Cette importante décision prononcée dernièrement par la Cour suprême du Canada confirme : (i) que le juge chargé d'appliquer la LACC possède un vaste pouvoir discrétionnaire et la compétence nécessaire pour empêcher un créancier de voter sur un plan d'arrangement s'il agit dans un but illégitime, (ii) que le financement de litiges n'est pas intrinsèquement illégal et qu'un accord de financement de litige peut être approuvé par la Cour à titre de financement temporaire en situation d'insolvabilité. La décision fait du financement d'un litige par un tiers un outil puissant auquel le conseiller juridique du débiteur peut recourir pour maximiser le recouvrement en faveur des parties prenantes de la société.

INTRODUCTION

Alors que le nombre d'entreprises qui deviennent insolvables augmente, mouvement qui par ailleurs s'accélère en raison de l'actuelle pandémie de COVID-19, les tribunaux canadiens sont appelés, souvent de manière urgente, à placer des entreprises débitrices sous protection judiciaire. En procédant ainsi, les tribunaux accordent aux débiteurs insolvables une certaine « marge de manSuvre » afin qu'ils puissent restructurer leurs activités et leurs affaires.

Dans les motifs de l'arrêt 9354-9186 Québec inc. c. Callidus Capital Corp., 2020 CSC 10 (« Bluberi »), publiés le 8 mai 2020, la Cour suprême du Canada (la « CSC ») a fourni des indications importantes concernant les procédures d'insolvabilité. Cette décision unanime, corédigée par le juge en chef Wagner et le juge Moldaver, fait suite au jugement oral que le tribunal a prononcé le 23 janvier 2020 et par lequel il a infirmé la décision de la Cour d'appel du Québec.

Dans l'affaire Bluberi, la CSC s'est penchée sur le vaste pouvoir discrétionnaire dont jouit le juge qui préside une instance régie par la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies (la « LACC ») et sur le degré de déférence dont les cours d'appel devraient faire preuve en cas d'appel d'un jugement rendu par un tribunal chargé d'appliquer la LACC. Plus précisément, comme nous le verrons ci-après, l'affaire Bluberi établit un précédent selon lequel :

  • un créancier agissant dans un but illégitime peut se voir interdire de voter à l'égard d'un plan d'arrangement régi par la LACC;
  • un accord de financement de litige par un tiers peut être approuvé à titre de financement temporaire en vertu de la LACC.

Le financement d'un litige implique le financement du litige par un tiers en échange d'une partie du produit de la poursuite. Ce type de financement est de nos jours largement accepté et est soutenu par un secteur du financement des litiges en pleine expansion. En confirmant la possibilité pour eux de recourir au financement de litige en cas d'insolvabilité, la CSC fournit un outil important aux débiteurs insolvables qui souhaitent restructurer leurs activités ou par ailleurs maximiser la valeur pour leurs créanciers.

Il est intéressant de noter qu'il a fallu moins de deux semaines pour que la même Cour d'appel qui a été renversée dans l'affaire Bluberi cite l'arrêt Bluberi dans l'Arrangement relatif à 9323-7055 Québec inc. (Aquadis International Inc.), 2020 QCCA 659, en lien avec la notion largement acceptée selon laquelle la LACC peut également être utilisée pour mettre en Suvre la liquidation ordonnée d'une entreprise insolvable.

LA PROCÉDURE RÉGIE PAR LA LACC

En novembre 2015, la compagnie débitrice (anciennement connue sous le nom de « Bluberi ») a déposé une requête en délivrance d'une ordonnance initiale sous le régime de la LACC.

Une requête contestée

La requête déposée en vertu de la LACC a été accordée par le juge surveillant malgré l'objection du principal créancier garanti de Bluberi, Callidus Capital Corporation (« Callidus »), dans le cadre d'un âpre litige dans lequel Bluberi a allégué que Callidus avait abusé de ses droits en tant que prêteur et déclenché l'insolvabilité de Bluberi.

Ernst & Young Inc. (le « contrôleur ») a été nommée contrôleur de Bluberi en vertu de la LACC. Avec l'aide du contrôleur, le juge surveillant a supervisé la procédure régie par la LACC, qui a fait l'objet d'un litige et qui a comporté plusieurs audiences contestées, des démarches de reconnaissance aux États-Unis régies par le chapitre 15 du Bankruptcy Code des États-Unis et un processus de sollicitation de vente et d'investissement visant les actifs et l'entreprise de Bluberi.

