CURATED
12 September 2024

Newsletter du 19 au 30 août 2024 | n° 87

MB
Monfrini Bitton Klein

Contributor

Based in Geneva, but borderless in its reach, Monfrini Bitton Klein is a litigation-only Swiss law firm, internationally recognised for asset recovery, business crime and cross-border litigation. We are representatives for Switzerland of ICC-FraudNet, the leading global network of fraud and asset recovery lawyers.
Portée du secret professionnel de l'avocat sur un rapport d'enquête interne fondé sur des copies de documents bancaires et produit devant la FINMA [p. 2]
Switzerland Criminal Law

I. PROCÉDURE PÉNALE

TF 7B 158/2023*

Portée du secret professionnel de l'avocat sur un rapport d'enquête interne fondé sur des copies de documents bancaires et produit devant la FINMA [p. 2]

TF 7B_355/2023

Application excessivement stricte des règles en matière de motivation pour un recours formé contre une ordonnance de non-entrée en matière pour violation du secret de fonction
[p. 4]

TF 7B_76/2024

Incompétence du tribunal des mesures de contrainte concernant l'approbation d'une découverte fortuite issue de la surveillance à l'étranger d'une
plateforme de communication [p. 6]

II. DROIT PÉNAL ÉCONOMIQUE

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III. DROIT INTERNATIONAL PRIVÉ

 

TF 4A_621/2023*

Application de la Convention de Lugano à un Distribution Agreement comportant une clause d'arbitrage, conciliabilité admise de deux décisions entre les mêmes parties et refus de renvoi en arbitrage [p. 7]

IV. DROIT DE LA POURSUITE ET DE LA FAILLITE

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V. ENTRAIDE INTERNATIONALE

 

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Quelques propos introductifs

La présente Newsletter de Monfrini Bitton Klein vise à offrir, de manière hebdomadaire, un tour d'horizon de la jurisprudence rendue par le Tribunal fédéral dans les principaux domaines d'activité de l'Etude, soit le droit pénal économique et le recouvrement d'actifs (asset recovery).

Sans prétendre à l'exhaustivité, seront reproduits ci-après les considérants consacrant le raisonnement juridique
principal développé par notre Haute juridiction sur les thématiques suivantes : droit de procédure pénale, droit pénal économique, droit international privé, droit de la poursuite et de la faillite, ainsi que le droit de l'entraide
internationale.

I. PROCÉDURE PÉNALE

TF 7B_158/20231 du 6 août 2024 | Portée du secret professionnel de l'avocat sur un rapport d'enquête interne fondé sur des copies de documents bancaires et produit devant la FINMA (art. 264 CPP)

