Une clause de non-concurrence doit toujours faire l'objet d'une analyse individuelle, en fonction du domaine d'activité et de la particularité de la relation de travail.

L'expérience a pu démontrer que les clauses de prohibition de concurrence prévues dans lescontrats de travail sont souvent défaillantes et incomplètes. Une clause de non-concurrencedoit toujours faire l'objet d'une analyse individuelle, en fonction du domaine d'activité et de laparticularité de la relation de travail. Il est toujours temps de les faire contrôler et, le caséchéant, modifier, au risque de leur voir perdre tout validité.

Il convient d'abord de rappeler qu'une clause de prohibition de concurrence n'est valable quesi elle revêt la forme écrite et porte la signature des parties au contrat de travail. Elle peut êtreconclue lors de la conclusion du contrat de travail ou postérieurement durant les rapports detravail.

Pour qu'une clause de non-concurrence soit valable, il faut, d'une part, que les rapports detravail permettent au travailleur d'avoir une connaissance de la clientèle ou de secrets defabrication ou d'affaires de l'employeur et, d'autre part, que l'utilisation de ces renseignementssoit de nature à causer à l'employeur un préjudice sensible.

L'employé doit donc être amené à connaître la clientèle de l'employeur. Il doit par exempleêtre en lien direct avec celle-ci ou, à tout le moins, connaître ses souhaits, préférences ouhabitudes. Une simple connaissance du fichier de clients ne suffit pas.

Alternativement, l'employé doit avoir acquis des connaissances sur les secrets de fabricationou d'affaires. Il doit s'agir d'éléments portant sur les processus de fabrication qui ne sont pasconnus de tous et difficilement accessibles, pour lesquels le travailleur a bénéficié d'uneformation propre à l'employeur. Constituent des secrets d'affaires les renseignements relatifsà des questions techniques, organisationnelles ou financières, dont la connaissance estrestreinte à un cercle bien déterminé de personnes, soit notamment des informations en lienavec l'organisation, le calcul du prix, la publicité, la production et les sources d'achat et deravitaillement.

Enfin, les connaissances dont bénéficie l'employé doivent pouvoir causer un préjudice àl'employeur si l'employé les utilise à mauvais escient. Sont notamment visées ici les situationsdans lesquelles le travailleur, grâce à sa connaissance des clients et de leurs habitudes, peutfacilement leur proposer des services analogues à ceux de son ancien employeur et ainsi lesdémarcher (ATF 138 III 67, consid. 2.2.1).

Selon le Code des obligations, la clause de prohibition ne peut en principe excéderune durée de trois ans; la durée de référence est en général de six mois.

Si l'une des conditions précitées fait défaut, la clause est entièrement nulle (TF 4A_468/2016du 6 février 2017, consid. 3). Il est dès lors indispensable de procéder à un examen détaillédes clauses de prohibition.

Il sied de préciser qu'il existe également des limites quant à l'application d'une clause deprohibition de concurrence. Elle n'a en effet aucune valeur si la résiliation des rapports detravail intervient durant le temps d'essai. Il est également impossible de prévoir une telleclause dans le cadre d'un contrat à durée déterminée, d'un contrat d'apprenti ou d'un contratde travail intérimaire (BRUCHEZ/MANGOLD/SCHWAAB, Commentaire du contrat de travail,4e édit., 2019, ad art. 340 CO, n°8 à 10).

En outre, afin de ne pas compromettre l'avenir économique du travailleur par le biais d'uneclause de prohibition de concurrence excessive, le droit prévoit également des limitesd'espace, de temps et de genre d'affaires. Une clause ne prévoyant pas ces limites n'est pasvalable (ATF 145 III 365, consid. 3.5.1).

Ainsi, le rayon géographique de la clause ne doit pas être étendu au-delà du territoire surlequel l'employeur déploie son activité; plus l'activité prohibée est rare, plus l'étendue peutêtre vaste.

Par ailleurs, selon le Code des obligations, la clause de prohibition ne peut en principe excéderune durée de trois ans; la durée de référence est en général de six mois. Il ne s'agit pas d'unedurée absolue, mais d'une règle générale, seules des circonstances exceptionnellespermettant de retenir une durée supérieure. Il est vrai que de nombreuses clauses prévoientune durée d'une année, durée parfaitement acceptable, mais, encore une fois, il convientd'étudier chaque clause dans son ensemble, au cas par cas.

Les clauses doivent également définir de manière détaillée l'activité prohibée. Une telledescription n'est toutefois pas nécessaire si, par la voie de l'interprétation, l'on comprend dequelle activité il s'agit. En outre, les clauses ne doivent pas constituer une interdictionprofessionnelle, soit empêcher le travailleur d'exercer une activité correspondante à saformation.

Se pose enfin la question du respect de la clause de prohibition. La conformité aux principesgénéraux précités n'entraîne pas d'effet contraignant envers le travailleur si la clause neprévoit pas expressément des sanctions; il faut se donner les moyens d'agir pour espérer fairecesser des agissements concurrentiels proscrits. En sus de l'action en dommages et intérêts, l'employeur dispose de deux moyens d'agir pour faire respecter une clause de prohibition deconcurrence, soit l'action en paiement d'une peine conventionnelle et l'action en exécution del'interdiction de concurrence.

Le calcul du montant de la peine conventionnelle doit respecter certains principes généraux,mais ne peut dans tous les cas excéder le salaire annuel (ATF 133 III 43, consid. 3a). Si lemontant de cette peine est inférieur aux dommages causés par la violation de la clause deprohibition, l'employeur pourra toujours faire valoir ce dommage supplémentaire. Il sied enoutre de souligner que, sauf disposition contraire, le travailleur peut se délier de son obligationde non-concurrence en payant le montant de la peine conventionnelle.

Précisons en dernier lieu que le droit suisse permet à l'employeur d'agir devant les tribunauxpour faire cesser une activité concurrentielle. Pour ce faire, cette possibilité doit expressémentet clairement être prévue par accord écrit, sans ambiguïté, entre l'employeur et le travailleur.Néanmoins, une telle action reste exceptionnelle et ne sera possible que dans des casrestrictifs, soit si l'employeur s'en est expressément réservé le droit par écrit, et que cettemesure est justifiée par l'importance des intérêts lésés ou menacés de l'employeur et par lecomportement du travailleur.

Il est important de souligner que ces deux moyens d'agir ne sont à la disposition del'employeur si, et seulement si, ce dernier les prévoit expressément dans le contrat de travail !Il est donc essentiel d'accorder le plus grand soin au libellé de la clause de prohibition deconcurrence, au risque de voir celle-ci dépourvue de tout effet.

Originally published 6 Mar 2023

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