Le 23 mai 2017, le ministère du Travail a publié le rapport final et le sommaire sur l'Examen portant sur l'évolution des milieux de travail. Le rapport contient 173 recommandations visant à modifier les lois qui régissent actuellement le travail et l'emploi en Ontario, à la lumière de la « nature changeante de la main-d'Suvre, du milieu de travail et de l'économie même ».

Le rapport de 475 pages fait état de diverses recommandations qui portent sur des modifications précises à apporter aux normes d'emploi ainsi que sur des considérations générales, telles la consolidation de la Loi de 2000 sur les normes d'emploi (la « LNE »), de la Loi de 1995 sur les relations de travail (la « LRT ») et de la Loi sur la santé et la sécurité au travail (la « LSST » ) en une seule Loi sur les droits au travail. Les recommandations qui figurent dans le rapport n'ont aucune portée juridique tant que le gouvernement de l'Ontario n'a pas officiellement procédé à leur mise en application en modifiant la législation ou en remaniant les politiques. Dans un communiqué de presse publié le 23 mai 2017, le ministre du Travail a déclaré que le gouvernement avait examiné les recommandations et annoncerait dans le cours de la semaine prochaine sa « réponse officielle »1. Le même jour, la première ministre Kathleen Wynne a été citée dans les médias. Elle a déclaré que son gouvernement agira [traduction] « très bientôt » et qu'il faut « rester à l'écoute, car les choses vont changer très rapidement »2.

Nous avons consolidé les dix principales recommandations sur les modifications à apporter à la LNE et à la LRT. Nous analysons également les thèmes et les propositions générales que contient le rapport. Comme nous le signalons ci-dessus, le gouvernement n'a pas encore modifié la législation ni mis en Suvre l'une ou l'autre des recommandations qui se trouvent dans le rapport.

Dix principales recommandations quant aux modifications à apporter à la LNE

  1. Congés autorisés :
    1. Éliminer le seuil de 50 employés pour ce qui est des congés d'urgence personnelle.
    2. Ramener à sept jours le congé d'urgence personnelle actuel de dix jours et retirer le congé de deuil des dispositions relatives aux congés d'urgence personnelle.
    3. Créer un droit indépendant au congé de deuil jusqu'à concurrence de trois jours non payés pour chacun des membres de la famille couverts par les dispositions actuelles relatives au congé d'urgence personnelle, sans restriction annuelle.
    4. Modifier le congé d'urgence personnelle pour qu'un employé puisse invoquer son droit à ce congé comme motif d'absence pour violence conjugale.
    5. Dans le cas d'un congé d'urgence personnelle pour maladie, exiger de l'employeur qu'il paie le billet du médecin s'il demande un tel billet à son employé.
    6. Revoir les dispositions sur les jours fériés pour qu'elles soient plus simples et faciles à comprendre.
    7. Après cinq ans d'emploi auprès du même employeur, porter la durée des vacances annuelles minimales à trois semaines et les indemnités de vacances à au moins 6 %.
  2. Travail à temps partiel : Interdire aux employeurs de verser à un employé à temps partiel un salaire inférieur à celui que touche un « employé comparable à temps plein » du même employeur, sauf s'il existe des motifs comme a) l'ancienneté; b) le mérite; c) une rémunération liée à la quantité ou à la qualité de la production; ou d) un autre facteur justifiant la différence.
  3. Droit de demander : Autoriser les employés qui comptent au moins un an de service à demander, une fois l'an, que l'employeur augmente ou diminue leurs heures de travail, propose un horaire plus flexible ou change leur lieu de travail. L'employeur serait tenu d'offrir à l'employé l'occasion de discuter de la question et de fournir par écrit les raisons pour lesquelles la demande est refusée. La décision de l'employeur ne pourrait pas faire l'objet d'un appel.
  4. Heures supplémentaires : Maintenir le seuil prévu dans la LNE à 44 heures par semaine, mais limiter la capacité à établir la moyenne des heures supplémentaires aux occasions où cela permet une semaine de travail comprimée, le travail en rotation ou d'autres assouplissements aux horaires souhaités par les employés, ou encore si cela permet à l'employeur de répondre à des exigences en matière de planification des horaires si le nombre total d'heures travaillées ne dépasse pas le plafond fixé pour les heures supplémentaires.
  5. Heures de travail : Éliminer l'obligation d'obtenir l'approbation du ministère du Travail pour faire travailler des employés de 48 à 60 heures par semaine.
  6. Définition du terme « employeur » : Modifier la définition de l'expression « employeur lié » à l'article 4 de la LNE pour supprimer le critère d'« objet ou effet » pour ce qui est de faire échec à la LNE.
  7. Définition du terme « employé » : Revoir les exclusions et la portée du terme « employé » afin de supprimer les exclusions relatives aux « personnes qui reçoivent une formation » et aux employés de la Couronne, et d'inclure les « entrepreneurs dépendants ».
  8. Exemption relative aux gestionnaires et superviseurs : Modifier le modèle actuel concernant les gestionnaires et adopter un modèle « fonctions plus salaire » dans lequel, pour être exempté de la rémunération des heures supplémentaires et des règles régissant les heures de travail, un gestionnaire devrait accomplir des tâches prédéterminées; le niveau de salaire serait 150 % du salaire minimum général.
  9. Classification d'un employé : Modifier la LNE de façon qu'il incombe à l'employeur, en cas de différend quant à savoir si une personne est un employé, d'établir le statut en cause et d'apporter toute preuve à l'appui.
  10. Agences de placement temporaire :
    1. À l'exception des six premiers mois de l'affectation, les travailleurs d'affectation ne devraient pas recevoir une rémunération moindre que celle d'un employé comparable du client réalisant un travail similaire.
    2. Le client doit faire « tout en son pouvoir » pour s'assurer que les travailleurs d'affectation sont mis au courant des postes disponibles chez lui et doit tenir compte, en toute bonne foi, de toute candidature déposée par un travailleur d'affectation.
    3. Avant de mettre un terme à la relation d'emploi avec un travailleur d'affectation, le client doit évaluer si ce travailleur pourrait combler un des postes disponibles, à l'exception des personnes recevant 2,5 fois le salaire minimum ou plus (converti en salaire hebdomadaire ou annuel, en fonction d'une semaine de 40 heures).
    4. Le client, et non l'agence, doit être tenu responsable des blessures subies au travail par les employés d'affectation.