  • Le Ministère public zurichois (« Ministère public/Recourant») a mené une enquête pénale contre D. pour suspicion d'infraction à la loi fédérale sur la concurrence déloyale. D., était soupçonné d'avoir communiqué des informations inexactes ou du moins trompeuses aux investisseurs de B. Groupe SA (« SA »).
  • Par ordonnance de dépôt du 31 mai 2022, le Ministère public a exigé de B. SA la remise du rapport d'enquête de C. SA concernant D., y compris toutes les annexes et tous les suppléments, aussi bien dans la version du 20 décembre 2021, qui a été divulguée à la FINMA, que la version finale. En outre, il a également requis la communication d'éventuels rapports séparés de E. SA (étude d'avocats), en sa qualité de mandataire de B. SA ou auxiliaire de C. SA.
  • SA s'est conformé à l'ordonnance en remettant les projets de rapport de C. SA concernant D., dans la version du 20 décembre 2021 et finale, les documents qui y étaient référencés ainsi qu'un relevé du 26 novembre 2021 qui avait été établi par E. SA. Simultanément, B. SA a demandé l'apposition des scellés sur ces documents.
  • Par jugement du 24 novembre 2022, le Bezirksgericht zurichois a rejeté la demande de levée des scellés du Ministère public et a ordonné la restitution des documents. Le Ministère public a recouru auprès du Tribunal fédéral.
  • Dans cet arrêt, notre Haute Cour a dû répondre à trois questions juridiques. Premièrement, est-ce que l'établissement des faits est considéré comme une activité typique de l'avocat et est en conséquence protégé par le secret professionnel ? Deuxièmement, est-ce que les moyens de preuves préexistants cités dans le rapport d'enquête ou annexés à celui-ci, sont protégés par le secret ? Troisièmement, est-ce que les documents, qui étaient considérés comme faisant partie intégrante de la correspondance de l'avocat, ont perdu leur caractère secret du fait de la divulgation volontaire à la FINMA ?
  • (i) Au sujet de la première question, le Tribunal fédéral a commencé par rappeler que le secret professionnel de l'avocat a pour but de protéger la confiance du client en son avocat. Sont protégés par le secret professionnel, les secrets qui ont été confiés à l'avocat et à ses auxiliaires en raison de leur profession ou dont ils ont eu connaissance dans l'exercice de celle-ci (art. 171 CPP). Ne sont en revanche pas couvertes les informations reçues par un avocat dans le cadre de prestations de services qui dépassent l'activité typique de la profession (consid. 3.1).
  • La jurisprudence du Tribunal fédéral a ajouté qu'une gestion correcte et minutieuse du mandat suppose non seulement l'examen de la situation juridique, mais également l'établissement des faits pertinents. Cette tâche fait partie du domaine central de l'activité de l'avocat et est en conséquence protégée par le secret professionnel (consid. 3.1).
  • Toujours selon la jurisprudence, le critère décisif pour la délimitation entre activité typique ou atypique de l'avocat réside dans le caractère objectivement prépondérant des éléments commerciaux et opérationnels ou des éléments spécifiques à l'avocat (consid. 3.1).
  • Le Tribunal fédéral a finalement rappelé qu'il n'y a pas d'activité typique lorsque l'avocat effectue des tâches de compliance, comme la supervision interne liée à la législation sur le blanchiment d'argent (consid. 3.1).
  • In casu, notre Haute Cour a retenu que l'argumentation du Recourant qui considérait que la jurisprudence en la matière devait être élargie, en ce sens qu'elle devait retenir que la clarification de faits complexes ne constituait pas une activité typique de l'avocat couverte par le secret, puisqu'elle ne nécessitait pas d'être spécialement effectuée par une étude d'avocats, ne pouvait pas être suivie (consid. 3.3).
