Le 29 juin dernier, le gouvernement du Québec a
lancé la première stratégie maritime du
Québec qui s'échelonnera sur 15 ans, soit de 2015
à 2030. D'ici 2030, le gouvernement prévoit la
création de 30 000 emplois directs, de même qu'un
accroissement important des importations et des exportations
stimulés par des investissements publics et privés de
l'ordre de 9 milliards de dollars. Trois plans d'action
quinquennaux sont prévus. Le premier, qui couvre la
période 2015-2020, a été rendu public lors du
lancement de la stratégie maritime. Ce plan d'action
s'accompagne d'un cadre financier de 1,5 milliard de
dollars et plusieurs mesures qui y figurent sont déjà
prévues au budget du Québec 2015-2016.
La stratégie maritime s'appuie sur deux principes
fondamentaux, soit une approche planifiée et
intégrée qui devrait interpeller les divers ordres de
gouvernement de même que la société civile et
une perspective de développement durable. Afin de
définir ses priorités, le gouvernement a
également retenu trois orientations stratégiques :
développer l'économie maritime de manière
durable, protéger le territoire maritime et ses
écosystèmes ainsi qu'améliorer la
qualité de vie des citoyens et des citoyennes. Ces
orientations s'articulent autour de différents axes
d'intervention dans le plan d'action, eux-mêmes
détaillés en fonction d'actions prioritaires et
accompagnés d'enveloppes budgétaires.
Nous vous proposons un survol de ces axes d'intervention, dont
certains se recoupent, étant donné les interrelations
inévitables entre les dimensions économique,
environnementale et sociale.
Développer l'économie de manière durable
Le gouvernement veut d'abord investir dans les
infrastructures et créera, notamment, un programme
administré par le ministère des Transports afin de
soutenir les projets d'infrastructures portuaires et
intermodales consacrés au transport des marchandises. Un
soutien financier est également prévu pour la
construction de voies d'accès routier aux sites
portuaires et multimodaux. La construction des infrastructures
devra intégrer des mesures d'adaptation aux changements
climatiques et, à ce titre, le gouvernement entend
réviser les zones inondables liées au
Saint-Laurent.
Il est prévu de favoriser l'implantation de pôles
logistiques, soit des parcs industriels multimodaux où les
entreprises et les centres de distribution seront regroupés.
Les villes de Vaudreuil-Soulanges et de Contrecoeur en
Montérégie se positionnent favorablement et en
complémentarité pour cette implantation.
Le développement de zones industrialo-portuaires, qui
devraient favoriser une meilleure intégration des
entreprises manufacturières aux chaînes
d'approvisionnement mondiales, fait également partie des
axes d'intervention. Pour ce faire, il est prévu, entre
autres, d'entreprendre des travaux de décontamination
des terrains sous la responsabilité du gouvernement afin de
les rendre disponibles pour des investissements dans ces zones.
Le soutien des chantiers maritimes québécois est
aussi prévu, notamment, par l'instauration de mesures
fiscales (déduction additionnelle pour amortissement de 50 %
pour les travaux de construction ou de rénovation de navires
réalisés sur des chantiers maritimes
québécois, réserve libre d'impôt
pour des travaux confiés à des chantiers maritimes
québécois et maintien du crédit
d'impôt remboursable pour la construction ou la
transformation de navires) et par la collaboration du gouvernement
fédéral pour le renouvellement de la flotte de
navires canadiens.
Le développement du transport maritime courte distance
serait favorisé, tout comme l'utilisation du transport
maritime pour les sources d'énergie alternative, dont le
gaz naturel liquéfié (GNL).
Le gouvernement entend également favoriser le
développement et la modernisation du tourisme maritime par
diverses mesures, dont la mise sur pied du Bureau de l'offre
touristique maritime, le financement d'infrastructures
d'accueil pour les croisières internationales à
Québec et à Montréal et le financement de
projets touristiques sur les rives du Saint-Laurent.
Il est également proposé de moderniser et
d'assurer la pérennité de l'industrie des
pêches et de l'aquaculture en misant sur trois axes de
développement, soit les biotechnologies marines,
l'aquaculture et la durabilité des pêches. Le
gouvernement prévoit soutenir les efforts des flottilles de
pêche désirant obtenir des écocertifications,
reconduire et bonifier le crédit d'impôt
remboursable pour la Gaspésie et certaines régions
maritimes et maintenir les mesures encourageant la relève
comme les exemptions de gain en capital et le programme de
relève pour les jeunes pêcheurs et
pêcheuses.
Afin de répondre aux défis de la main-d'oeuvre,
il est proposé de créer une table de concertation
pour assurer une meilleure adéquation entre les besoins des
employeurs et l'offre de formation et le soutien au
développement des compétences de la
main-d'oeuvre. De nouveaux types de formation seront
instaurés dans les secteurs d'avenir (biotechnologie
marine, logistique, recherche appliquée) et la formation
initiale sera adaptée afin d'inclure les nouvelles
exigences en matière de santé, de
sécurité et de protection de l'environnement. Il
est aussi prévu de créer un programme
d'études professionnelles dans le domaine du matelotage
et de bonifier le crédit d'impôt pour stage en
milieu de travail. Enfin, diverses mesures seront
évaluées pour mettre en valeur les métiers
maritimes.
Dans le but de favoriser le développement des connaissances
dans le domaine maritime, le gouvernement entend créer le
Réseau Québec Maritime (RQM) afin de réunir
les structures de recherche et d'innovation existantes et les
expertises pour faire face aux enjeux maritimes. La collaboration
internationale sera également mise de l'avant, notamment
par la création d'un institut France-Québec sur
les questions maritimes.
