Le 15 juillet 2017, le gouvernement a publié le nouveau règlement proposé visant à modifier les procédures prévues au Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité). Ces modifications changeraient radicalement le processus d'introduction de procédures judiciaires, qui est actuellement basé sur des dossiers écrits, pour la tenue d'un procès portant sur la contrefaçon et la validité comprenant des interrogatoires et la communication de documents ainsi que des témoignages lors du procès. Ce nouveau règlement entrerait en vigueur le 21 septembre 2017. L'élimination des procédures sommaires est conforme à l'Orange Book publié aux États-Unis en application de la Loi Hatch-Waxman.

Le régime actuel prévu dans le Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité) est étrangement insolite et peu populaire auprès des parties concernées. La Cour ne disposait que d'un dossier écrit à partir duquel elle devait évaluer des preuves techniques parfois complexes. Il incombait à l'innovateur (la première personne ou le titulaire du brevet) de prouver que les allégations de non-contrefaçon et d'invalidité faites par le générique (la seconde personne) dans l'avis d'allégation (l'« AA ») étaient injustifiées. Les appels interjetés par les innovateurs dont les demandes ont été rejetées pouvaient être rejetés parce que l'avis de conformité (l'« AC ») avait déjà été délivré. Une demande n'ayant pas été acceptée était souvent suivie d'une poursuite pour contrefaçon, et mettant en cause la validité du brevet, ce qui engendrait le chevauchement des efforts des parties et de la Cour.

Lorsqu'il a conclu l'Accord économique et commercial global (l'« AECG ») avec l'Union européenne, le Canada s'est engagé à conférer à toutes les parties tous les droits d'appels en vertu du Règlement qui établissait un lien entre l'autorisation de médicaments génériques et la protection des droits de brevet. Cet engagement rendait nécessaire le remplacement des demandes introduites auprès de la Cour par des actions complètes donnant lieu à un seul procès par voie accélérée sur les questions de contrefaçon et de validité des brevets.

Le règlement proposé impose un fardeau plus important aux parties et à la Cour afin que se tienne un procès sur des questions de contrefaçon et de validité des brevets et que soit rendue une décision dans un délai de 24 mois. Judicieusement, le règlement proposé ne contient qu'un nombre limité de règles procédurales, laissant à la Cour le soin de traiter des autres questions procédurales afin que les solutions à cet égard évoluent au même rythme que l'expérience.

Le délai de 24 mois retenu

Dans le règlement proposé, la période actuelle de 24 mois pendant laquelle la ministre de la Santé ne peut pas délivrer d'AC est maintenue. Est également conservée l'exigence selon laquelle une action engagée en vertu du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité) doit faire l'objet d'une décision au plus tard 24 mois à partir du début du litige. Au Canada, ce délai serait considéré comme étant une « voie accélérée » menant au procès.

La « première personne » ou le titulaire du brevet ou les deux peuvent poursuivre une « seconde personne » pour contrefaçon de brevet en se basant sur la présentation réglementaire, ou sur le supplément à la présentation, de cette dernière. En plus de se défendre contre une telle action, la seconde personne pourrait présenter une demande reconventionnelle visant à faire invalider le brevet. La question ne sera plus de savoir s'il convient d'interdire à la ministre de la Santé de délivrer un AC. En vertu du nouveau régime, les fardeaux de preuve seraient mieux harmonisés à ceux liés aux litiges traditionnels mettant en cause les brevets. Selon le règlement proposé, la seconde personne est considérée comme étant une « personne intéressée » pouvant intenter des procédures en invalidité.

Les instances engagées en vertu du règlement proposé pourraient désormais viser toute revendication d'un brevet inscrit au registre des brevets, et non simplement les revendications relatives à un ingrédient médicinal, à une formulation, à une forme posologique ou à l'utilisation de l'ingrédient médicinal.

La réunion d'actions serait restreinte. Toutes les actions en contrefaçon de brevet qui ne peuvent être intentées en vertu du règlement ne pourraient pas être réunies. Il serait possible de réunir des actions distinctes présentées par la première personne et le propriétaire de brevet en réponse à l'AA et des actions distinctes présentées en réponse aux multiples AA qui portent sur différents brevets, mais qui sont signifiés à l'égard d'une même présentation. Les brevets inscrits au registre des brevets et mentionnés dans un AA ne pourront faire l'objet d'une action ultérieurement, à moins que la première personne ou le titulaire du brevet n'ait pas, dans le délai prévu au règlement, de motifs raisonnables pour intenter une action en vertu du règlement.

Actes de procédure

Selon le règlement proposé, la seconde personne devra signifier un AA à la première personne, mais les allégations d'invalidité devront être encore plus détaillées. La seconde personne devra énoncer en détail le fondement juridique et factuel des allégations et fournir des copies électroniques de tout document afférent étayant ces allégations. La seconde personne peut demander, et obtenir, les coordonnées de l'inventeur ainsi que tout carnet de laboratoire, rapport de recherche ou autre document pouvant être pertinent pour établir l'existence d'une propriété, d'un avantage ou d'une utilisation spécifique que la seconde personne affirme faire partie de l'invention à la date de dépôt de la demande de brevet. L'article portant sur les coordonnées d'anciens employés risque de faire en sorte que l'innovateur contrevienne aux lois européennes en matière de confidentialité.

