Le 19 juin dernier, le projet de loi C-31 intitulé Loi no 1 sur le plan d'action économique de 2014 a reçu la sanction royale. Le projet de loi contient des modifications substantielles au système actuel des marques de commerces au Canada, l'une des plus importantes étant l'élimination de l'utilisation d'une marque comme exigence pour obtenir un enregistrement. Ce changement aura un impact au niveau de la recherche, de l'analyse des risques et du respect des marques de commerces au Canada. Le Protocole de Madrid sera mis en Suvre et la classification de Nice concernant les produits et services sera adoptée.
Des règlements sont nécessaires, et le gouvernement doit effectuer des consultations sur les nouveaux frais, en plus de mettre en place les procédures et les coûts liés au Protocole de Madrid. La pleine mise en Suvre du projet de loi ne devrait avoir lieu que vers le milieu de 2015, sinon plus tard. Pour l'instant, le système d'enregistrement actuel restera en vigueur.
Voici les modifications à la Loi sur les marques de commerce qui auront probablement le plus d'impact sur les titulaires de marques de commerce au Canada :
- Les requérants ne seront plus tenus
d'identifier des motifs d'enregistrement. Tout
requérant qui emploie ou qui projette d'employer une
marque, et qui a droit d'employer la marque, aura le droit de
produire une demande d'enregistrement. Il semble que les
requérants n'auront plus besoin d'indiquer, lors de
la production de la demande, si la marque de commerce a
été employée, ou de fournir une date de
premier emploi.
- L'emploi de la marque ne sera plus requis avant
l'enregistrement. Sauf s'il y a opposition, les
enregistrements seront octroyés à l'expiration du
délai prévu pour fin d'opposition.
Aucune déclaration d'emploi ne sera requise et aucun
frais d'émission du certificat d'enregistrement ne
sera payable. À NOTER : Tel que mentionné dans nos
communications antérieures, ces deux modifications changent
de manière fondamentale le système actuel
d'enregistrement. Stratégiquement, plusieurs
requérants envisageront des produits et services allant
au-delà de leur emploi actuel, mais ils devront être
prêts à faire la preuve qu'ils « projettent
» d'employer la marque de commerce. Les requérants
et les entreprises devront vraisemblablement faire plus
d'études de marché et d'investigations afin
d'évaluer l'impact des demandes en instance et des
enregistrements existants sur les nouvelles demandes, puisque
l'information sur l'emploi n'apparaitra plus au
registre des marques.
- La classification de Nice sera mise en Suvre.
Les requérants devront identifier dans leurs demandes leurs
produits et services en des termes ordinaires du commerce et selon
les classes de la classification de Nice (avec le numéro de
la classe). Cette exigence s'appliquera également
à toute demande produite mais non encore enregistrée
à la date d'entrée en vigueur de la Loi. Le
registraire pourra aussi exiger que les titulaires de marques de
commerce déjà enregistrées fournissent la
classification de leurs produits et services, sous peine de
radiation de l'enregistrement. L'objectif de cette
dernière disposition est d'assurer que tous les
enregistrements existants se conforment au système de
classification. Présentement, on ne sait pas encore quand
les modifications seront apportées aux enregistrements
existants. Toutes les questions portant sur la classification
seront ultimement déterminées par le
registraire.
- Des frais d'enregistrement par classe seront
probablement mis en Suvre, mais ces frais n'ont pas
encore été établis. Les entreprises pourraient
envisager produire leurs demandes d'enregistrement dès
maintenant, pendant que les frais d'enregistrement demeurent
peu élevés, puisqu'il n'y a aucune garantie
que le nouveau système de frais coûtera moins
cher.
- Des règlements permettant au Canada de mettre en
Suvre le Protocole de Madrid entreront en vigueur.