  • En effet, le Tribunal fédéral a considéré que la nécessité de faire appel à une étude d'avocats n'était pas pertinente pour délimiter l'activité typique ou atypique de l'avocat. Ce qui était déterminant était plutôt d'évaluer si les obligations de documentation et de conservation prescrites par la loi étaient contournées en les déléguant à une étude d'avocats, ce qui n'était pas le cas en l'espèce. Il était indiscutable que l'enquête avait été réalisée dans le cadre de la représentation et du conseil juridique concernant des litiges existants ou à venir (consid. 3.3).
  • Partant, pour cette première question juridique, les juges de Mon-Repos ont retenu que l'établissement des faits était partie intégrante de l'activité typique de l'avocat et était dès lors couvert par le secret professionnel (consid. 3.3).
  • (ii) S'agissant de de la deuxième question, le Tribunal fédéral a rappelé que selon l'art. 264 al. 1 let. a, c et d CPP, la correspondance de l'avocat englobe tout ce qui est intégré dans la relation de confiance particulière entre l'avocat et son client, qui prend naissance de cette relation ou qui en découle (consid. 4.1).
  • Notre Haute Cour a tout de même relativisé ce concept dans la mesure où elle a admis que les moyens de preuve ne pouvaient pas être définitivement soustraits aux autorités pénales en les intégrant à une relation protégée par le secret professionnel (consid. 4.1).
  • In casu, le Tribunal fédéral a constaté qu'il n'était pas contesté que les documents bancaires internes qui avaient été examinés par les avocats en vue de l'établissement du rapport d'enquête n'étaient pas protégés en tant que tels par le secret professionnel. Cependant, les documents litigieux étaient des copies et non des originaux. Le risque que des moyens de preuve soient définitivement soustraits à l'autorité pénale était donc exclu dans cette situation. Les copies avaient été créées et jointes au rapport d'enquête en tant qu'annexes, car elles étaient jugées pertinentes pour le mandat. Cela signifiait donc que ces documents avaient été intégrés dans le cadre de la relation de confiance protégée entre l'avocat et son client, et étaient donc couverts par le secret professionnel (consid. 4.2 cum3).
  • (iii) S'agissant de ls troisième question, notre Haute Cour a commencé par rappeler la jurisprudence topique : pour qu'un fait soit considéré comme secret, il faut réaliser une double condition : (1) le fait ne doit être connu que d'un cercle restreint de personnes et ne doit être ni notoire, ni accessible à tous (condition objective) ; (2) il doit exister un intérêt à garder le secret, et une volonté pour le maître du secret, de vouloir garder le fait ainsi (condition subjective). Par ailleurs, la divulgation volontaire de faits secrets à des tiers choisis n'a pas pour conséquence que ces faits soient considérés comme notoires, ni même que le maître du secret veuille rendre ces informations accessibles à tous et à un chacun (consid. 5.1).
  • In casu, conformément à ce qu'a retenu l'instance précédente, les juges de Mon-Repos ont considéré que la remise des documents litigieux à la FINMA n'avait pas pour conséquence d'entrainer la perte du caractère secret de ces documents et ceci même si la divulgation était volontaire de la part du détenteur du secret (consid. 5.2).
  • Partant, le recours a été rejeté.