En ce qui a trait aux allégations de non-contrefaçon, la seconde personne doit signifier, avec son AA, toute partie de sa présentation ou de son supplément qui pourrait être pertinente pour déterminer si un brevet inscrit serait contrefait. En examinant les parties pertinentes de la présentation ou du supplément, les premières personnes et les titulaires de brevets seront en mesure d'évaluer si un brevet inscrit serait contrefait. Les premières personnes et les titulaires de brevets pourraient demander la production d'autres parties de la présentation après avoir intenté une procédure.

Confidentialité

Vu que certains des documents sont produits avant que le processus de communication des documents soit entamé, le règlement proposé permettrait à la partie qui produit les documents d'imposer des règles raisonnables applicables aux parties pour préserver la confidentialité des documents en question. La Cour pourrait faire exécuter ces règles conçues par les parties ou imposer ses propres conditions, selon ce qu'elle considère comme le plus juste.

Gestion des dossiers

Selon l'étude d'impact de la réglementation, « [u]ne gestion de l'instance entreprise rapidement et de manière active aidera à contribuer au règlement rapide de l'instance. » Cela est le moins que l'on puisse dire. Dans le cas de brevets pharmaceutiques, la tenue d'un procès et l'obtention d'une décision au cours des 24 mois qui suivent requiert une gestion de dossiers serrée et la collaboration entre les parties. Les parties et leurs avocats devront agir de façon diligente relativement à l'exécution de leurs obligations en vertu du règlement proposé et collaborer de façon raisonnable afin d'accélérer le processus d'une action en contrefaçon. Lorsqu'une personne ne respecte pas ces exigences, la Cour pourrait abréger ou prolonger la période de 24 mois pendant laquelle la ministre ne peut délivrer d'AC; elle pourrait aussi en tenir compte au moment d'accorder les dépens.

La gestion des données doit s'appliquer à tous les dossiers introduits en vertu du règlement. Une conférence de gestion de l'instance se tiendrait peu après l'introduction d'une action pour discuter des questions suivantes : la possibilité d'établir un calendrier de l'instance; la mesure dans laquelle les parties se sont acquittées de l'obligation que leur impose le règlement en matière de production de documents et de renseignements; les règles de confidentialité; la question de savoir si un échantillon du produit générique est requis aux fins d'essais; la façon d'optimiser le recours aux tableaux des revendications afin de parvenir à un règlement expéditif de l'action; le moment de signification de preuve d'expert; et les moyens les plus efficaces pour instruire la Cour au sujet de toute question technologique ou scientifique soulevée.

Le règlement proposé prévoit également qu'une ordonnance interlocutoire ne pourrait être portée en appel que devant la Cour d'appel fédérale, avec l'autorisation de celle-ci.

Dommages

Comme auparavant, le règlement proposé permettrait à la seconde personne de demander d'être indemnisée pour les pertes qu'elle a subies pendant la période où elle a été écartée du marché par suite d'une procédure engagée contre elle sous le régime du règlement proposé qui a échoué ou en raison d'un désistement. Le règlement proposé rendrait tous les plaignants dans une action en contrefaçon intentée sous le régime qu'il met en place solidairement responsables de toute perte subie par la seconde personne suivant la date la plus tardive entre la date de signification de l'AA et la date à laquelle l'AA aurait été produite en absence du règlement. La responsabilité ne serait plus limitée aux dommages subis avant une certaine date.

Dispositions transitoires

Le règlement proposé entrerait en vigueur à la date d'entrée en vigueur de l'article 59 de l'AECG (actuellement prévue le 21 septembre 2017) et s'appliquerait à toutes les questions, autres que celles relatives à un AA signifié avant cette date.

Commentaires au gouvernement

Les personnes intéressées ont jusqu'au 31 juillet 2017 pour fournir des commentaires sur le règlement proposé.

Certificat de protection supplémentaire (« CPS »)

Un autre règlement vise à établir une période de protection supplémentaire, jusqu'à deux ans pour les brevets protégés par un CPS, qui est semblable aux certificats complémentaires de protection de l'Union européenne.

En résumé, un CPS prolonge la durée de l'admissibilité du brevet pharmaceutique de la différence entre la date de dépôt de la demande de brevet et la date d'émission de l'autorisation de mise en vente (avis de conformité) d'un brevet pharmaceutique, qui est réduite de cinq ans et plafonnée à deux ans. Les titulaires de brevets liés aux médicaments à usage humain et à usage vétérinaire peuvent déposer une demande. Les CPS ne peuvent être émis que pour les médicaments ayant reçu l'autorisation réglementaire au Canada et dont la demande d'autorisation a été faite à l'intérieur d'un délai prescrit dans un autre pays si le Canada n'est pas le premier pays dans lequel l'autorisation a été demandée et qu'il existe d'autres exigences en matière de délai. De plus, certaines clauses visent à exclure les CPS pour les ingrédients médicinaux qui ne diffèrent entre eux que par la variation qui est un énantiomère, un mélange d'énantiomères, qui sont traités comme étant les mêmes ingrédients médicinaux et ne font l'objet que d'un CPS. Les revendications au titre d'un processus pur ne sont pas admissibles.

Les CPS sont administrés par la ministre de la Santé. La Loi sur les brevets a déjà été modifiée afin de faciliter la mise en place d'un cadre pour les CPS. Comme c'est le cas avec le règlement proposé, les parties intéressées ont jusqu'au 31 juillet pour fournir leurs commentaires.

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