Introduction

Dans une décision récente1 (disponible uniquement en anglais), le Tribunal des droits de la personne de la Colombie-Britannique (le « Tribunal ») a jugé que la décision d'un employeur de congédier une personne à son emploi était liée aux efforts que déployait cette personne pour dénoncer la discrimination dans le milieu de travail. Par conséquent, le Tribunal a conclu que l'employeur avait commis un acte de discrimination. Cette décision rappelle aux employeurs que l'imposition de mesures disciplinaires à l'égard d'un employé qui a une attitude agressive ou de confrontation en raison d'un milieu de travail discriminatoire pourrait constituer une violation du Code des droits de la personne (le « Code »). 

Que s'est-il passé?

La partie requérante est une personne non binaire, de genre fluide et transgenre qui utilise des pronoms neutres. Elle travaillait comme serveur pour le restaurant intimé. Au cours de l'emploi de la partie requérante, le gérant du bar du restaurant (le « gérant »), également un intimé visé par la requête, a employé à maintes reprises le pronom féminin et des surnoms non désirés et genrés pour la désigner. La partie requérante a demandé au gérant d'arrêter à plusieurs reprises, mais en vain.

L'employeur avait une politique sur l'inclusion et la lutte contre le harcèlement. La partie requérante a fait part de ses préoccupations à la direction concernant le comportement discriminatoire du gérant. La direction a parlé au gérant et lui a demandé d'utiliser le nom de la partie requérante et les bons pronoms, mais il n'a pas changé sa conduite. Lorsque la partie requérante a de nouveau signalé le problème à la direction, on lui a répondu que la question devrait attendre parce que l'employeur traitait d'autres problèmes de rendement avec le gérant et qu'il ne voulait pas « en mettre trop sur ses épaules ». En fin de compte, la partie requérante a été congédiée après avoir essayé elle-même de parler avec le gérant au sujet de sa conduite, ce qui a donné lieu à une discussion houleuse. Afin de justifier ledit congédiement, l'employeur a informé la partie requérante que son attitude avait simplement été « trop brusque » et que son « activisme » dépassait les bornes.

Quelle a été la décision du Tribunal?

Le Tribunal a précisé que, bien qu'il ne s'agit pas d'un cas où l'employeur était indifférent ou n'avait pris aucune mesure pour corriger la conduite problématique, l'employeur n'a pas réagi aux plaintes avec un sentiment d'urgence. Il n'était ni raisonnable ni approprié pour l'employeur de demander à la partie requérante de continuer à subir de la discrimination jusqu'à ce que l'employeur trouve le bon moment pour parler au gérant2.

Le Tribunal a cité des décisions antérieures en matière de droits de la personne où il a été conclu que, lorsqu'un employé a une attitude agressive ou de confrontation en raison d'un milieu de travail discriminatoire, des mesures disciplinaires imposées par l'employeur pour cette attitude constituent une violation du Code. Le Tribunal a jugé que c'était aussi le cas dans cette affaire3. En outre, le Tribunal est arrivé aux conclusions suivantes4 :

  • Il existait un lien clair entre l'identité sexuelle de la partie requérante et son congédiement, qui est attribuable à sa réaction à la discrimination. La partie requérante devait respecter une norme de conduite plus stricte que le gérant, et le contexte discriminatoire du conflit a été ignoré.
  • En définitive, l'employeur a conclu qu'il serait plus facile de congédier la partie requérante que d'adresser véritablement les problèmes. Ce faisant, il a fait preuve de discrimination à son égard.
  • Comme certains membres du personnel, et au moins un gestionnaire, ont mal réagi aux suggestions de la partie requérante concernant un environnement plus inclusif, l'employeur a conclu que la partie requérante n'était pas « compatible avec le reste de l'équipe » et que son attitude était « trop brusque » et, en fin de compte, a mis fin à son emploi. Ceci était directement lié à l'identité sexuelle.

Ayant conclu que les intimés avaient fait preuve de discrimination à l'égard de la partie requérante, le Tribunal lui a accordé des dommages-intérêts totaux de 30 000 $, que l'employeur doit payer.

Ce que les employeurs doivent retenir

Cette décision rappelle encore une fois aux employeurs que les signalements de discrimination et de harcèlement en milieu de travail doivent être pris au sérieux. Dans cette affaire, l'employeur a adopté certaines mesures pour remédier à la discrimination, mais celle-ci a persisté. Il n'était pas raisonnable de s'attendre à ce que la personne subisse de la discrimination jusqu'à ce que l'employeur trouve un bon moment pour intervenir. L'employeur aurait dû réagir avec un sentiment d'urgence.

Cette décision peut servir de mise en garde aux employeurs, qui doivent savoir que l'imposition de mesures disciplinaires à l'égard d'un employé qui a une attitude agressive ou de confrontation en raison d'un milieu de travail discriminatoire pourrait constituer une violation de la législation sur les droits de la personne. 

Footnotes

1  Nelson v. Goodberry Restaurant Group Ltd. dba Buono Osteria and others, 2021 BCHRT 137 (CanLII).

Ibid, par. 93 et 2

Ibid, par. 9.

Ibid,  par. 17 à 21.

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