TF 7B_355/2023 du 30 juillet 2024 | Application excessivement stricte des règles en matière de motivation pour un recours formé contre une ordonnance de non-entrée en matière pour violation du secret de fonction (art. 385 CPP)

  • Une instruction pénale a été diligentée par B. (« Intimé»), Procureur du Ministère public fribourgeois, à l'encontre de A. (« Recourant ») pour des faits ayant eu lieu le 26 août 2016 en lien avec l'incendie de la voiture de ce dernier.
  • Depuis juillet 2019, une procédure en annulation de la poursuite a opposé le Recourant à C. par-devant le Tribunal régional de Viamala, aux Grisons. Le Recourant a contesté la validité d'une reconnaissance de dette signée le 6 janvier 2017 en faveur de C. en prétendant être incapable de discernement au moment de la signature du document, notamment en raison d'un état de stress post-traumatique causé par les événements en lien avec l'incendie de la voiture.
  • Le 2 février 2021, C. a demandé au Ministère public fribourgeois si le Recourant avait fait l'objet d'une ordonnance pénale. À l'appui de sa demande, il a indiqué avoir un intérêt digne de protection à la consultation du dossier (art. 101 al. 3 CPP), du fait que si le Recourant avait lui-même organisé l'accident allégué, son argumentation liée à son incapacité de discernement aurait été mise à mal par-devant les instances civiles.
  • Par courrier du 8 février 2021, l'Intimé a répondu à C. que l'instruction était toujours en cours et qu'aucune ordonnance pénale n'avait été rendue. Il avait ajouté que « [le Recourant] a[vait] été entendu à plusieurs reprises depuis les faits survenus le 26 août 2016 [...] et n'a[vait] pas fait valoir qu'il n'était pas en état d'être entendu en raison d'une incapacité de discernement».
  • Le 6 avril 2021, le Recourant a déposé plainte pénale contre l'Intimé pour violation du secret de fonction (art. 73 CPP cum 320 CPP). A deux reprises, le Procureur ad hoc nommé pour instruire l'affaire a refusé d'entrer en matière. Il a retenu que les renseignements fournis par l'Intimé à C. étaient couverts par le secret de fonction, mais que leur dévoilement avait été rendu licite par l'art. 101 al. 3 CPP. Le Recourant, qui a été débouté sur recours faute de motivation suffisante, a recouru auprès du Tribunal fédéral.
  • Le Recourant s'est plaint de formalisme excessif et de la violation de l'art. 385 CPP, en ce que la Chambre pénale du Tribunal cantonal fribourgeois (« Chambre pénale») a déclaré son recours irrecevable, au motif qu'il ne l'avait pas suffisamment motivé (consid. 2.1).
  • Au sens de l'art. 385 al. 1 CPP, si le code exige que le recours soit motivé, la personne ou l'autorité qui recourt doit indiquer précisément les points de la décision qu'elle attaque (let. a), les motifs qui commandent une autre décision (let. b) et les moyens de preuve qu'elle invoque (let. c). Conformément à ce que retient la jurisprudence, les motifs doivent être étayés sous l'angle des faits et du droit. La motivation d'un acte de recours doit être entièrement contenue dans l'acte lui-même et être complète. Toujours selon la jurisprudence, un simple renvoi à d'autres écritures n'est pas suffisant (consid. 2.2.1).
  • S'agissant d'ordonnances de non-entrée en matière, la jurisprudence impose que les motifs qui auraient dû inciter le Ministère public à poursuivre l'instruction pénale ressortent clairement du recours (consid. 2.2.1).
  • L'art. 385 al. 2 CPP concrétise l'interdiction, pour les autorités, du formalisme excessif. Au sens de cette disposition, si le mémoire ne satisfait pas aux exigences, l'autorité de recours le renvoie au recourant afin qu'il puisse le compléter dans un bref délai. Selon la jurisprudence, il y a formalisme excessif, constitutif d'un déni de justice formel (art. 29 al. 1 Cst), lorsque la stricte application des règles de procédure ne se justifie par aucun intérêt digne de protection, devient une fin en soi et complique de manière insoutenable la réalisation du droit matériel ou entrave de manière inadmissible l'accès aux tribunaux (consid. 2.2.2).
  • Dès lors, la question juridique qu'a dû analyser notre Haute Cour a été de déterminer si le Recourant avait suffisamment étayé ses arguments auprès de la Chambre pénale de sorte à remplir la condition de motivation suffisante requise par la loi aux fins d'infirmer l'ordonnance de non-entrée en matière du Procureur ad hoc qui rejetait d'instruire une éventuelle violation du secret de fonction par l'Intimé (consid. 3).
  • In casu, le Tribunal fédéral a constaté que dans la partie intitulée « Contexte procédural » de l'écriture du Recourant, ce dernier avait contesté le raisonnement du Procureur ad hoc relatif au refus d'ouvrir une instruction au motif que les conditions de l'art. 309 al. 1 let. a CPP ne seraient pas remplies et ceci malgré les actes entrepris dans le cadre de l'investigation préliminaire (consid. 3.1).
  • Sous la rubrique « Motifs de recours », le Recourant avait exposé en détail les raisons selon lesquelles l'Intimé s'était rendu coupable d'une violation du secret fonction et, par conséquent, pourquoi le Procureur ad hoc aurait méconnu la portée de l'art. 310 CPP et du principe in dubio pro duriore (consid. 3.2).
  • Par ailleurs, s'agissant de l'ordonnance de non-entrée en matière du 13 octobre 2022, les juges de Mon-Repos ont constaté que le Recourant avait également contesté la démarche du Procureur ad hoc qui avait sollicité de C. qu'il justifie de son intérêt digne de protection a posteriori des informations qui lui avaient été transmises, ce qui avait eu pour conséquence de mettre à mal les exigences les plus élémentaires en matière de bonne foi et de sécurité du droit (consid. 3.3).
  • In fine, notre Haute Cour a également relevé que le Recourant avait attaqué la motivation du Procureur ad hoc au sujet de la nature confidentielle des informations partagées par l'Intimé. En particulier, le Recourant avait accentué le fait que « [sa] capacité de discernement lors de ses auditions était bien sujette à réserve» et que l'Intimé ne pouvait pas l'ignorer puisqu'il aurait « évoqué la possibilité de le soumettre à une expertise médico-légale s'agissant de son aptitude à participer valablement aux actes d'instruction » (consid. 3.4).
  • Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal fédéral a retenu, d'une part, que le Recourant avait exposé de manière distincte et reconnaissable les points de l'ordonnance de non-entrée en matière qui étaient attaqués. D'autre part, il avait exposé, en fait et en droit, les motifs qui auraient dû conduire le Procureur ad hoc à ouvrir formellement une instruction contre l'Intimé pour violation du secret de fonction. C'est donc à tort que la Chambre pénale a considéré que le recours n'était pas suffisamment motivé (consid. 3.5).
  • Partant, le recours a été admis

