Le 6 février 2015, le gouvernement du Québec a adopté le projet de loi 10, intitulé Loi modifiant l'organisation et la gouvernance du réseau de la santé et des services sociaux notamment par l'abolition des agences régionales1 (Loi). Dans son ensemble, la Loi a pour objectifs l'élimination des agences de santé, la réduction du nombre d'établissements de santé et l'augmentation des pouvoirs décisionnels du ministre de la Santé et des Services sociaux (ministre). Plusieurs amendements ont été apportés au projet de loi initial, notamment quant au nombre d'établissements du réseau de la santé (réseau), à certaines règles de gouvernance et aux appellations des nouveaux établissements.

Cet article fait donc suite à l'actualité juridique intitulée Dépôt du projet de loi no 10 : réforme majeure du réseau de la santé, publiée en octobre 2014, et résume de façon générale les nouvelles règles d'organisation et de gouvernance adoptées par le gouvernement.

RÉDUCTION DU NOMBRE D'ÉTABLISSEMENTS

La Loi prévoit la constitution, pour chacune des régions sociosanitaires, d'un ou de plusieurs centres intégrés de santé et de services sociaux (CISSS) ou centres intégrés universitaires de santé et de services sociaux (CIUSSS) issus de la fusion des établissements publics et de l'agence de la santé et des services sociaux de la région. Les CIUSSS sont créés sur le même modèle que les CISSS et ont la particularité d'être situés dans une région sociosanitaire où est située une université offrant un programme complet d'études prédoctorales en médecine ou qui exploite un centre désigné institut universitaire dans le domaine social. La Loi prévoit également la constitution d'établissements non fusionnés.

Concrètement, cette fusion a pour effet de réduire de 182 à 34 le nombre d'établissements de santé, soit 13 CISSS,

GOUVERNANCE DES ÉTABLISSEMENTS DE SANTÉ

La Loi établit les règles encadrant la composition des conseils d'administration et de la direction générale des établissements de santé ainsi que la rémunération et le mandat de leurs membres.

Conseil d'administration

Le mandat des membres du conseil d'administration des agences de la santé et des services sociaux, des établissements fusionnés, du Centre de santé et de services sociaux des Îles, des établissements regroupés et des établissements non fusionnés se termine le 31 mars 2015. Les nouveaux conseils d'administration seront formés de la façon suivante :

  • Membres désignés. Le conseil d'administration de chaque établissement est composé de membres désignés par et parmi les membres de différents départements, conseils, comités et organismes, conformément à la procédure qui sera déterminée par règlement. Si un poste n'est pas pourvu suivant cette procédure, le ministre peut nommer lui-même une personne à ce poste dans les 120 jours.
  • Membres nommés par le ministre. Le ministre procède à la nomination des administrateurs provenant du milieu de l'enseignement ainsi que des membres indépendants. Ces derniers sont nommés en fonction des profils de compétence, d'expertise et d'expérience établis par le ministre et suivant les recommandations d'un comité d'experts en gouvernance. Les nominations du ministre doivent représenter les différentes parties du territoire, la composition socioculturelle, ethnoculturelle, linguistique ou démographique des usagers desservis par l'établissement. Le ministre doit aussi s'assurer, lors de ses nominations, que le conseil d'administration est composé en parts égales d'hommes et de femmes. Or, pour la première nomination des membres du conseil d'administration, la représentation en parts égales entre les hommes et les femmes n'aura pas à tenir compte des membres désignés.
  • Durée du mandat et rémunération. Les membres, autres que le président-directeur général, demeurent en fonction pour une période maximale de 3 ans et ils demeurent en fonction, à l'expiration de leur mandat, jusqu'à ce qu'ils soient remplacés ou nommés de nouveau. De plus, leur rémunération, leurs indemnités et leurs allocations sont déterminées par le gouvernement.
  • Nombre de sièges à combler. Le nombre de sièges d'un conseil d'administration diffère selon le type d'établissement. En effet, un CISSS compte 17 sièges alors qu'un établissement non fusionné ou un CIUSSS en compte 19. L'écart de deux sièges vise la nomination d'une personne indépendante supplémentaire et d'une deuxième personne provenant du milieu de l'enseignement.

Fonctionnement

Tous les deux ans, le président est désigné par le ministre parmi les membres indépendants, alors que les membres du conseil d'administration élisent, parmi eux, le secrétaire du conseil et, parmi les membres indépendants, le vice président. Les règles de fonctionnement prévues à la Loi sur les services de santé et les services sociaux2 (LSSSS) concernant les séances, les documents et les archives s'appliquent en partie, compte tenu des adaptations nécessaires.

Pouvoirs et obligations

Le conseil d'administration doit organiser les services de l'établissement dans le respect des orientations nationales et répartir équitablement, en respectant le budget alloué par programme-service, les ressources humaines, matérielles et financières mises à sa disposition et s'assurer de leur utilisation économique et efficiente. En outre, les membres du conseil d'administration devront présenter au moins une fois par année à la population, lors d'une séance publique d'information, les renseignements contenus au rapport d'activités, au rapport financier annuel et au rapport sur l'application de la procédure de traitement des plaintes. Plusieurs articles de la LSSSS demeurent applicables à l'encadrement des pouvoirs et obligations du conseil d'administration, compte tenu des adaptations nécessaires.

