L'irresponsabilité pour cause de trouble mental est une notion bien connue des praticiens du droit pénal.
Aux termes de l'article 122-1 du Code pénal, «n'est pas pénalement responsable la personne qui était atteinte, au moment des faits, d'un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes».
Si la personne dont le discernement est aboli en raison d'un trouble mental n'est pas accessible à la sanction pénale, qu'en est-il de la sanction disciplinaire en droit du travail?
Un salarié a fait l'objet d'un licenciement pour faute grave pour avoir envoyé des messages menaçants et insultants à une collègue de travail.
Devant les juges du fond, celui-ci ne contestait pas la matérialité de ces faits, mais soutenait qu'au moment de leur commission, il se trouvait «dans un état psychique fortement altéré pouvant obérer ses facultés de discernement quant au caractère répréhensible de son comportement».
Cet argumentaire s'appuyait sur la production d'éléments médicaux d'un médecin psychiatre qui attestaient qu'il souffrait durant cette période de troubles du comportement, et avait d'ailleurs fait l'objet, quelques jours après les faits en cause, d'une hospitalisation sous contrainte pour «décompensation psychotique» liée à une rupture de traitement depuis plusieurs mois, et était en arrêt maladie pour cette pathologie au moment du licenciement.
La Chambre sociale de la Cour de cassation*confirme l'arrêt de la Cour d'appel qui a retenu que les faits reprochés au salarié ne lui étaient pas imputables, et qu'ainsi le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Pour tout fondement juridique, la haute juridiction vise l'article L1235-1 du Code du travail, selon lequel le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties.
Notre avis: Cette décision est à notre sens contestable, car non seulement elle exonère le salarié de sa responsabilité disciplinaire, mais elle invalide le licenciement fondé sur un comportement réel, et pénalise l'employeur qui n'a fait que protéger la santé et la sécurité de la salariée victime d'agissements avérés et incontestés (en l'espèce l'employeur a été condamné à verser 15.000 euros au salarié à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse).
Cet arrêt apparaît d'autant plus surprenant que la Chambre sociale semble depuis quelques années vouloir donner une prééminence au respect de l'obligation de sécurité lorsque celle-ci est mise en balance avec des intérêts divergents (voir notamment notre hebdo du 23 janvier 2025 sur l'arrêt du 8 janvier 2025, qui consacre la priorité de l'obligation de sécurité sur l'obligation de réintégration d'un salarié harceleur).
* Cass. Soc., 5 mars 2025, n°23-50.022
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