- Le Bureau des marques de commerce pourra refuser des
demandes d'enregistrement si la marque de commerce n'est
pas distinctive. On ne sait pas encore comment le
caractère distinctif sera évalué, ni quelle
preuve sera requise pour démontrer le caractère
distinctif. En outre, on ne sait pas si les marques de commerce qui
peuvent aujourd'hui être approuvées sans preuve de
caractère distinctif, par exemple, des lettres, chiffres ou
symboles graphiques, continueront d'être acceptées
sans une telle preuve après la mise en Suvre des
amendements. Pour éviter des objections fondées sur
le caractère distinctif des marques de commerce qui
respectent aujourd'hui les critères actuels
d'enregistrement, ainsi que les coûts
élevés liés à la préparation de
la preuve nécessaire pour démontrer le
caractère distinctif, il pourrait être
préférable de produire une demande
d'enregistrement de marques non-traditionnelles dès
maintenant.
- La date de priorité revendiquée ne sera
plus limitée aux demandes produites dans le pays
d'origine du requérant. Toute demande
d'origine pourra être revendiquée, en autant que
le requérant réside dans un pays membre de la
Convention de Paris de 1883. La demande d'enregistrement au
Canada doit tout de même être produite dans les six
mois suivant le dépôt initial, mais une période
de grâce de sept jours sera disponible sur demande.
- Les requérants pourront produire une demande
« divisionnaire », permettant
l'enregistrement pour certains produits ou services, tout en
laissant d'autres en instance. Cette nouvelle
possibilité pourrait être utile pendant l'examen
et pendant une procédure d'opposition si la demande est
opposée seulement pour certains produits ou services,
permettant ainsi au requérant d'obtenir un
enregistrement en liaison avec d'autres produits ou
services.
- L'absence d'emploi et d'emploi
projeté au Canada, ainsi que l'absence de droit
d'emploi, s'ajoutent à la liste de motifs
d'opposition. Puisque les requérants ne seront
plus tenus d'identifier des motifs d'enregistrement, ni
d'indiquer la date de premier emploi, s'il y a lieu, la
décision d'opposer ou non exigera des investigations
pour confirmer que les droits d'un opposant potentiel sont
antérieurs à ceux du requérant. Par ailleurs,
il faudra probablement un certain temps pour déterminer
comment ces nouveaux motifs d'opposition seront mis en
application, afin de pouvoir procéder à une
évaluation efficace de ce qu'une revendication
d'emploi projeté signifie, ou pourquoi un
requérant n'a pas droit d'employer une marque de
commerce. L'absence de droit d'emploi peut
référer à des situations où
l'emploi serait illégal, possiblement en vertu
d'autres lois fédérales.
- Les requérants pourront produire une
contre-déclaration simplifiée, indiquant
simplement que le requérant a l'intention de
répondre à l'opposition. Cette modification
permettra d'éviter des situations qui ont surgi dans le
passé où les requérants, par inadvertance,
n'avaient pas répondu à tous les motifs
d'opposition et, par conséquent, avaient
été présumés ne pas avoir
contesté certains motifs. Une question qui reste en suspend
est de savoir si, pendant les procédures d'opposition,
le requérant se fiera sur l'emploi de sa marque de
commerce, et, le cas échéant, sur quelle date de
premier emploi. D'autres modifications apportées
pourront permettre d'accélérer la
procédure d'opposition.
- Les dispositions transitoires prévoient que les
demandes d'enregistrement admises à la date de mise en
Suvre pourront être enregistrées pour tous les
produits et services dans la demande, sur paiement de frais
d'enregistrement. Aucune déclaration d'emploi pour
ces demandes d'enregistrement ne sera requise.
Actuellement, il y a plus de 40 000 demandes d'enregistrement
au stade de « l'admission », en attente de la
production d'une déclaration d'emploi.
L'enregistrement de ces marques pour tous les produits et
services dans la demande aura fort probablement un impact majeur
sur la disponibilité éventuelle de marques de
commerce similaires.
- La période de renouvellement diminuera de 15
à 10 ans. À NOTER : Les enregistrements
peuvent être renouvelés jusqu'à un an avant
la date limite de renouvellement. Si possible, les
propriétaires devraient les renouveler maintenant, avant la
mise en Suvre des modifications, afin de profiter de la plus longue
période de renouvellement.
- Le registraire aura des pouvoirs accrus pour corriger
les erreurs de nom et les adresses, ainsi que pour corriger ses
propres fautes, incluant le retrait d'annonces et la
correction d'erreurs dans l'enregistrement, mais seulement
dans la mesure où il en est avisé dans les six mois
suivant l'inscription au registre. Au surplus, si
l'enregistrement est délivré malgré une
demande de prolongation du délai pour produire une
déclaration d'opposition, le registraire pourra retirer
l'enregistrement du registre.