Dix principales recommandations quant aux modifications à apporter à la LRT

  1. Exclusions en matière de négociation collective : Supprimer les exclusions qui s'appliquent aux domestiques, aux employés de l'agriculture et de l'horticulture, aux architectes, aux dentistes, aux arpenteurs-géomètres, aux avocats et aux médecins.
  2. Accréditation corrective : Revoir la disposition sur l'accréditation corrective à l'article 11 de la LRT pour exiger de la Commission des relations de travail de l'Ontario (la « CRTO ») qu'elle accrédite un syndicat en tant qu'agent de négociation des employés de l'unité de négociation, l'accréditation n'étant plus un redressement discrétionnaire que la Commission peut ordonner.
  3. Arbitrage de la première convention collective : Lorsque la CRTO ordonne une accréditation corrective en vertu de l'article 11, il devrait être possible d'obtenir une première convention collective prévue en vertu de l'article 43 de la LRT, à moins que le syndicat n'ait négocié de mauvaise foi ou refuse, sans motif raisonnable, de faire des compromis.
  4. Médiation intensive : Inclure une démarche visant la « médiation intensive » semblable à celle qu'on utilise en Colombie-Britannique.
  5. Accès aux listes d'employés : Exiger d'un employeur qu'il divulgue la liste des employés, ce qui comprend le lieu de travail, l'adresse, le numéro de téléphone et l'adresse courriel personnelle de chacun des employés, lorsqu'un syndicat dépose une demande et que la CRTO détermine que ce syndicat a le soutien de 20 % des employés au sein d'une unité de négociation.
  6. Preuve d'adhésion électronique : Moderniser les règles de la CRTO autorisant les preuves d'adhésion électronique en se servant des outils qu'elle peut élaborer pour garantir l'authenticité de ces preuves.
  7. Procédures de scrutin : La CRTO devrait mener des procédures de scrutin par téléphone et par Internet, et mettre sur pied un système de vote électronique.
  8. Unités de négociation : Accorder de nouveaux pouvoirs à la CRTO pour qu'elle puisse modifier ou consolider les unités de négociation existantes.
  9. Franchisés/franchiseurs : Mettre en place un modèle dans lequel les unités de négociation accréditées de différents franchisés d'un même franchiseur liées au même syndicat dans le même secteur géographique puissent négocier ensemble, de manière centralisée. Un organisme négociateur patronal représenterait les employeurs des franchisés.
  10. Agences de placement temporaire : Supposer que les employés d'affectation sont les employés du client pour les besoins de la LRT.