Callidus achète les actifs de Bluberi

Au cours du processus de vente, Callidus a acheté les actifs de Bluberi en faisant une offre d'achat par créance visant la totalité de sa dette garantie de 135,7 millions de dollars, à l'exception d'une tranche restante de 3 millions de dollars. Ce faisant, elle a acquis la quasi-totalité des actifs de Bluberi, à l'exception des réclamations en dommages-intérêts que Bluberi a cherché à faire valoir contre Callidus pour un montant de 200 millions de dollars (les « réclamations réservées »). Ces réclamations réservées ont été exclues des actifs achetés et ont été conservées par la société, maintenant connue sous le nom de 9354-9186 Québec inc. Cette dernière a ensuite cherché à obtenir des fonds auprès de tiers pour financer son litige contre Callidus.

Le premier plan d'arrangement de Callidus est rejeté

En septembre 2017, Callidus a présenté un plan d'arrangement dans lequel elle offrait une distribution de 2,63 millions de dollars aux créanciers non garantis de Bluberi, en échange d'une libération complète et définitive de toutes les réclamations réservées. Cependant, au cours d'une assemblée épique des créanciers (tenue dans un hôtel de Drummondville, dans une salle qui porte bien son nom, « Hocus Pocus et Circus »), le plan de Callidus a été rejeté par les créanciers de Bluberi. Bien qu'une grande majorité des créanciers appuyait le plan, le seuil prévu par la loi, soit les deux tiers de la valeur en dollars de toutes les créances, n'a pas été atteint parce qu'un fournisseur ayant une créance importante a voté contre le plan.

L'accord de financement de litige par un tiers

La société anciennement connue sous le nom de Bluberi a ensuite obtenu un financement temporaire sous la forme d'un accord de financement de litige par un tiers (un « AFL ») auprès d'IMF Bentham Limited et d'un membre du groupe de cette dernière, Bentham IMF Capital Limited (maintenant Omni Bridgeway) (« Omni »), afin de poursuivre l'instruction des réclamations réservées contre Callidus. L'AFL suivait le cadre standard de financement de litige et prévoyait qu'Omni ne recevrait de paiement que si Bluberi avait gain de cause au procès ou que l'affaire était réglée à l'amiable. L'AFL prévoyait également des honoraires conditionnels payables aux avocats représentant Bluberi. Bluberi a demandé au tribunal chargé d'appliquer la LACC d'approuver l'AFL en tant que financement temporaire en vertu de la LACC et d'approuver l'établissement d'une charge super-prioritaire pour garantir les obligations contractées envers à Omni aux termes de l'AFL.

Le deuxième plan d'arrangement de Callidus : naissance du différend clé

Toutefois, peu avant que cette demande ne soit entendue, Callidus a proposé un autre plan d'arrangement, pratiquement identique au premier (le « deuxième plan »). Cette fois, cependant, Callidus a demandé au juge la permission de voter sur ce deuxième plan, en sa qualité de titulaire d'une créance garantie de 3 millions de dollars, dans la même catégorie que les créanciers non garantis, au motif que sa garantie devrait être évaluée à zéro.

Le juge surveillant constate un « but illégitime »

Le juge surveillant a conclu qu'il ne devrait pas être permis à Callidus de voter sur le deuxième plan parce qu'elle agissait dans un « but illégitime », soit faire pencher la balance du vote des créanciers en sa faveur dans des circonstances où un plan pratiquement identique avait déjà été rejeté par les créanciers de Bluberi. En conséquence, le juge a estimé que le deuxième plan n'avait aucune possibilité raisonnable d'être avalisé et qu'il ne devait pas être soumis au vote des créanciers. Le juge a plutôt autorisé Bluberi à conclure l'AFL et a approuvé la charge de financement super-prioritaire correspondante en faveur d'Omni.

APPEL À LA COUR D'APPEL DU QUÉBEC

Callidus et un groupe composé de certains créanciers non garantis de Bluberi ont fait appel de la décision du juge surveillant. Après avoir accordé l'autorisation d'interjeter appel, la Cour d'appel a annulé l'ordonnance du juge, estimant que Callidus aurait dû être autorisée à voter sur le deuxième plan, étant donné que les créanciers ont le droit de voter en fonction de leur propre intérêt, et que l'AFL s'apparentait à un plan d'arrangement et devait être soumis au vote des créanciers, plutôt que d'être approuvé en tant que financement temporaire (qui ne nécessite que l'approbation du juge). Bluberi et Bentham ont demandé et obtenu l'autorisation d'interjeter appel devant la CSC. Le contrôleur a soutenu la position adoptée par l'entité anciennement connue sous le nom de Bluberi en première instance, devant la Cour d'appel et devant la Cour suprême du Canada.

