Le 8 mars dernier, le Parlement canadien a adopté à majorité la loi sur la non-discrimination génétique (LNDG).

 Attendue et espérée par plusieurs, cette législation laisse tout de même plusieurs compagnies d'assurance et gouvernements provinciaux perplexes quant à sa valeur constitutionnelle et sa pertinence. À ce sujet, le gouvernement du Québec vient tout juste de déposer un renvoi relatif à la Loi sur la non-discrimination génétique à sa Cour d'appel.

Bien que l'objectif derrière cette règlementation visant l'interdiction de tests génétiques pour l'obtention d'une assurance-vie soit noble, n'est-ce pas dans les faits trop peu trop tard ?

Trop peu

Avant l'entrée en vigueur de la LNDG, les lois visant la protection de la vie privée ainsi que les protections constitutionnelles en matière des droits de la personne n'étaient pas suffisantes pour contrer, à elles seules, la discrimination génétique. Bien que légalement parlant, il était possible pour un justiciable de sortir victorieux au détour d'un long et difficile procès, il semble que personne ne disposait des ressources financières et du temps nécessaire pour porter à bout de bras une telle cause.

À cet égard, la loi sur la non-discrimination génétique semble donc répondre à une problématique réelle.

Toutefois, l'industrie de l'assurance tout comme la communauté médicale émettent des réserves quant à sa réelle applicabilité. Dans le processus normal d'adhésion à une assurance-vie, la personne intéressée doit fournir l'ensemble de son dossier médical - maintenant sans les tests génétiques.

Cette nouvelle réalité semble rendre la tâche très difficile, voire impossible, pour les médecins de rendre les dossiers médicaux complètement hermétiques à toutes informations relatives à un test génétique déjà effectué. Il est ardu de croire que le professionnel de la santé ne fera jamais, à un moment ou à un autre, référence à ces tests dans des notes subséquentes.

De plus, selon les assureurs, cette nouvelle loi pourrait avoir un effet pervers sur l'ensemble des assurés. Une non-discrimination génétique au moment de la déclaration fera en sorte que les consommateurs seront tous mis sur un pied d'égalité. Ainsi, c'est le principe même de l'assurance qui est mis en péril.

Fondamentalement, l'assureur établit les primes que l'assuré devra payer en fonction du risque qu'il doit couvrir. Afin d'y parvenir, il existe une convention à l'effet que l'assureur et l'assuré doivent bénéficier des mêmes connaissances et qu'ils doivent, en quelque sorte, jouer cartes sur table.

Maintenant, cette réalité risque d'être gravement atteinte, et contrairement à ce que l'on peut penser, ce sera loin d'être au bénéfice de tous.

Trop tard

Le Canada est le dernier pays du G7 à réglementer la non-discrimination génétique alors que certains pays comme l'Allemagne (2009), l'ont fait il y a de cela plusieurs années.

Toutefois, la loi canadienne découlant du projet de loi S-201 ratisse beaucoup plus large que les législations étrangères analogues. Par exemple, aux États-Unis, la loi fédérale sur la non-discrimination génétique ne touche pas les assurances vie, les assurances invalidités et les assurances soins de longue durée. Elle touche principalement les assurances maladies. Au Royaume-Uni on a même décidé d'avoir une approche non législative et de laisser le marché s'autoréglementer.

Au Canada, cette nouvelle loi arrive au même moment où les sociétés d'assurance avaient déjà pris des engagements quant à leurs règles de conduite relatives à l'assurance de personnes. Dès le 1er janvier 2018, il était prévu que les consommateurs n'auraient plus l'obligation de dévoiler les résultats découlant de tests génétiques, et ce, pour des demandes de couvertures de 250 000$ et moins.

Cela aurait touché plus de 85% des couvertures offertes au Canada actuellement et aurait permis de solutionner biens des problématiques. Notamment l'inquiétude des Canadiens à devoir divulguer de l'information personnelle et l'incertitude que laisse planer cette nouvelle loi quant à l'augmentation des primes pour l'ensemble des Canadiens.

Et l'histoire ne s'arrête pas là. Notons que la loi est entrée en vigueur, contre le gré du gouvernement Trudeau qui a laissé aux députes à la Chambre des Communes un vote libre sur la question.

Toujours est-il que le Québec a demandé à la Cour d'appel de vérifier la constitutionnalité de la loi, et le gouvernement fédéral – qui y voit un empiètement sur les pouvoirs provinciaux – envisage aussi de demander l'avis de la Cour suprême.

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