessaires rapidement. Les Amendements à la LEI étaient donc grandement attendus.

Aperçu des modifications proposées

Il est évident que les Amendements à la LEI visent à limiter son champ d'application aux compétences fédérales afin de respecter le Renvoi relatif à la LEI. Nous notons les modifications suivantes :

  • Le titre intégral, le préambule et l'objectif de la LEI :
    • La Cour suprême a indiqué que les objectifs et le préambule de la LEI ne limitent pas suffisamment le pouvoir discrétionnaire du décideur lorsqu'il détermine s'il est nécessaire d'assujettir un projet à une étude d'impacts.
    • Les Amendements à la LEI modifient désormais le titre intégral, le préambule et l'objectif de la Loi de manière à restreindre ce dernier à la prévention ou l'atténuation d'effets négatifs importants relevant d'un domaine de compétence fédérale.
  • Les « effets négatifs relevant d'un domaine de compétence fédérale » :
    • La prise en compte des « effets négatifs relevant d'un domaine de compétence fédérale » est centrale dans le processus décisionnel élaboré par la LEI. La Cour suprême a estimé problématique l'ancienne définition puisqu'elle englobe des effets relevant d'un domaine de compétence provinciale, ce qui mène à des interdictions trop larges.
    • Le Parlement a renommé la notion d'« effets relevant d'un domaine de compétence fédérale » pour « effets négatifs relevant d'un domaine de compétence fédérale » afin de limiter les activités soumises au régime de la LEI.
    • Nous notons l'ajout des termes « changements négatifs non négligeables » ainsi que le retrait des termes « des changements à l'environnement […] dans une province autre que celle dans laquelle la mesure est prise ».
  • La prise en compte de l'intérêt public :
    • En vertu de la LEI, la dernière étape du processus décisionnel du décideur est de déterminer s'il est dans l'intérêt public de renvoyer l'évaluation d'impact du projet pour examen par une commission. La Cour suprême a déterminé que certains éléments du test de l'intérêt public ne relèvent pas des champs de compétence du fédéral, puisqu'ils sont liés à une évaluation globale du projet plutôt qu'à une évaluation des effets négatifs de compétence fédérale.
    • Conséquemment, les Amendements à la LEI modifient la liste des facteurs à considérer, notamment en retirant l'obligation de considérer « la mesure dans laquelle le projet contribue à la durabilité ».
    • Également, il est désormais nécessaire que le ministre évalue d'abord l'importance des effets négatifs causés par le projet sur des domaines de compétences fédérales avant de pouvoir déterminer si l'intérêt public justifie ces effets.
  • Substitution et coopération :
    • La LEI envisage une certaine collaboration entre les différentes instances afin d'éviter la bureaucratie et les dédoublements, avec l'objectif « un projet, une évaluation ». Le Renvoi relatif à la LEI constate toutefois que les dispositions de la LEI permettant la substitution de processus d'évaluations « garantissent en pratique que « l'évaluation » sera fédérale »1.
    • Les Amendements à la LEI tentent de remédier à cette problématique, par exemple en élargissant les possibilités de substitutions provinciales et en permettant au décideur d'examiner si une autre instance dispose « d'un autre moyen que l'évaluation d'impact » pour traiter des effets négatifs relevant d'un domaine de compétence fédérale.

Les effets des modifications législatives durant la période transitoire

  • À la suite du Renvoi sur la LEI, le Gouvernement fédéral a publié la Déclaration sur les dispositions provisoires relatives à l'administration de la LEI qui indique que l'Agence d'évaluation d'impact du Canada allait « examiner tous les projets désignés qui en sont actuellement à l'étape préparatoire ou d'étude d'impact afin de donner son avis sur la question de savoir si la compétence fédérale est claire ».
  • Les Amendements à la LEI contiennent des dispositions transitoires qui visent à assurer une continuité dans l'évaluation des projets soumis à la LEI avant l'entrée en vigueur des modifications législatives. On y mentionne notamment que s'il avait été décidé qu'un projet n'avait pas à être soumis à un processus d'évaluation d'impact, cette décision serait maintenue.

Conclusion et prochaines étapes

Les Amendements à la LEI ne constituent qu'une première étape franchie par le Gouvernement fédéral afin de ramener cette loi dans les paramètres constitutionnels établis par le Renvoi sur la LEI. Les modifications proposées n'apportent que des changements très précis et maintiennent le régime d'évaluation d'impact.

D'autres changements à la LEI sont à prévoir. Par exemple, le Parlement pourrait modifier l'Annexe 3, qui énumère des composantes environnementales, sanitaires, sociales et économiques incluses dans la notion d' « effets relevant d'un domaine de compétence fédérale ».

On s'attend également à ce que le Règlement sur les activités concrètes soit modifié au cours des prochains mois, notamment quant à la liste des projets désignés, afin de s'assurer que la conformité du cadre juridique applicable aux évaluations d'impact respecte les enseignements de la Cour suprême du Canada dans le Renvoi relatif à la LEI.

Les Amendements à la LEI ne garantissent pas la fin de l'incertitude juridique qui entoure cette loi. Le gouvernement de l'Alberta, lequel avait initié la contestation de la LEI devant la Cour d'appel de l'Alberta, a déjà indiqué que, selon lui, les amendements ne corrigent pas les problèmes identifiés par la Cour suprême et que la LEI reste inconstitutionnelle2. L'Alberta a également déclaré qu'elle ne reconnaitrait pas la validité cette nouvelle version de la loi et qu'elle envisageait une autre contestation judiciaire.

Nous sommes également d'avis que la LEI, telle que modifiée, pourrait à nouveau faire l'objet de contestations en raison de son lien vague avec les compétences constitutionnelles fédérales. Les modifications à venir à la réglementation seront déterminantes afin de savoir si ce régime juridique modifié va survivre.

Footnotes

1. Renvoi sur la LEI, par. 107.

2. Voir Impact Assessment Act remains unconstitutional: Joint Statement, daté du 13 mai 2024, disponible ici (en anglais seulement).

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