Dans l'affaire Uppal Estate v The King, 2025 TCC 34, la Cour canadienne de l'impôt (la « Cour de l'impôt ») a conclu que le défendeur (la « Couronne ») doit énoncer avec précision les hypothèses de fait formulées par le Ministre du Revenu national (le « Ministre ») dans le cadre de l'établissement de la cotisation du contribuable. La Couronne ne peut pas ajouter des hypothèses de fait au stade de l'appel qui sont incompatibles avec l'argument principal invoqué par le Ministre à l'appui de la cotisation. Même si la Couronne peut ajouter des faits supplémentaires pour étayer un argument subsidiaire à l'appui de sa cotisation, elle doit le faire ailleurs dans sa réponse à l'avis d'appel et non dans la partie « Hypothèses ». Il incombe à la Couronne de prouver ces faits supplémentaires, alors que les hypothèses sont présumées exactes (si aucun élément de preuve n'est présenté pour les contredire). En outre, la Cour de l'impôt a conclu que la Couronne ne peut pas, comme argument subsidiaire à l'appui d'une cotisation, demander à la Cour d'imposer une pénalité qui n'a pas été imposée par le Ministre.
Cette affaire est importante parce qu'elle montre clairement que la Couronne ne peut pas, sous le couvert d'un argument subsidiaire, essayer d'élaborer ses propres hypothèses ni imposer des pénalités qui n'ont pas été imposées auparavant.
Les faits
Uppal est décédé. Le contribuable était donc sa succession. Le Ministre a allégué que le contribuable avait omis de déclarer le revenu tiré de la vente d'actions de Ranger Gold Corp (« Ranger»), car M. Uppal était le propriétaire effectif à la fois des actions immatriculées en son propre nom et des actions immatriculées au nom de Chambord Media Inc. (« Chambord »), une société qu'il détenait. Le Ministre a également imposé des pénalités pour faute lourde. Le contribuable a fait appel devant la Cour de l'impôt.
Dans sa réponse à l'avis d'appel du contribuable, la Couronne a déclaré ce qui suit :
- l'argument principal invoqué par le Ministre à l'appui de la cotisation était que M. Uppal était le propriétaire effectif des actions immatriculées à son nom ainsi que des actions immatriculées au nom de Chambord;
- l'argument subsidiaire du Ministre était que Chambord était le propriétaire effectif des actions immatriculées en son nom.
La Couronne a également indiqué que le Ministre, en établissant la cotisation du contribuable, a supposé comme un fait, à titre subsidiaire, que le contribuable avait agi « [traduction] seul ou conjointement avec Chambord » dans le cadre de l'achat des actions. La Couronne a également àvancé à titre subsidiaire que le contribuable devrait être redevable de pénalités supplémentaires pour avoir omis de produire les formulaires T1134/T1135, même si le Ministre avait seulement imposé des pénalités pour faute lourde et aucune autre pénalité.
Le contribuable a demandé la radiation des hypothèses relatives à la propriété effective unique ou conjointe des actions au motif que l'hypothèse de fait était incompatible avec l'argument principal du Ministre à l'appui de la cotisation, selon lequel M. Uppal était le propriétaire effectif des actions, et que le Ministre ne pouvait pas formuler des hypothèses de fait à titre subsidiaire. Le contribuable a également demandé la radiation des autres pénalités parce que la Couronne demandait à la Cour de l'impôt d'appliquer des pénalités qui n'avaient pas été imposées par le Ministre dans le cadre d'une cotisation.
Analyse
Le juge Graham a donné raison au contribuable sur les deux questions et a accueilli la requête en radiation en autorisant la Couronne à modifier sa réponse.
Sur la question des hypothèses, le juge Graham a souligné le rôle unique que jouent les hypothèses de fait dans la réponse de la Couronne. Il incombe au contribuable de réfuter les hypothèses de fait sur lesquels reposent l'argument principal du Ministre à l'appui de sa cotisation, lesquelles sont réputées être vraies. Il n'incombe pas au contribuable de réfuter les faits invoqués par la Couronne qui ne soutiennent pas l'argument principal du Ministre à l'appui de sa cotisation. La Couronne aurait dû présenter les hypothèses qui fondent cet argument principal dans les hypothèses de fait, et présenter les autres faits nécessaires au soutien d'un argument subsidiaire à l'appui de sa cotisation dans une partie distincte de la réponse.
Le juge Graham a estimé que l'utilisation inappropriée par la Couronne d'hypothèses de fait était préjudiciable au contribuable, en raison de leur incohérence. Il ne peut pas être vrai, à la fois, que M. Uppal était le propriétaire effectif des actions (argument principal à l'appui de la cotisation) et que Chambord était le propriétaire effectif des actions (argument subsidiaire). Les incidences fiscales découlant de ces deux hypothèses de fait seraient différentes :
- Si M. Uppal était le propriétaire effectif des actions, son revenu non déclaré pourrait être réduit du coût d'acquisition des actions et son revenu non déclaré constituerait un gain en capital imposable si les actions étaient détenues au titre de capital.
- Si Chambord était le propriétaire effectif des actions, le revenu non déclaré de M. Uppal pourrait être fondé sur l'intégralité du produit de leur vente sans aucune réduction pour tenir compte du coût des actions, et l'intégralité du produit de la vente aurait constitué un avantage imposable et non un gain en capital imposable.
Sur la question des pénalités, le juge Graham a conclu que la Cour de l'impôt n'a pas le pouvoir d'augmenter le montant d'une cotisation ni d'imposer une pénalité qui n'a jamais été imposée par le Ministre. La Loi de 'impôt sur le revenu ne confère qu'au Ministre le pouvoir d'imposer des pénalités et, si le Ministre souhaite exercer ce pouvoir, il doit le faire dans le cadre de la cotisation. Un fondement subsidiaire à l'appui d'une cotisation ou un fondement subsidiaire fondé sur le paragraphe 152(9) ne saurait obliger la Cour de l'impôt à imposer de nouvelles pénalités. Comme les pénalités visées aux formulaires T1134/T1135 n'ont rien à voir avec des pénalités pour faute lourde, le juge Graham a autorisé la radiation des parties de la réponse alléguant ces nouvelles pénalités.
À retenir
Dans un régime fiscal reposant sur l'autocotisation, le Ministre est autorisé à formuler des hypothèses de fait sur lesquelles reposent son argument principal à l'appui de sa cotisation. Il incombe alors au contribuable de réfuter les hypothèses de fait sur lesquelles se fondent la cotisation. Si le Ministre a d'autres théories alternatives, la Couronne doit présenter des faits supplémentaires séparément, faits qu'il lui incombe de prouver.
Seul le Ministre peut imposer des pénalités, et non la Cour de l'impôt. La Couronne ne peut donc pas demander à la Cour de l'impôt d'imposer de nouvelles pénalités qui n'ont jamais été imposées par le Ministre.
To view the original article click here
The content of this article is intended to provide a general guide to the subject matter. Specialist advice should be sought about your specific circumstances.