La notion européenne de droit annuel au repos est apparue pour la première fois dans un arrêt notoire du 22 novembre 2011 de la Cour de Justice de l'Union Européenne (CJUE), selon lequel les congés payés ont « une double finalité, à savoir permettre au travailleur de se reposer par rapport à l'exécution des tâches lui incombant selon son contrat de travail, d'une part, et disposer d'une période de détente et de loisirs, d'autre part ».

Cette jurisprudence européenne est notamment fondée sur :

  • L'article 31 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne qui donne droit à tout salarié une « période annuelle de congés payés » ;
  • L'article 7 de la directive européenne 2003/88/CE selon lequel : « Les Etats membres prennent les mesures nécessaires pour que tout travailleur bénéficie d'un congé annuel payé d'au moins quatre semaines, conformément aux conditions d'obtention et d'octroi prévues par les législations et/ou pratiques nationales ».

Au visa des mêmes fondements, la CJUE a ensuite estimé, dans le cadre d'une question qui lui était posée sur la relation entre travail effectif et congés payés en droit français, que les Etats membres doivent garantir une durée de congés payés de 4 semaines, peu important que le salarié ait été absent sur la période de référence, et peu important le motif de l'absence (CJUE, 24 janvier 2012).

Ce faisant, la juridiction a - d'une manière pouvant être jugée très contestable - procédé à l'effacement de la distinction opérée en droit français tout comme en droit monégasque d'ailleurs, relative à l'acquisition des congés payés uniquement à l'occasion des périodes de travail effectif et des absences considérées comme tel (congé maternité, congé paternité, congé d'adoption, arrêt de travail consécutif à un accident ou une maladie professionnelle).

Alors qu'il s'agissait jusqu'ici de préoccupations purement circonscrites aux pays membres de l'Union Européenne, dont Monaco ne fait pas partie, les Tribunaux monégasques ont consacré, récemment, l'existence d'un « droit annuel au repos, à la détente et aux loisirs », en se référant expressément à l'arrêt de la CJUE du 22 novembre 2011.

Pour l'heure, les juridictions monégasques - de première instance - ont considéré que ce droit annuel au repos impliquait :

  • L'obligation pour l'employeur de prendre des mesures propres à assurer au salarié la possibilité d'exercer effectivement son droit à congé ;
  • L'impossibilité, pour le salarié, de refuser de partir en congés ;
  • L'impossibilité, pour l'employeur, d'empêcher le salarié de prendre ses congés – sauf motif légitime et sous réserve de compensation ;
  • Le caractère non-absolu de l'absence de droit au report, celle-ci devant faire l'objet d'une appréciation au cas par cas, fonction de l'attitude de l'employeur – de sorte que ce principe de non-report peut (voire doit dans certaines hypothèses) être écarté par l'employeur.

Pour autant, la référence expresse, par les tribunaux monégasques de première instance, à la décision de la CJUE du 22 novembre 2011, ainsi qu'à la nécessité pour l'employeur « de prendre les mesures propres à assurer au salarié la possibilité d'exercer effectivement son droit à congé » pourrait amener à s'interroger sur la portée de ce droit annuel au repos, et à la transposition de la notion européenne dans l'ordre interne de la Principauté.

Cependant, si la question d'un droit à une durée minimale de congés payés – à l'image de celui dégagé en droit de l'Union, pour une durée de 4 semaines, peu important que le salarié n'ait acquis aucun droit aux congés payés par l'effet de la loi – devait faire l'objet de débats futurs devant les juridictions monégasques, elle heurterait alors a priori la hiérarchie des normes et la souveraineté du droit national.

Dans l'attente d'une clarification sur les effets concrets de ce droit annuel au repos dans les relations d'emploi à Monaco, il est donc essentiel d'anticiper, au cas par cas, les difficultés pouvant survenir quant à cette question - notamment en cas d'absence prolongée de salariés (sort des congés payés acquis sur l'exercice précédent, absence d'acquisition de droits aux congés durant la période d'arrêt) aux fins de leur garantir utilement l'exercice d'un droit annuel au repos, et éviter une condamnation à des dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail.

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