Le 22 mars dernier, l'Assemblée nationale a adopté le projet de loi no42 intitulé la Loi visant à prévenir et à combattre le harcèlement psychologique et la violence à caractère sexuel en milieu de travail (ci-après le « PL 42 »). Ce dernier a ensuite été sanctionné le 27 mars dernier.

Conséquemment, plusieurs lois visant à aménager les conditions de travail des travailleurs(-euses) au Québec et obligations corrélatives des employeurs ont été revisitées, et ce, dans un dessein clair de prévenir et de combattre le harcèlement (sous toutes ses formes), ainsi que d'assurer une plus grande protection des travailleurs(-euses) à cet égard, y compris les recours relatifs à cette protection.

Ainsi, tant la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (la « LATMP »), le Code du travail, la Loi sur les normes du travail (la « LNT ») que la Loi sur la santé et la sécurité du travail (la « LSST ») ont été partiellement modifiées.

La présente publication vise donc à faire un tour d'horizon des principaux changements découlant du PL 42 et des considérations générales qui doivent être considérées dans ce contexte.

En matière d'accidents de travail et de maladies professionnelles

  • Prolongation des délais de réclamations : Le PL 42 prolonge de six (6) mois à deux (2) ans le délai pour produire une réclamation à la CNESST pour une lésion professionnelle résultant de la violence à caractère sexuel.
  • Ajout de présomptions: Dans l'objectif d'alléger le fardeau de preuve et de permettre la reconnaissance plus aisée d'une lésion professionnelle résultant de la violence à caractère sexuel, on note l'ajout des présomptions légales suivantes:
  • À moins qu'elle ne survienne dans un contexte strictement privé, toute blessure ou maladie résultant de la violence à caractère sexuel subie par un(e) travailleur(-euse) et commise par son employeur, l'un(e) de ses dirigeants(-es) dans le cas d'une personne morale, ou l'un(e) des travailleurs(-euses) dont les services sont utilisés par cet employeur aux fins d'un même établissement, est présumée être survenue « par le fait » ou « à l'occasion de son travail »; et
  • Une maladie d'un(e) travailleur(-euse) qui survient dans les trois (3) mois après que ce(cette) dernier(-ère) ait subi de la violence à caractère sexuel sur les lieux du travail est présumée être une lésion professionnelle.
  • Imputation des coûts des prestations dues en raison de violence à caractère sexuel : Lorsque la violence à caractère sexuel a été commise par l'employeur du (de la) travailleur(-euse), l'un(e) de ses dirigeants(-es) dans le cas d'une personne morale ou l'un(e) de ses représentants(es) dans ses relations avec les travailleurs(-euses), les coûts devront exclusivement être assumés par l'employeur du (de la) travailleur(-euse)victime.
  • Accès plus limité et imposition de sanctions en cas de divulgation illégale du dossier médical: Comme il est déjà le cas, l'accès au dossier médical des travailleurs(-euses) que possède la CNESST est limité aux professionnels(-elles) de la santé désignés par l'employeur. Tout défaut de se conformer à de telles restrictions au niveau de la divulgation entraînera des amendes allant de 1 000 $ à 5 000 $ pour les individus et de 2 000 $ à 10 000 $ pour les employeurs.

En matière de santé et sécurité au travail

  • Introduction d'une définition de la « violence à caractère sexuel »: L'article 1 de la LSST contient dorénavant la définition suivante en ce qui a trait à la violence à caractère sexuel: « toute forme de violence visant la sexualité ou toute autre inconduite se manifestant notamment par des gestes, des pratiques, des paroles, des comportements ou des attitudes à connotation sexuelle non désirés, qu'elles se produisent à une seule occasion ou de manière répétée, ce qui inclut la violence relative à la diversité sexuelle et de genre. »

En matière de normes du travail

  • Contenu minimal obligatoire de la politique de prévention du harcèlement psychologique et de traitement des situations de harcèlement: De façon similaire à ce qui prévaut déjà dans la plupart des autres provinces, la politique de prévention et de traitement des situations de harcèlement psychologique adopté par l'employeur doit dorénavant minimalement disposer de plusieurs éléments, dont ceux étayés ci-bas :
  • Les programmes d'information et de formation spécifiques en matière de prévention du harcèlement psychologique qui sont offertes aux personnes salariées;
  • Les modalités applicables pour faire une plainte ou un signalement à l'employeur ou pour lui fournir un renseignement ou un document ainsi que l'information sur le suivi qui doit être donnée par l'employeur ;
  • Les mesures visant à protéger les personnes concernées par une situation de harcèlement psychologique et celles qui ont collaboré au traitement d'une plainte ou d'un signalement portant sur une telle situation ;
  • Le processus de prise en charge d'une situation de harcèlement psychologique, incluant le processus applicable lors de la tenue d'une enquête par l'employeur ;
  • Les mesures visant à assurer la confidentialité d'une plainte, d'un signalement, d'un renseignement ou d'un document reçu ainsi que le délai de conservation des documents faits ou obtenus dans le cadre de la prise en charge d'une situation de harcèlement psychologique, lequel doit être d'au moins (2) deux ans.
  • Fin de la protection des clauses de type d'amnistie pour des incidents ayant trait à un comportement physiquement ou psychologiquement violent: Les contrats de travail individuels, les conventions collectives, décrets ou toutes autres ententes sur les conditions de travail ne peuvent dorénavant empêcher un employeur de tenir compte d'une mesure disciplinaire précédemment prise à l'égard d'un(e) employé(e) pour une inconduite relative à de la violence physique ou psychologique, y compris de la violence à caractère sexuel au sens de la LSST, lors de l'imposition d'une nouvelle mesure disciplinaire pour de tels comportements;
  • Dommages punitifs : Le Tribunal administratif du travail peut maintenant ordonner à un employeur de verser des dommages-intérêts punitifs à un(e) employé(e) victime de harcèlement psychologique, même si cette personne est également victime d'une lésion professionnelle découlant de ce harcèlement.
  • Infractions réglementaires relatives au harcèlement psychologique: La CNESST s'est vu accorder un pouvoir réglementaire lui permettant de déterminer, par règlement, des mesures visant à prévenir ou à mettre fin à une situation de violence à caractère sexuel, renforçant ainsi son rôle dans la protection des travailleurs(-euses) contre de telles situations.

Conclusion et dispositions transitoires

Il importe de noter qu'une partie importante de ces changements est entrée en vigueur à la date de sanction du PL 42, soit le 27 mars 2024.

Cela étant dit, les principales modifications affectant la LATMP et celles relatives au contenu minimal obligatoire de la politique de prévention du harcèlement psychologique et de traitement des situations de harcèlement, n'entreront en vigueur que le 27 septembre prochain.

Si vous êtes un employeur et que vous avez des questions ou aimeriez obtenir notre assistance, n'hésitez pas à contacter l'un des membres de notre groupe national de droit du travail.

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