- Le registraire pourra lui-même envoyer un avis
enjoignant les titulaires de fournir de la preuve d'emploi de
marques de commerce enregistrées depuis au moins trois ans
(procédure de non-emploi prévue à
l'article 45). Présentement, le registraire
peut émettre de tels avis sur demande même avant trois
ans d'enregistrement, mais le fait rarement. Le projet de loi
ne donne aucune indication à savoir si le registraire
pourrait donner ces avis de sa propre initiative, quoique pendant
les consultations qui ont eu lieu depuis le dépôt du
projet de loi, les représentants du gouvernement ont
indiqué qu'ils pourraient procéder ainsi s'il
y a soupçon d'« abus » par un
propriétaire, par exemple, si les enregistrements sont
délivrés pour une liste excessivement longue de
produits et services avec peu de probabilité d'emploi
réel. Bien sûr, tout titulaire qui reçoit un
tel un avis pourra simplement produire une nouvelle demande
d'enregistrement en vertu des nouvelles dispositions du projet
de loi et, à moins d'une opposition, il obtiendra un
nouvel enregistrement - puisque l'emploi n'est plus une
condition préalable à l'enregistrement.
- L'inscription d'une cession n'exigera plus
de preuve, telle une copie de la cession, à moins
que la demande soit faite par le cessionnaire.
- Les actes qui constituent une violation de la marque
seront modifiés pour inclure l'importation et
l'exportation de produits, d'étiquettes et
d'emballages en liaison avec une marque de commerce ou un nom
commercial créant de la confusion. L'objectif
de ces dispositions n'est pas de légiférer
l'importation parallèle. À NOTER : Le projet de
loi no 8, la Loi visant à combattre la
contrefaçon de produits, n'a pas encore
été adopté par le Parlement, mais le sera
probablement à l'automne 2014.
- L'enregistrement n'aura pas pour effet
d'empêcher l'emploi de toute caractéristique
utilitaire incorporée dans une marque de
commerce.
- Le registraire pourra détruire ses dossiers pour
les demandes d'enregistrement abandonnées et
radiées, six ans après la date d'abandon ou de
radiation. À NOTER : Cette disposition a
été largement critiquée par plusieurs comme
ayant un impact sur la preuve dans des procédures
d'opposition ou des litiges futurs. Le Canada ne permet pas
d'accès en ligne aux correspondances du Bureau des
marques de commerce, néanmoins les dossiers ont toujours
été disponibles pour inspection. On ne sait pas
présentement quand les dossiers seront disponibles en ligne,
mais le gouvernement a indiqué que les modifications
s'appliqueront même si les dossiers en ligne ne
deviennent pas disponibles.
- Les enregistrements pourront être radiés
si le tribunal détermine que l'enregistrement est
vraisemblablement de nature à restreindre d'une
façon déraisonnable le développement d'un
art ou d'une industrie. Actuellement, la radiation est
limitée aux motifs liés au caractère non
enregistrable, à l'absence du droit à
l'enregistrement, à l'abandon ou à
l'absence de caractère distinctif.
- Il y aura une consultation publique concernant les règlements et les frais. La consultation débutera possiblement cet été. On ne sait pas encore si les frais seront établis par classe ou si un rabais basé sur le volume sera permis, tel qu'offert présentement pour les demandes d'enregistrement de marques communautaires. Il n'y a pas eu de consultation pour déterminer si les demandes de classe unique ou les demandes couvrant plusieurs classes seront permises. Jusqu'à ce que les règlements soient mis en Suvre, le projet de loi n'entrera pas en vigueur. Possiblement, certains aspects du projet de loi, dont l'implémentation du Protocole de Madrid, entreront en vigueur plus rapidement que d'autres modifications.
Nous vous tiendrons au courant de l'état du projet de loi, y compris lorsque les projets de règlements seront disponibles pour commenter ainsi que toute information sur les frais.
The content of this article is intended to provide a general guide to the subject matter. Specialist advice should be sought about your specific circumstances.