TF 7B_76/2024 du 11 juillet 2024 | Incompétence du tribunal des mesures de contrainte concernant l'approbation d'une découverte fortuite provenant de la surveillance à l'étranger d'une plateforme de communication (art. 280 let. a CPP)

  • Le Ministère public argovien (« Ministère public») a mené une enquête pénale contre A. (« Recourant ») pour soupçon d'infractions qualifiées à la loi sur les stupéfiants, blanchiment d'argent et faux dans les titres.
  • Par décision du 8 décembre 2021, le ZwangsmassnahmengerichtTribunal des mesures et de contrainte ») a autorisé l'utilisation de dispositifs techniques de surveillance acoustique (art. 280 let. a CPP) dans l'appartement et le véhicule du Recourant jusqu'au 2 mars 2022.
  • Par commission rogatoire du 25 mai 2022, le Ministère public a demandé aux autorités de poursuite françaises via Eurojust la remise de toutes les communications d'un utilisateur de la plateforme de communication Sky ECC.
  • Le 8 juillet 2022, Eurojust a transmis au Ministère public les enregistrements électroniques souhaités via un lien de téléchargement.
  • Le 25 août 2022, le Tribunal des mesures et de contrainte a autorisé l'utilisation des données découvertes de manière fortuite résultant de la surveillance étrangère de la plateforme de communication Sky ECC dans le cadre de l'enquête pénale contre le Recourant.
  • Après avoir recouru sans succès auprès de l'Obergericht contre les décisions du 8 décembre 2021 (surveillances acoustiques) et du 25 août 2022 (utilisation des enregistrements transmis par voie d'entraide judiciaire), le Recourant a interjeté un recours auprès du Tribunal fédéral.
  • Le Recourant a notamment fait valoir que le Tribunal de mesures de contrainte n'était pas compétent pour autoriser l'exploitabilité des données issues de la surveillance d'une plateforme de communication à l'étranger effectuée dans le cadre de l'entraide judiciaire et que partant ces preuves devaient être retirées du dossier (consid. 3.1).
  • Dans son arrêt de principe (TF 7B_159/2022 concernant la plateforme de communication ANOM), le Tribunal fédéral a jugé que, dans des cas tels que le présent, les art. 269 ss CPP n'étaient pas applicables. Par ailleurs, n'était pas non plus envisageable une application par analogie des art. 274 et 278 CPP, qui, d'une part, laisserait supposer l'existence d'une lacune juridique, du fait qu'une compétence attributive n'avait pas été ordonnée en faveur du tribunal des mesures de contrainte. D'autre part, cela attribuerait une compétence par analogie à ce dernier alors qu'aucune autorisation préalable n'était requise pour l'utilisation de documents obtenus par le biais de l'entraide judiciaire (consid. 3.2).
  • In casu, le Tribunal fédéral a constaté que la compétence du Tribunal des mesures de contrainte n'était pas donnée La décision du 25 août 2022 devait simplement être annulée d'office sans avoir à être remplacée (consid. 3.3).
  • Partant, le recours a été rejeté.