Direction générale

Nomination

  • Président-directeur général. Le président-directeur général de chaque établissement est nommé par le gouvernement, sur recommandation du ministre, à partir d'une liste de noms fournis par les membres des différents départements, conseils, comités et organismes sollicités pour la nomination des membres du conseil d'administration. Or, le premier président-directeur général de chaque établissement sera nommé par le ministre à la suite d'un processus de sélection initié par ce dernier, selon les modalités qu'il détermine. Le président-directeur général pourra, à la suite de sa nomination, nommer le premier directeur des ressources humaines et le premier directeur des ressources financières selon les modalités déterminées par le ministre. De plus, le premier président-directeur général d'un établissement exercera tous les pouvoirs du conseil d'administration jusqu'au 30 septembre 2015 ou, selon la première des deux dates, jusqu'à ce que la majorité des membres indépendants soient nommés.
  • Président-directeur général adjoint. Le président-directeur général adjoint est quant à lui nommé par le conseil d'administration afin d'exercer les fonctions et les pouvoirs du président-directeur général en cas d'absence ou d'empêchement de ce dernier. Or, le premier président-directeur général adjoint sera nommé par le ministre à la suite d'un processus de sélection initié par ce dernier, selon les modalités qu'il détermine.

Rémunération

Le gouvernement détermine la rémunération, les avantages sociaux et les autres conditions de travail du président-directeur général et du président-directeur général adjoint. De plus, le ministre détermine par règlement les normes et les barèmes des conditions de travail applicables au président-directeur général adjoint. Or, jusqu'à ce que le ministre prenne ledit règlement, les dispositions du Règlement sur certaines conditions de travail applicables aux hors-cadres des agences et des établissements publics de santé et de services sociaux3 applicables à un directeur général sont applicables au président-directeur général adjoint de l'établissement dans l'éventualité où elles ne sont pas inconciliables.

Nul ne peut verser au président-directeur général ou au président-directeur général adjoint une rémunération ni leur consentir un avantage autre que ce qui est prévu par le gouvernement ou au règlement décrit précédemment, sous peine d'une amende pouvant se chiffrer jusqu'à 25 000 $ pour une personne physique et jusqu'à 50 000 $ dans les autres cas. Le président-directeur général ou le président-directeur général adjoint qui accepte une telle rémunération commet une infraction et est aussi passible d'une amende.

Mandat

Le président-directeur général, assisté par le président-directeur général adjoint, est responsable à temps plein de l'administration et du fonctionnement de l'établissement. Il veille à l'exécution des décisions du conseil d'administration et à la coordination et à la surveillance de l'activité clinique au sein de l'établissement. Ils exercent leurs fonctions à temps plein et doivent s'occuper exclusivement du travail des établissements et des devoirs de leurs fonctions, à moins d'obtenir le consentement du ministre.

Leur mandat est d'une durée maximale de 4 ans et ils demeurent en fonction, à l'expiration de leur mandat, jusqu'à ce qu'ils soient remplacés ou nommés de nouveau.

FONCTIONS ET POUVOIRS DU MINISTRE

La Loi attribue au ministre de larges pouvoirs visant l'encadrement de la gouvernance des établissements de santé. À cet effet, le ministre peut prescrire par règlement des mesures encadrant la structure organisationnelle de la direction des établissements publics ou toute autre règle permettant la saine gestion des ressources et une meilleure organisation de l'établissement, notamment quant aux programmes à mettre en place et à la prestation des services aux usagers. Le ministre peut également émettre des directives portant sur les objectifs, les orientations et les actions des établissements dans l'exécution de leurs fonctions.

De façon exceptionnelle, lorsque le ministre estime que la direction générale ou le conseil d'administration d'un établissement public pose des gestes incompatibles avec les règles de saine gestion, il a le pouvoir de nommer une ou plusieurs personnes pour remplacer temporairement la ou les personnes visées pour une période ne pouvant dépasser 180 jours. Cette période peut être prolongée par le ministre d'au plus 180 jours. Il est à noter que la personne nommée par le ministre pour remplacer le président-directeur général ou le président-directeur général adjoint ou pour assumer une partie des pouvoirs du conseil d'administration ne peut être poursuivie en justice pour les actes accomplis de bonne foi dans l'exercice de ses fonctions.

De plus, la Loi attribue de nouveaux pouvoirs au ministre lui permettant de contraindre les établissements à prendre certaines décisions, notamment faire usage commun de certains biens ou services qu'il détermine. La Loi prévoit également que tout projet impliquant des ressources informationnelles, soit l'ensemble des actions menant au développement, à la mise à niveau, à l'acquisition, à la location, à l'évolution et à l'entretien d'applications et de biens en ressources informationnelles, soit autorisé par le ministre dans les cas qu'il détermine.

Footnotes

1. http://www2.publicationsduquebec.gouv.qc.ca/dynamicSearch/telecharge.php?type=5&file=2015C1F.PDF .

2. RLRQ c S-4.2.

3. RLRQ c S-4.2, r 5.2.

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