Bien qu’elles soient plus courantes au sud de la frontière, les « fusions par absorption » gagnent en popularité au Canada comme mécanisme de gestion des questions d’ordre fiscal et réglementaire ainsi que des risques liés aux plans d’arrangement prévus par la loi.

Bien simplement, l’analogie de la « rivière qui part du confluent de deux cours d’eau », utilisée en droit canadien, ne peut s’appliquer à une fusion par absorption, comme l’illustre la Cour suprême du Canada dans R. c. Black & Decker Manufacturing Co. (1974), 15 C.C.C. (2d) 193, par. 5 et 6 (« Black & Decker »). En effet, dans le cadre d’une fusion par absorption, on ne renvoie pas à deux entités qui fusionnent pour former une nouvelle entité distincte, mais plutôt à une entité qui en absorbe une autre et qui poursuit ses activités comme une seule et même entité, même si elle est alors fusionnée avec cette autre entité. Même si elles sont expressément prévues par les lois de divers États américains, incluant le Delaware, ces fusions ne sont pas expressément autorisées par la Loi canadienne sur les sociétés par actions (la « LCSA ») ou par la loi de l’Alberta intitulée Business Corporations Act (la « BCA »), qui ne prévoient que l’approche de la « fusion d’entités » définie par le juge Dickson dans Black & Decker.

Les fusions par absorption semblent avoir été prises en considération par un tribunal canadien pour la première fois en 2006, alors que le juge Farley de la Cour supérieure de l’Ontario en a fait mention dans l’affaire de l’article 192 de la Loi canadienne sur les sociétés par actions et dans l’affaire de la proposition d’arrangement visant les Hôtels Fairmont, 2006 CanLII 57092 (CSO). Dans cette affaire, le juge Farley a soutenu que même si ces fusions n’étaient pas expressément prévues par la LCSA, les dispositions de l’article 192 de la LCSA portant sur les plans d’arrangement prévus par la loi avaient une portée assez large et étendue pour englober les fusions par absorption en tant que composante légitime et acceptable de ces plans d’arrangement.

Récemment, dans des décisions non publiées rendues en Alberta, la juge Romaine dans l’affaire Baytex/Raging River et le juge Nixon dans l’affaire Xtreme Drilling/Akita Drilling ont chacun décidé qu’une fusion par absorption était autorisée aux termes des dispositions de l’article 193 de la BCA. Il convient cependant de noter que le sens attribué au terme « arrangement » est vraisemblablement plus large dans l’article 193 de la BCA que dans l’article 192 de la LCSA, comme l’a affirmé le juge en chef Wittmann dans Enbridge Income Fund Holdings Inc., Re, 2010 ABQB 274.

Bien qu’elles ne soient pas encore couramment utilisées dans les plans d’arrangement canadiens, les fusions par absorption devraient continuer de gagner en popularité alors que les partenaires à la fusion cherchent à bénéficier des avantages fiscaux et réglementaires qui peuvent en découler.

Les plans d’arrangement qui prévoient des fusions par absorption sont approuvés au cas par cas. Par le passé, les tribunaux de l’Alberta ont examiné ces fusions tant selon une demande distincte d’approbation aux termes de l’article 193 présentée par les parties à la fusion que selon une demande habituelle d’approbation finale présentée par l’entité issue de la fusion. D’après de récentes observations, il semblerait que les tribunaux albertains (et vraisemblablement les tribunaux ontariens) ont acquis une bonne compréhension des questions entourant ces fusions et sont plus à l’aise avec les opérations qui en comportent, sous réserve bien entendu de la présentation d’une demande respectant les dispositions statutaires de la législation sur les sociétés par actions applicable et les critères juridiques établis dans BCE Inc. c. Détenteurs de débentures de 1976, 2008 CSC 69.

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