II. DROIT PÉNAL ÉCONOMIQUE

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III. DROIT INTERNATIONAL PRIVÉ

TF 4A_621/20232 du 6 août 2024 | Application de la Convention de Lugano en lien avec un Distribution Agreement comportant une clause d'arbitrage (art. 1 al. 1 et 2 CL) conciliabilité admise de deux décisions entre les mêmes parties (art. 34 ch. 3 CL) et refus de renvoi en arbitrage (art. II ch. 3 Convention de New York)

  • Intimée») est une société anonyme de droit slovène dont le siège est à U. en Slovénie. A. (« Recourante ») est une société anonyme de droit suisse ayant son siège à V., canton d'Argovie. Le 9 octobre 2009, l'Intimée a signé une convention appelée « Distribution Agreement », qui contenait une clause d'arbitrage en faveur d'une procédure d'arbitrage devant la Slovenian Chamber of Commerce (convention d'arbitrage). Il y avait un litige entre les parties concernant la partie contractante de l'Intimée en vertu du « Distribution Agreement ».
  • Par jugement du 20 novembre 2017, le tribunal arbitral s'est déclaré incompétent au motif que la Recourante n'était pas partie à la convention d'arbitrage. L'intimée a alors introduit une action devant le Handelsgericht du canton d'Argovie qui s'est aussi déclaré incompétent le 5 novembre 2018. Il a renvoyé l'Intimée à la procédure d'arbitrage au sens de l'art. II al. 3 de la Convention du 10 juin 1958 pour la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales étrangères (« Convention de New-York»). L'Intimée a ensuite introduit une nouvelle action portant en grande partie sur les mêmes prétentions devant le Kreisgericht de Koper, en Slovénie qui a admis la demande et a obligé la Recourante à verser EUR 593'075,11 à l'Intimée, en raison du contrat qui les liait.
  • Par commandement de payer, l'Intimée a poursuivi la Recourante en se fondant sur ce jugement pour un montant de CHF 673'067,65 plus intérêts.
  • La Recourante a fait opposition et l'Intimée a obtenu la mainlevée définitive par le Bezirksgericht de Zofingen, ce qui a été confirmé par l'Obergericht du canton d'Argovie. En effet, pour motiver sa décision, celui-ci a indiqué qu'il existait une décision d'un État partie (Slovénie) à la Convention de Lugano. La Recourante a demandé au Tribunal fédéral d'annuler cette décision et de rejeter la demande de mainlevée définitive.
  • La Recourante s'est plainte d'abord d'une violation de l'art. 1 al. 2 let. d CL en ce que l'instance inférieure aurait appliqué à tort la CL à la reconnaissance incidente et à la déclaration constatant la force exécutoire du jugement slovène (consid. 5).
  • Le Tribunal fédéral a rappelé que la CL s'applique en matière civile et commerciale (art. 1 al. 1 CL) et que l'art. 1 al. 2 let. d CL exclu l'arbitrage de son champ d'application matériel, y compris les procédures devant les juridictions étatiques. Il indique cependant que si un tribunal d'un État contractant statue sur le fond de l'affaire malgré l'existence d'une convention d'arbitrage, l'exclusion de l'arbitrage selon l'art. 1 al. 2 let. d CL ne s'applique pas (consid. 5.3).
  • In casu, notre Haute Cour a considéré que le jugement slovène avait statué sur un litige entre les parties résultant d'un contrat de vente et donc sur une affaire civile au sens de l'art. 1 al. 1 CL. Il a ajouté que le fait que le Tribunal slovène ait statué à titre préjudiciel sur la validité ou la portée de la convention d'arbitrage n'y changeait rien, tout comme le fait que le Handelsgericht ait jugé la convention d'arbitrage valable (consid. 5.4).
  • La Recourante s'est ensuite plainte d'une violation de l'art. 34 ch. 3 CL, soit que le jugement slovène est incompatible avec le jugement du Handelsgericht du canton d'Argovie (consid. 6.1 ss).