LA DÉCISION DE LA COUR SUPRÊME DU CANADA

L'affaire Bluberi présente une série de faits assez unique qui soulève plusieurs questions juridiques intéressantes. La CSC en a abordé deux dans ses motifs, répondant aux deux questions par l'affirmative (comme l'avait fait le juge surveillant) :

  • Le juge surveillant a-t-il le pouvoir discrétionnaire d'empêcher un créancier de voter sur un plan d'arrangement s'il décide que le créancier agit dans un but illégitime?
  • L'AFL peut-il être approuvé par la Cour comme financement temporaire en vertu de l'article 11.2 de la LACC (par opposition à un plan d'arrangement, qui nécessiterait un vote des créanciers de Bluberi)?

L'affaire a également soulevé d'autres questions, dont les suivantes : Callidus est-elle « liée » à Bluberi au sens du paragraphe 22(3) de la LACC? Et si Callidus est autorisée à voter sur son plan, convient-il de lui ordonner de voter dans une catégorie distincte des autres créanciers de Bluberi (voir la LACC, paragraphes 22(1) et (2))? Toutefois, compte tenu de la conclusion de la CSC selon laquelle le juge surveillant n'a pas commis d'erreur en interdisant à Callidus de voter sur le deuxième plan au motif qu'elle avait agi dans un but illégitime, la CSC a estimé qu'il n'était pas nécessaire de se prononcer sur l'une ou l'autre de ces questions.

Pouvoir discrétionnaire du tribunal et but illégitime

La CSC a saisi l'occasion pour clarifier la nature et la portée du pouvoir discrétionnaire d'un juge surveillant en ce qui concerne les questions visées par la LACC. Elle a observé ce qui suit :

  • L'article 11 de la LACC confère aux juges surveillants un vaste pouvoir discrétionnaire pour rendre toute une gamme d'ordonnances.
  • Ces pouvoirs sont justifiés, au moins en partie, par le fait que chaque procédure fondée sur la LACC est supervisée par un seul juge surveillant, qui, avec l'aide du contrôleur, acquiert une connaissance approfondie des activités d'un débiteur, y compris de ses relations avec ses différentes parties prenantes.

La CSC a conclu qu'en vertu de l'article 11, il est possible d'empêcher un créancier de voter sur un plan d'arrangement lorsque ce créancier agit dans un but illégitime.

Quand ce pouvoir discrétionnaire doit-il être exercé?

En l'absence d'une disposition spécifique de la LACC qui établit les cas où un créancier (qui a par ailleurs le droit de voter) peut être privé de son droit de vote (et étant donné que, dans son ensemble, le régime de la LACC reconnaît la participation des créanciers au processus décisionnel comme l'un de ses aspects essentiels), la CSC a jugé que les créanciers ne devraient être empêchés de voter que si les circonstances l'exigent.

À cet égard, la Cour a en outre confirmé que l'exercice du pouvoir discrétionnaire du juge doit tendre à la réalisation des objectifs réparateurs de la LACC et tenir compte de trois considérations de base : l'opportunité, la bonne foi et la diligence. Si un créancier cherche à exercer ses droits de vote de manière à contrecarrer ou à miner ces objectifs réparateurs ou à aller à l'encontre de ceux-ci, le juge surveillant a le pouvoir discrétionnaire de lui interdire de voter sur le plan.

Comparaison avec la LFI

Un pouvoir discrétionnaire similaire est prévu par l'autre loi qui peut servir à mettre en Suvre une restructuration d'entreprise, à savoir la Loi sur la faillite et l'insolvabilité (la « LFI »), comme l'a reconnu la Cour d'appel de la Nouvelle-Écosse dans l'affaire Laserworks Computer Services Inc. (Bankruptcy), Re. La CSC a estimé que l'existence d'un tel pouvoir discrétionnaire en vertu de la LFI milite en faveur de l'existence d'un pouvoir discrétionnaire semblable en vertu de la LACC, d'autant plus que (i) cette conclusion serait compatible avec le fait qu'il a déjà été reconnu que la LACC établit un mécanisme plus souple dans lequel les tribunaux disposent d'un plus grand pouvoir discrétionnaire que sous le régime de la LFI, et (ii) la CSC a déjà reconnu les bienfaits de l'harmonisation des deux lois.