La promotion internationale des industries maritimes du
Québec sera assurée notamment à l'aide du
Programme Exportation d'Export Québec et en
développant une stratégie d'attraction des
investissements directs étrangers au Québec.
Protéger le territoire maritime et ses écosystèmes
Pour protéger la biodiversité et les
écosystèmes d'eau douce et d'eau marine, le
gouvernement désire créer un réseau
représentatif d'aires marines protégées en
faisant passer la superficie marine protégée, qui est
actuellement de 1,3 %, à 10 % en 2020, de façon
à respecter les engagements internationaux de la Convention
sur la diversité biologique. Cette action doit se faire en
concertation avec le gouvernement fédéral, dans le
cadre des travaux Canada-Québec du Groupe bilatéral
sur les aires marines protégées. Le banc des
Américains en Gaspésie de même que les
Îles-de-la-Madeleine font partie des aires qui pourraient
faire l'objet du statut de protection. Les habitats des
espèces végétales et animales à statut
précaire, comme le béluga, feront partie des facteurs
à prendre en considération pour la création
des aires marines protégées. Il est également
prévu de soutenir les actions visant à restaurer le
lac Saint-Pierre et à assurer la durabilité des
pêcheries qui y sont associées. Enfin, une
capacité d'intervention adéquate devra être
structurée pour contrer les menaces posées par les
espèces aquatiques envahissantes. Cela suppose la
collaboration de plusieurs intervenants et un effort en
matière d'acquisition de connaissances ainsi que des
actions en matière de prévention, de détection
précoce, de contrôle et
d'éradication.
Le deuxième axe d'intervention vise
l'amélioration de la gestion des risques liés au
transport maritime. Le gouvernement entend travailler
étroitement avec le gouvernement fédéral pour
mettre à niveau le programme de prévention, de
préparation et d'intervention en matière de
transport maritime sur le territoire du Québec. Un soutien
financier est aussi prévu pour la recherche et
l'acquisition de connaissances afin d'accroître
l'expertise en matière d'intervention d'urgence
lors de déversements d'hydrocarbures en milieu maritime,
et ce, tant à l'échelle locale et
régionale que provinciale. Les municipalités seront
accompagnées dans la mise à niveau de leur plan
d'urgence et il sera misé sur la promotion du
système de sécurité civile
québécois pour mettre en place une gestion
intégrée des risques liés aux incidents
maritimes potentiels. De plus, un centre d'expertise
spécialisé dans la prévention, la
préparation et les interventions d'urgence
environnementale dans le cas de déversement de
matières dangereuses dans le Saint-Laurent sera
créé aux Îles-de-la-Madeleine.
Par sa stratégie maritime, le gouvernement entend aussi
contribuer à la lutte contre les changements climatiques.
Deux programmes du Plan d'action 2013-2020 sur les changements
climatiques sont ainsi mis de l'avant, soit le Programme visant
la réduction ou l'évitement des émissions
de gaz à effet de serre par le développement du
transport intermodal et le Programme d'aide gouvernementale
à l'amélioration de l'efficacité du
transport maritime, aérien et ferroviaire. Les sources
d'énergie alternatives dans le transport maritime, dont
le GNL, la modernisation des navires et des équipements de
manutention et les projets visant l'utilisation de sources
d'énergie électrique, comme les projets de
branchement à quai des ports de Montréal et de
Québec, seront favorisés et encouragés.
Améliorer la qualité de vie des citoyens et des citoyennes
Pour atteindre cet objectif, le gouvernement veut favoriser des
retombées économiques locales en misant sur la
croissance économique des PME et des régions. La
réduction du fardeau fiscal des PME, le financement de leurs
projets d'investissement et le déploiement du guichet
unique Entreprises Québec (pour faciliter l'accès
aux programmes et services gouvernementaux) font partie des mesures
annoncées.
En vue d'améliorer l'offre de services des
traversiers et le désenclavement des communautés
concernées, un soutien sera offert à la
Société des traversiers du Québec (STQ) pour
l'amélioration de son offre de service et
l'augmentation de son achalandage. La collaboration avec le
gouvernement fédéral et les communautés du
Nunavik et de la Baie James est également prévue afin
de résoudre les problèmes liés à
l'entretien des infrastructures maritimes nordiques et à
leur réhabilitation, au besoin.
Le succès de la Stratégie maritime passe par
l'acceptabilité sociale et l'implication des
collectivités. Le gouvernement entend donc mettre en place
des moyens d'information, de consultation et de concertation,
entre autres en misant sur les Tables de concertation
régionales (TCR) ou le Forum Saint-Laurent. Le gouvernement
entend aussi favoriser la revitalisation de certains territoires
connexes aux installations maritimes et faire la promotion de la
culture et du patrimoine maritimes.
Un autre axe d'intervention consiste à favoriser
l'attraction et la rétention des jeunes en
région. La création d'emploi dans les
différents secteurs de l'économie maritime et les
crédits d'impôt font partie de la démarche
de soutien aux jeunes désireux de s'établir en
région.
Enfin, la lutte contre l'érosion côtière
et le soutien des communautés concernées visent
à sécuriser les infrastructures et les
bâtiments de plusieurs communautés locales et à
prévenir des répercussions sociales et
économiques. Un fonds d'urgence à
l'érosion côtière sera ainsi mis en place.
Un accompagnement des municipalités concernées leur
permettra d'analyser les interventions prioritaires et de
mettre en oeuvre des mesures d'adaptation et de
prévention dans un contexte de changements climatiques. Le
gouvernement soutiendra la recherche sur l'érosion
côtière et veillera à ce que la révision
des plans de régularisation des niveaux des eaux du
Saint-Laurent soit conforme aux intérêts du
Québec.
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