Thèmes et propositions élargies qui figurent dans le rapport

Les auteurs du rapport abordent également plusieurs grands thèmes et questions sans proposer toutefois de recommandation concrète quant aux modifications à apporter à la LNE ou à la LRT. Ainsi, ils soulignent l'importance de revoir la manière dont la LNE est actuellement mise en application et recommandent de procéder à des examens dans certains secteurs ou industries.

Les auteurs du rapport laissent entendre qu'il faut prévoir des initiatives de mise à exécution davantage proactives en ayant recours notamment à des contrôles ponctuels, des audits et des inspections, particulièrement dans les secteurs et les emplois où l'on trouve un grand nombre « d'employés vulnérables ». Lorsqu'une plainte est déposée auprès du ministère du Travail, ils proposent qu'un agent des normes d'emploi puisse élargir son enquête si celui-ci détermine qu'il y a vraisemblablement non-conformité à la législation sur une vaste échelle dans le milieu de travail en question; dans ce cas, il se peut que l'enquête porte sur les « structures supérieures des industries », comme la direction d'un franchiseur ou des employeurs communs, dans le but de déterminer comment sont prises les décisions qui concernent les politiques touchant le personnel. Les agents des normes d'emploi jouiraient alors de pouvoirs d'enquête accrus.

Outre le recours à des initiatives ciblées en matière de mise en application, les auteurs du rapport recommandent d'améliorer l'accès à la justice et de prévoir un processus pour que les travailleurs qui formulent certaines plaintes puissent être entendus par un vice-président de la CRTO plutôt que par un agent des normes d'emploi. Ils recommandent également d'élargir le rôle du Bureau des conseillers des travailleurs pour aider les employés à présenter une demande aux termes de la LNE et fournir des ressources à ceux qui déposent une plainte. Ces modifications, si elles sont adoptées, faciliteraient les procédures de plainte et entraîneraient probablement un nombre accru de litiges pour les employeurs.

Dans le rapport, on présente peu de recommandations précises au chapitre des exemptions prévues aux termes de la LNE. Les auteurs recommandent que le gouvernement mette sur pied un processus de comités sectoriels pouvant être utilisé lorsque des exemptions existantes font l'objet d'un examen, lorsque de nouvelles exemptions sont envisagées et à l'occasion de l'adoption des règlements propres à un secteur donné. Ils proposent que le gouvernement fasse de l'examen de certaines exemptions prévues par la LNE une « priorité »; enfin, ils recommandent que les comités soient divisés en secteurs et sous-secteurs, et comprennent des représentants des employés ainsi que des représentants de grands et de petits employeurs.

Outre les exemptions prévues par la LNE, les auteurs du rapport recommandent au gouvernement de prendre les mesures suivantes :

  • surveiller l'utilisation des contrats à durée déterminée avant de modifier la loi;
  • recueillir les données et les statistiques voulues afin de déterminer les secteurs ayant le plus besoin de réglementation et de fixer les priorités au chapitre de l'établissement des horaires;
  • mener une enquête sur les modèles de négociation multipartite lorsqu'il est question de secteurs précis comme ceux des soins à domicile, des arts et du divertissement.

Nous continuerons de surveiller les faits nouveaux et de faire rapport à leur égard, ce qui comprend des mises à jour de BLG sur l'évolution de questions propres à un secteur donné. De plus, le 20 septembre 2017, dans le contexte de nos déjeuners en droit du travail et de l'emploi, nous offrirons à Toronto une présentation sur la teneur du rapport, la mise en application des recommandations qu'il contient et d'autres actualités législatives. Comme l'a dit la première ministre Wynne, « Restez à l'écoute! ».

Footnotes

1 Ministère du Travail, « Déclaration du ministre Flynn sur la publication du rapport final sur l'Examen portant sur l'évolution des milieux de travail » (23 mai 2017)

2 Robert Benzie, « Labour report calls for expanding protection for workers in Ontario », The Toronto Star (23 mai 2017)

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