L'exercice du pouvoir discrétionnaire par le juge surveillant dans cette affaire

Dans les circonstances de cette affaire, le juge surveillant n'a pas commis d'erreur en interdisant à Callidus de voter sur le deuxième plan, d'autant plus que Callidus tentait d'attribuer stratégiquement une valeur nulle à sa sûreté afin de contrôler le vote et ainsi contourner la volonté des créanciers non garantis. La décision du juge devait être abordée avec la déférence appropriée, en gardant à l'esprit que le juge, lorsqu'il a rendu sa décision, connaissait très bien les procédures fondées sur la LACC relatives à Bluberi. Il les avait en effet présidées pendant plus de 2 ans, avait reçu 15 rapports du contrôleur et avait rendu environ 25 ordonnances.

Sur ce point clé, la CSC a cité le mémoire du contrôleur :

[« [u]ne fois que le plan d'arrangement ou la proposition ont été présentés aux créanciers du débiteur aux fins d'un vote, le fait d'ordonner la tenue d'une seconde assemblée des créanciers pour voter sur un plan à peu près semblable ne favoriserait pas la réalisation des objectifs de politique de la LACC, pas plus qu'il ne servirait ou n'accroîtrait la confiance du public dans le processus ou ne servirait par ailleurs les fins de la justice » (par. 79).

L'erreur de la Cour d'appel

Selon la CSC, la Cour d'appel du Québec, en déterminant si le juge surveillant avait exercé son pouvoir discrétionnaire de manière adéquate, n'a pas commencé son examen par la qualification appropriée du fondement de la décision. Bien que la Cour d'appel se soit saisie des commentaires quelque peu critiques formulés par le juge surveillant à l'égard de l'objectif de Callidus d'être libérée des réclamations réservées et de la conduite de celle-ci tout au long des procédures pour affirmer qu'il ne s'agissait pas de considérations pouvant donner lieu à une conclusion de but illégitime, le cSur du problème était la tentative de manipulation du vote des créanciers, et rien dans les motifs de la Cour d'appel n'abordait ce point.

Conclusion sur le pouvoir discrétionnaire et la déférence

En tirant cette conclusion, la CSC a confirmé le principe bien établi selon lequel l'intervention d'une cour d'appel dans les questions relatives à la LACC ne sera justifiée que si le juge surveillant a commis une erreur de principe ou exercé son pouvoir discrétionnaire de manière déraisonnable. Les procédures intentées sous le régime de la LACC commandent un degré élevé de déférence et la CSC a clairement fait savoir que l'intervention d'une cour d'appel devrait être limitée à des cas exceptionnels.

Approbation du financement de litige comme financement temporaire

Les compagnies débitrices insolvables ont souvent recours à un financement temporaire (également appelé financement « débiteur-exploitant ») pour financer une restructuration. Afin d'encourager les prêteurs à prêter des fonds à une entité insolvable, les lois sur l'insolvabilité donnent aux tribunaux la possibilité d'ordonner une charge super-prioritaire en faveur du prêteur temporaire qui est de rang supérieur aux sûretés enregistrées par les prêteurs garantis sur les actifs du débiteur. Un financement temporaire ne nécessite que l'approbation du tribunal, sur remise d'un préavis aux prêteurs garantis.

Un AFL peut être un financement temporaire

Dans l'affaire Bluberi, le juge surveillant avait approuvé l'AFL conclu avec Omni comme financement temporaire en vertu de l'article 11.2 de la LACC, mais la Cour d'appel du Québec a annulé cette décision, car elle a conclu que l'AFL constituait un plan d'arrangement et que, par conséquent, il devait faire l'objet d'un vote des créanciers de Bluberi avant d'être soumis à la Cour pour approbation. La CSC, se prononçant sur la question, a confirmé la décision du juge surveillant, estimant que le financement temporaire est un outil souple qui peut revêtir différentes formes, et que le financement de litige par un tiers peut, dans les cas appropriés, être l'une de ces formes.