  • Les juges de Mon-Repos ont précisé que l'art. 34 ch. 3 CL devait être interprété restrictivement et qu'une incompatibilité devait se manifester dans les effets de la décision judiciaire. L'incompatibilité est établie lorsque la décision étrangère tranche différemment le même objet du litige ou qu'elle se fonde sur des prémisses incompatibles avec la force de chose jugée matérielle ou l'effet formateur du jugement national (consid. 6.3).
  • Le Tribunal fédéral a considéré qu'il fallait déterminer les effets juridiques de la décision du Handelsgericht. Il a ainsi considéré que si le tribunal arbitral convenu, dont le siège est à l'étranger, s'est déclaré incompétent et que cette décision arbitrale est reconnue en Suisse, les tribunaux étatiques en Suisse sont liés par la décision arbitrale et non (plus) par la décision négative sur la compétence d'un autre tribunal étatique qui s'est déclaré incompétent en raison de la convention d'arbitrage qu'il considère comme valable (consid. 6.4.2).
  • In casu, notre Haute Cour a déterminé que le tribunal arbitral convenu, dont le siège est en Slovénie, s'était déclaré incompétent au motif que la Recourante n'était pas partie à la convention d'arbitrage. Le fait que cette sentence arbitrale n'aurait pas été reconnue en Suisse n'avait pas été invoqué par la Recourante et ne ressortait pas de la décision attaquée. Elle a conclu que les tribunaux suisses étaient donc liés par cette décision négative sur la compétence du tribunal arbitral et non par les constatations du Handelsgericht sur la convention d'arbitrage. De plus, le jugement du Handelsgericht n'avait autorité de la chose jugée que dans la mesure où le Handelsgericht a constaté sa propre incompétence. En définitive, ce jugement n'avait pas déployé d'effets juridiques qui pourraient être potentiellement incompatibles avec les effets juridiques du jugement slovène au sens de l'art. 34 ch. 3 CL (consid. 6.4.3 ss).
  • La Recourante s'est enfin plainte d'une violation de l'art. II ch. 3 de la Convention de New York (consid. 7).
  • Les juges de Mon-Repos ont rappelé ce que prévoit l'art. II ch. 3 Convention de New York, soit que le tribunal d'un État contractant doit renvoyer les parties à l'arbitrage, à moins que la convention soit caduque, inopérante ou non-susceptible d'être appliquée. Il a ajouté que si le tribunal arbitral convenu, dont le siège est à l'étranger, se déclare incompétent au motif qu'une partie n'est pas couverte par la convention d'arbitrage, cette décision arbitrale - sous réserve de sa reconnaissance - est contraignante pour tout tribunal étatique en Suisse saisi ultérieurement. Ainsi, en raison de cet effet contraignant, les tribunaux étatiques ne sont pas tenus de renvoyer les parties à la procédure d'arbitrage, si le tribunal arbitral convenu se déclare incompétent, en raison qu'une partie n'est pas couverte par la convention et que cette décision est reconnue (consid. 7.2.1).
  • In casu, notre Haute Cour a jugé que le tribunal arbitral convenu s'était déclaré incompétent au motif que la Recourante n'était pas partie à la convention d'arbitrage. Il existait donc une décision définitive et contraignante sur la question de la compétence du tribunal arbitral convenu. Ainsi, l'instance inférieure était donc liée par cette décision sur la compétence du tribunal arbitral et n'était donc ni obligée, ni en droit de renvoyer les parties à l'arbitrage conformément à l'art. II ch. 3 de la Convention de New York à la procédure d'arbitrage. L'art. II ch. 3 de la Convention de New York n'a donc pas été violé, bien que l'instance précédente a renoncé à un renvoi à l'arbitrage (consid. 7.3).
  • Partant, le recours a été rejeté.

IV. DROIT DE LA POURSUITE ET DE LA FAILLITE

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V. ENTRAIDE INTERNATIONALE

Footnotes

1. Destiné à publication

2. Destiné à publication

The content of this article is intended to provide a general guide to the subject matter. Specialist advice should be sought about your specific circumstances.

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