I. Introduction
1. Sans prétention à l'exhaustivité, nous revenons ici en particulier sur certains arrêts rendus en 2023 par le Tribunal fédéral dans le domaine du droit pénal économique. Cette chronique étant en premier lieu destinée aux praticiens, elle se conçoit avant tout comme un outil permettant aux lecteurs de découvrir, sous une forme casuistique et synthétisée, les éléments essentiels de ces décisions. Compte tenu des contraintes de place, nous avons procédé à un choix, parfois arbitraire, des arrêts retenus. Ceuxci seront présentés en suivant la systématique du CP1 . À titre complémentaire, certaines jurisprudences relevant du droit pénal accessoire seront également mentionnées, de même que quelques décisions ciblées du Tribunal pénal fédéral qui nous paraissaient présenter un intérêt particulier dans le contexte du droit pénal économique.
II. Dispositions générales du CP: Créance compensatrice (art. 71 CP)
2. Le séquestre, en vue de l'exécution d'une créance compensatrice au sens de l'art. 71 al. 3 aCP, de sommes provenant de prestations d'assurance ou de revenus d'une activité professionnelle, et non pas d'une quelconque activité illicite, n'est pas abusif ni excessivement rigoureux. En effet, il s'agit d'une mesure conservatoire qui ne nécessite aucun lien de connexité avec les faits faisant l'objet de l'instruction pénale2 .
III. Dispositions spéciales du CP
A. Abus de confiance (art. 138 CP)
3. Le rôle de curateur d'un couple de personnes âgées admis dans un établissement médico-social implique des responsabilités particulières. Dès lors, le curateur adopte un comportement pénalement significatif sous l'angle de l'abus de confiance qualifié (art. 138 ch. 1 al. 1 et ch. 2 CP), lorsqu'il décide, alors qu'on lui a confié la tâche de vider l'appartement des époux et de trier puis déposer leurs biens dans un garde-meuble désigné à cet effet, de stocker certains de ces biens dans le coffre de l'étude de notaire au sein de laquelle il est employé en qualité de comptable. En effet, il se doit de garder ces biens à la disposition des personnes concernées tant que dure son mandat de curateur, afin de maintenir la substance du patrimoine dont la gestion lui a été confiée. Il s'agit donc bien d'une appropriation illégitime occasionnant un dommage important, ce d'autant plus lorsque les biens en question sont des objets de grande valeur. Par ailleurs, le curateur qui accapare ces objets sans droit et sans volonté de les restituer aux époux agit intentionnellement et dans un dessein d'enrichissement illégitime3 .
4. Selon la jurisprudence bien établie du Tribunal fédéral, les actes de disposition de valeurs patrimoniales opérés par un organe de manière contraire à ses obligations, causant un dommage à la société, constituent en général des actes de gestion déloyale selon l'art. 158 CP, dans la mesure où le patrimoine social n'est pas confié aux organes au sens de l'art. 138 CP. Tel n'est cependant pas (plus) le cas lorsque le comportement de l'auteur sort manifestement du cadre de son activité d'organe. L'organe d'une société, tout comme les organes de corporations de droit public expressément mentionnés à l'art. 138 ch. 2 CP, peuvent se rendre punissables d'abus de confiance, nonobstant leur appartenance organique à de telles entités, notamment lorsque le comportement incriminé est dépourvu de tout lien avec l'activité commerciale et que l'organe a pour seul objectif de s'approprier des objets ou des valeurs patrimoniales de la société à des fins d'enrichissement personnel. Un employé administra-
Footnotes
1 Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP), RS 311.
2 TF, 6B_861/2023, 13.4.2023, c. 2.3.
3 TF, 6B_1169/2022, 30.6.2023, c. 2.3.1.
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