Établir quand les AFL sont des plans d'arrangement

La CSC a également commenté la notion de « plan d'arrangement » en concluant que le plan d'arrangement doit au moins comporter une certaine transaction à l'égard des droits des créanciers et, par conséquent, qu'un accord de financement de litige par un tiers visant à apporter un financement à la compagnie débitrice pour réaliser la valeur d'une créance litigieuse ne constitue pas nécessairement un plan d'arrangement. La Cour a estimé qu'il appartient au juge surveillant de déterminer si, compte tenu des circonstances particulières de l'affaire dont il est saisi, l'accord de financement de litige par un tiers comporte des conditions qui le convertissent effectivement en plan d'arrangement. Si l'accord ne comporte pas de telles conditions, il peut être approuvé à titre de financement temporaire en vertu de l'article 11.2 de la LACC.

La CSC, dans l'affaire Bluberi, a toutefois déclaré que :

« dans certaines circonstances, l'accord de financement de litige par un tiers peut contenir ou incorporer un plan d'arrangement (p. ex., s'il contient un plan prévoyant la distribution aux créanciers des sommes obtenues dans le cadre du litige) »,

et qu'un juge surveillant peut décider que :

« bien que l'accord lui-même ne constitue pas un plan d'arrangement, il y a lieu de l'accompagner d'un plan et de le soumettre à un vote des créanciers ». (par. 103)

La CSC confirme Crystallex

Pour tirer ses conclusions, la CSC a suivi la décision de la Cour d'appel de l'Ontario dans l'affaire Crystallex, où le financement de litige par un tiers a été approuvé comme financement temporaire pour permettre à une société minière canadienne insolvable placée sous la protection de la LACC de poursuivre une réclamation d'arbitrage de 3,4 milliards de dollars américains contre le Venezuela, après l'expropriation de ses actifs dans ce pays. L'argument selon lequel l'accord de financement de litige était véritablement un plan d'arrangement par opposition à un financement temporaire avait également été présenté - et rejeté - dans l'affaire Crystallex. La CSC a confirmé que la Cour d'appel du Québec avait commis une erreur en établissant une distinction avec Crystallex dans l'affaire Bluberi.

Conclusion sur le financement de litige

Comme il est indiqué ci-dessus, la CSC s'en est remise à la décision du juge surveillant selon laquelle dans cette affaire, l'AFL a à juste titre été reconnu comme une forme de financement temporaire plutôt que comme un plan d'arrangement.

PRINCIPAUX POINTS À RETENIR

Les principaux points à retenir de l'affaire Bluberi sont donc que chaque cas doit être évalué en fonction des faits et que le juge surveillant conserve le pouvoir discrétionnaire de décider si une proposition d'accord de financement de litige doit être présentée aux créanciers avec un plan d'arrangement.

La CSC a estimé que le juge surveillant, en approuvant l'AFL comme financement temporaire, bien qu'il n'ait pas examiné individuellement chacun des facteurs énoncés au paragraphe 11.2(4) de la LACC avant de tirer sa conclusion, n'a commis aucune erreur de principe, ni aucune erreur dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire. La Cour d'appel du Québec, dans la mesure où elle a statué autrement, n'a pas accordé au juge surveillant la déférence nécessaire. En affirmant avec insistance que l'AFL était un plan d'arrangement, la Cour d'appel n'a pas pris en considération le fait que la réclamation de Bluberi s'apparente à une « marmite d'or » et que :

« les plans d'arrangement établissent la façon dont le contenu de cette marmite sera distribué. Ils n'indiquent généralement pas ce que la compagnie débitrice devra faire pour la remplir ». (par. 111)

L'affaire Bluberi établit donc que le financement de litige constitue un outil puissant pour les avocats des débiteurs. En plus de confirmer l'efficacité du financement de litige, comme l'ont fait les tribunaux américains, britanniques et australiens, la CSC a donné des indications sur la façon dont ce type de financement doit être évalué et approuvé dans un contexte d'insolvabilité. L'affaire Bluberi facilitera le recours au financement de litige pour les entreprises insolvables qui cherchent à maximiser la valeur des actifs qu'elles peuvent distribuer à leurs créanciers.

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Stikeman Elliott représentait le contrôleur, Ernst & Young, dans cette affaire et est heureuse d'avoir pu aider la Cour suprême du Canada à résoudre les questions complexes dont elle était saisie, comme en témoigne la référence à notre mémoire dans les motifs du juge en chef et du juge Moldaver. Les opinions exprimées dans ce billet sont celles des auteurs et ne reflètent pas nécessairement celles du contrôleur.

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